Le Cabaret Vert, toujours aussi fidèle et engagé dans sa programmation et son organisation, offre une 12ème édition haute en couleur.
Quatre jours sous le soleil et la chaleur (38°C enregistré le vendredi, un record pour le festival ardennais) et surtout quatre jours de musique et autres activités artistiques que propose le festival, bref quatre jours de bonheur.
De plus le dernier festival aoûtien promet toujours une programmation de qualité, avec des exclusivités, des têtes d’affiches alléchantes le tout mêlé à une scène local dynamique et explosive.
Jeudi 25 Août
C’est sous un soleil de plomb que les premiers fans d’Indochine s’installent devant les barrières qui ferment le festival. Ils sont tellement nombreux que, déjà quelques heures avant l’ouverture du festival, il est compliqué d’accéder au camping.
Une fois dans sur le site, les habitués découvrent les nouveaux équipements, et les non-initié découvre un festival eco-responsable. Après s’être approvisionné de Bayards (la monnaie du festival), les festivités commencent avec le Temps des Cerises. Un endroit conviviale ou les DJ (notamment Raspect Crew & Asher Selector présent tous les jours) vont se succéder tout le weekend à l’ombre des arbres décoré de néons.
Mais le festival « Rock » commence réellement sur la scène Les Illuminations avec le trio new-yorkais, Highly Suspect et leur rock je-m’en-foutiste et chaotique. De quoi ravir n’importe quel fan de Queen Of The Stone Age ou Royal Blood, avec leur son un peu sale et les effets poussé à fond, du bon vieux Rock pour lancer le festival.
Sur la scène Zanzibar et dans un tout autre registre, c’est au tour de Damian « Jr. Gong » Marley, un des meilleur, si ce n’est le meilleur représentant actuel du Reggae, de ravir les festivaliers.
Il a réussi à dépoussiérer ce genre et offrir un show dynamique et rythmé, notamment en faisant participer le public dès la première chanson et jusqu’à la dernière, au programme du chant, des sauts, des mains en l’air… Durant tout le concert le drapeau rastafari survole la scène, tradition oblige le chanteur au dreadlock qui tombent jusqu’aux genoux, reprend des classiques de son père pour le plus grand bonheur des fans.
La folie douce du King Gizzard & The Lizard Wizard a envahi la plaine du Cabaret Vert. Deux batteurs, une flûte traversière, des guitares qui ressemblent à des jouets, un synthé fou, et vous avez le mélange parfait pour ce concert psychédélique.
Passé le côté surprenant du groupe qui fait sourire, ils offrent un show plein de sincérité et de qualité dans lequel on passe de ballade joyeuse a un pop-electro agressif.
La Cabaret Vert ce n’est pas qu’une (très bonne) succession de concert sur 2 scènes mais aussi un festival de BD, d’art de rue, un cinéma, un village associatif et le terroir ardennais magnifiquement mis en valeur.
Après un passage au village associatif ou tout et n’importe quoi se côtoie (Sea Shephrer et Génération Cobaye avec leur Eco-Orgame côte à côte par exemple) on file au Chapiteau Aux Images. Une immense tente noire dans laquelle on trouve 3 grands écrans et des programmations différentes tous les jours. On se pose devant des clips, loin de la chaleur et du soleil, on voit passer devant nos yeux David Bowie avec Ashes To Ashes, ou Même Si J’Explose de Mass Hysteria entre deux clips d’Indochine.
Justement place à Indochine d’entrer (enfin) sur scène, après s’être fait désiré un petit moment, ils débarquent avec Salomé du dernier album Black City Parade. Dès les premières notes, on entend hurler les premiers rangs des fans qui ont attendu parfois plus d’une journée pour voir le groupe français.
Dernière des sept dates estivales du groupe, et pas des moindres puisque comme l’explique Nicola Sirkis, Charleville-Mézière est la ville d’origine de Rimbaud qui a beaucoup inspiré le groupe. Le concert est dynamique, bien que les intro de chaque chansons peuvent paraître un peu longues. La setlist est un peu une setlist best-of, on nous ressort le meilleur des albums Paradize ou Alice & June. On a même le droit à un medley enormissime en fin de set Canary Bay/Des Fleurs Pour Salinger/ Paradize/ Satellite/ Astroboy/ 3e Sexe/ Black City Parade avec, en bonus, des ballons gonflés géants lancé dans le public. Sur cela, le groupe quitte la scène. Sous les acclamations du public en délire, le groupe revient pour finir en beauté avec 3 Nuits Par Semaine et le tube l’Aventurier.
