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    Ce qui restera : nos objets nous définissent-ils ?

    Ecrit par Cécile Hupin et mis en scène par Héloïse Meire, avec Gwen Berrou, Carole Lambert, Fabrice Rodriguez, Martin Rouet et Isabelle Wéry. Jusqu’au 30 octobre au Varia.

    Au Varia, un huis-clos haut en couleurs nous emporte dans un tourbillon d’aventures et nous interroge sur nos possessions.

    La veille du Nouvel An, quelques rares habitants d’une île s’inquiètent : un déluge menace de détruire leurs logements. Pour contrer le danger, ils se réfugient avec leurs affaires personnelles dans l’Alma, un espace sécurisé géré par une intelligence artificielle. A cinq ou plutôt six – si on compte le bébé – ils attendent, se découvrent, s’entraident, se disputent et font la fête. Mais la nature déchaînée ne les épargne pas. Peu à peu, l’Alma présente des signes de défaillance et la situation part à vau-l’eau.

    Au sein du bâtiment sécurisé, chacun entretient une relation étroite avec ses objets. Yuri est minimaliste au point de ne s’attacher à rien tandis qu’Eddy tente de préserver par tous les moyens la collection au passé colonial de son amant défunt. Kim, la plus décalée du groupe, détourne allègrement les objets de leur utilité première. Axel, elle, endosse le rôle de jeune maman moderne ultra accessoirisée. Quant à Sonia, grande angoissée à l’idée de disparaitre, elle enregistre et photographie tout pour laisser une trace de son passage sur terre.

    Phénomène ancré dans la nature humaine, le rapport aux objets façonne notre identité, structure notre existence. « Ce que tu possèdes finit par te posséder » disait Jack dans le film culte Fight Club de David Fincher. Véritable prolongation de nous-mêmes, les objets qui nous entourent nous définissent et trahissent le rapport que nous entretenons avec les autres. Ils se déclinent tantôt en supports de désir et d’attentes, tantôt en supports de revendication ou de consolation. Pour Cécile Hupin, l’auteure de la pièce, « Ce qui restera est une fable sans morale qui vient mettre en lumière nos propres paradoxes dans la relation que nous entretenons avec la matérialité qui nous entoure ».

    Après Tout ce que je possède et Êtres et avoirs, Ce qui restera est la dernière création de Héloïse Meire et de Cécile Hupin ; la pièce boucle la trilogie L’objet de mon attention sur la dé/possession et notre rapport aux objets que la compagnie What’s up porte depuis trois ans. Selon Héloïse Meire, il est important que le spectateur promène son regard dans l’espace scénique comme dans un tableau. « J’ai beaucoup été puiser mon inspiration du côté des arts plastiques, pour venir jalonner le spectacle de moments visuels » déclare-t-elle. Sur scène, des références à Boltanski et à Ursus Wherli en passant par le Radeau de la Méduse de Géricault se bousculent et donnent au spectacle un rendu visuel créatif.

    La pièce fait également écho à notre actualité tourmentée. Entre la crise sanitaire et les catastrophes naturelles, le rapport à la possession et à la perte prend une dimension plus intense. Les gens déménagent, se déplacent, font corps avec certains objets. Que sauver en premier ? Un objet précieux, un porte-bonheur, des photos, un objet fonctionnel, un souvenir ? Et puis, au fond, face à notre inéluctable disparition, que restera-t-il de nous ?

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