A peine le temps de dégusté une salade au lard ardennais, et c’est M83 qui entre en scène. Devant un public qui s’est déjà vidé, les français entre sur une scène bleuté et étoilé.
Malgré le bonheur non dissimulé d’Anthony Gonzalez de jouer au Cabaret Vert et les solos de saxophone endiablé, le public n’est pas convaincu, à part le combo Midnight City + Outro, rien n’a y faire, le public se vide de plus en plus. C’est devant un public aussi mitigé qu’Anderson .Paak termine la première journée sold out du Cabaret Vert.
Vendredi 26
Il fait encore plus chaud que la veille ce vendredi. Le soleil tape déjà dur le matin sur les tentes. Au camping, il est difficile de trouver de l’ombre. Après avoir fait un tour Au Temps des Freaks, l’espace Art de Rue au Square Bayard (le chevalier qui s’était d’ailleurs refais une beauté pour l’occasion).
On peut enfin découvrir des petits nouveaux de la scène locale : We Are Shadows. C’est la première fois pour le groupe qu’ils jouent sur une scène aussi grande. Bien que le guitariste à l’air crispé derrière sa Telecaster, tous les autres ont l’air très à l’aise. Le Rock/Metal inspiré de Deftones ou Gojira de ces carolomancériens est efficace et de qualité.
La chanteuse a déjà l’étoffe des grands et lance un wall of death plutôt réussi, un circle pit, fait sauter (surtout suer) tout le monde. Ils ont surement réussi à mettre la meilleure ambiance du festival en l’espace de 40 petites minutes.
We Are Shadows ont préparé psychologiquement et physiquement les festivaliers à la tornade Mastodon. Qui a dit que les metalleux étaient méchants et jamais contents ? Au contraire, les quatre américains de Mastodon sont plus qu’heureux de jouer au Cabaret Vert et ne s’en cache pas, même si c’est en début d’après-midi sous un soleil californien. Le groupe avait dû annulé leur venu l’année dernière et se sont bien rattrapé cette année.
Les fans étaient aussi présents, le groupe les a d’ailleurs remercier plusieurs fois pendant le concert car ils ont aussi bien participé à l’ambiance qu’à la bonne humeur du groupe.
On enchaîne avec Yeti Lane, beaucoup de monde soudainement sur la scène des Illuminations, mais surtout à cause de l’ombre que procure la scène, un des rares endroits où l’on en trouve sur le festival. Yeti Lane refroidissent bien l’ambiance mis en place auparavant avec We Are Shadows et Mastodon. L’enchaînement avec leur pop psychédélique n’est pas facile, et conquérir son public avec ce genre de musique en plein jour l’est encore moins.
On retourne se réchauffer sur la Scène Zanzibar et les Australiens de Wolfmother. Pour ceux qui pensent encore que Wolfmother est un one-tube band, ils devraient aller les voir en concert avant de dire ce genre de chose. Le trio à cette petite touche de folie en live qui n’est pas désagréable, et malgré quelques tentatives foireuse du chanteur à communiquer avec le public, ils n’ont pas besoin de ça, la musique fait le reste. Ils balancent la bombe Woman dès le troisième titre, et ne redescendent plus la bar Heavy Metal Rock’n’Roll déjanté jusqu’à la fin du concert qui se clôture sur le fameux Joker and The Thief.
Grandaddy et leur Space Pop toute douce font presque le même effet que Yeti Lane précédemment, comme un goût d’un peu trop mou, d’un peu trop triste.
C’est le moment d’aller découvrir une nouvelle spécialité ardennaise, le sanglier. Un stand à l’entrée du festival fait cuire un sanglier entier broché au-dessus d’un feu de bois, que demander de plus, bienvenue chez Astérix & Obélix !
Entre deux bouchées de sanglier, des festivaliers venus de Belfort et habitués des Eurockéennes reviennent pour la deuxième année consécutive au Cabaret Vert. Pour eux, ce qui fait la force de ce festival, c’est sa diversité culturelle et le plaisir de ne pas faire qu’assister à des concerts, mais pouvoir aussi savourer une tarte au Maroille devant deux clowns qui s’affronte dans un match de tennis acharné (Maboul Distorsion) au Temps des Freaks ou lire une BD à l’abri du soleil.
Il fallait bien reprendre des forces avant d’assister au concert des L7 (qui prenait le créneau horaire de Sharon Jones & The Dap-kings qui avaient annulé). Les quatre américaines commençaient tout juste leur tournée européenne au Cabaret Vert et étaient là pour nous faire oublier que 1) le rock’n’roll n’est pas mort et 2) les filles aussi peuvent faire du très bon rock’n’roll. Le concert était jouissif, et elles non plus n’ont pas caché leur plaisir d’avoir un public aussi investi dans le concert.
Après le feu et les slams chaotique mais festifs des L7, on se retrouve sur une scène principale blindée. Les têtes d’affiches de la soirée, Louise Attaque, vont jouer à guichet fermé, à l’image de leurs compatriotes d’Indochine la veille. Ils commencent le concert doucement mais surement avec le classique Ton Invitation, de quoi ravir tous les festivaliers. Pour un moment cela dit, le concert est mou et manque de dynamisme, les longues interventions de Gaetan Roussel font redescendre le plaisir du public de reprendre les refrains en cœur.
A l’inverse, Nekfeu qui suit Louise Attaque, devant un public certes moins bien fournis mais bien plus passionné, réussi à mettre le feu au Cabaret Vert. Avec tout son « crew », le jeune rappeur est un véritable frontman. Il est partout sur scène et se permet même de discuter avec le public. Quand on se demande pourquoi tant d’effet lumineux sur scène on comprend la folie des grandeurs du jeune rappeur lorsqu’il finit dans un zodiac (oui un bateau) soulevé par le public avec un de ses acolytes à la fin du set.
La soirée se termine avec des jeunes prodiges de l’electro français : Jacques, plus qu’heureux de se produire au Cabaret Vert et qui finira son concert debout sur les mains, ainsi que Comah et sa minimale progressive agressive qui a séduit les festivaliers férus d’electro.
Samedi 27 Août
Comment peut-on faire un festival qui se veut écolo, rock et territoire sans inviter les fermiers rockeurs de The Inspector Cluzo. Et ça commence fort, à base de « putain de bordel de merde qu’est-ce qu’il fait chaud ici » traduit du gascon bien évidemment. Entre deux titres à la limite entre le funk et le stoner, ils crachent sans honte sur les « musiques d’ordinateur » justement le jour où il y a la plus grosse programmation electro au Cabaret Vert. Bien qu’ils ne soient que deux ils dégagent sur scène une énergie de fou.
Le batteur est toujours debout à chercher les cris du public. Ils passent de chansons engagées sur ceux qui se sont battu pour nous (un discours poignant sur les terres ardennaises évidemment), ou qui prônent l’agriculture et les traditions, ou encore des chansons plus légères comme Fuck The Bass Player (et ils ne rigolent pas quand ils disent ça).
Grand Morse représentent bien la scène locale de Champagne-Ardenne, un rock de qualité avec leurs guitares lourdes, et le côté pop au synthé complètement assumé. Leur force en live est un chanteur complètement imprégné de sa musique. Grand Morse c’est le plaisir d’un genre un peu hors des clous sans nous priver du pop rock que l’on aime tant, en y ajoutant des bruits un peu étranges et un côté dansant irrésistible. En live, c’est à ce moment que la musique hybride du groupe prend réellement toute sa dimension.
Mass Hysteria ont-ils encore besoin de prouver qu’ils sont des bêtes de scène ? Même dans des festivals un peu moins métal comme le Cabaret Vert, la bonne humeur et la puissance musicale sont bien présentes. Beaucoup de fans présents, mais peu de curieux.
Un groupe qui est proche de son public, et qui soutient la scène française, bien que leur espace scénique a un gout de grandeur américaine : deux grands murs d’ampli Marshall et une batterie Pearl double caisse énorme. Positif A Bloc est la chanson qui plait le plus au public avant de terminer avec le combo Plus Que Du Metal et Furia.
On connait le Jake Bugg timide, qui se cache derrière ses lunettes noires et ne sort pas un mot du concert. Mais il a bien changé, on est pas encore au point qu’il se jette dans le public en faisant des discours mais le square Bayard a eu le droit à des remerciements en français et en anglais et quelques introductions pour des chansons.
Scéniquement parlant beaucoup plus de jeux lumineux qu’auparavant, un fond coloré à l’image de son dernier album On My One et un nouveau musicien. Dans le public il y a ceux qui attendent surtout les nouvelles chansons et ceux qui préféraient entendre les anciennes. Mais le jeune anglais est généreux, 11 chansons de ses deux premiers opus et 6 de son dernier.
Place à la première très grosse tête d’affiche du festival, le retour gagnant de Sum 41 et le leur bonne humeur infatigable. Bien qu’après l’hospitalisation du chanteur en 2014 on ne les voyait pas revenir sur le devant de la scène, les Sum 41 (du moins ce qu’il en reste) sont bien de retour pour le plus grand plaisir de leurs fans qui ne les ont pas oublié.
Et ils attaquent fort dès la première chansons quelques fans sont permis de monter sur scène pour une durée indéfinie ! C’est un véritable show à l’américaine, et on ne va pas vous le cacher, ça fait du bien de temps en temps. Ils reprennent leurs classiques The Hell Song, In Too Deep ou encore Fat Lip. On a aussi eu le droit à une nouvelle chanson, Fake My Own Death et surtout des reprises comme We Will Rock You de Queen ou un medley Smoke On The Water/Brain Stew/Seven Nation Army, de quoi mettre le feu à un public déjà chaud comme la braise.
Black Bones est le groupe local qui aura gagné la meilleure plage horaire de ce festival, 22h20 > 23h juste entre Sum 41 et Bloc Party. Le style musicale de ce groupe est indescriptible, tout comme sa mise en scène. On passe d’une chanson de pirate à un dubstep infernal en passant par de l’eurodance belge. Sur scène on passe d’un noir intense ou avec des danseurs croisé entre un zombie et un néons à une explosion de lumière. Un ovni musical et scénique en plein milieu de ce Cabaret Vert, bien plus qu’agréable. Certains diront que l’univers explosif de ce groupe est leur faiblesse d’autre diront que c’est leur force. En tout cas, ils ont surement conquis les festivaliers présent avec leur show complètement dingue.
Place aux londoniens de Bloc Party, un concert en demi-teinte, un peu comme leurs choix musicaux ces dernières années. En effet, la transition pop-rock à electro est mal digérée et même pendant le concert cela ce fait ressentir avec plus d’engouement pour les chansons de la première aire.
La fin de soirée pour cet « eco-festival rock » sera plutôt sous le signe de l’electro, de 23h à 3h du matin s’enchaîne Club Cheval, les poids lourds de Caissus avec leurs mise en scène volcanique, Molecule et Torb.
Dimanche 28 Août
Le dimanche est la journée la plus clame mais aussi la moins chère, à seulement 5€, c’est un beau geste que fait le festival qui permet à toutes les bourses de profiter de ce festival géant. Pour preuve, à 14h les festivaliers sont déjà au rendez-vous du côté du Temps des Freaks pour l’art de rue. La compagnies des bonimenteurs de Namur n’y sont pas pour rien, ils rameutent beaucoup de monde devant la statue du chevalier Bayard qui aura bénéficier d’un nouveau look le temps du festival où ont lieu des spectacles vivant en tout genre.
On commence encore la journée avec une artiste locale, mais qui nous laissera un goût plus amer que ses prédécesseurs. La remoise franco-anglaise, Paulette Wright, peine à réellement transmettre les émotions de ses chansons. Il manque un petit quelque chose, peut-être plus de chaleur à la jeune chanteuse, qui a encore le temps de s’améliorer.
La mauvaise histoire de ce Cabaret Vert 2016 sera celle des Songhoy Blues, qui après avoir perdu tous leurs bagages ainsi que leurs instruments de musique, sont resté coincé dans les transports et sont arrivé avec une bonne demi-heure de retard. Heureusement un groupe (l’histoire ne raconte pas lequel) a accepté de leur prêter des instruments, pour que leur concert est tout de même lieu. Le blues joyeux du groupe n’est pas endommagé, et ils réussissent tout de même à apporter la bonne humeur malienne.
Une chose est sûre, c’est que Grand Blanc ne se cache pas de son public. Le groupe dépose ses tripes sur scène et interprète des chansons intenses et lourdes. Une pop tranchante, à l’arrière-goût rock et electro, un chanteur tellement investi et en colère qu’on verrait bien à la tête d’un groupe punk et une chanteuse encore plus étrange que les Black Bones eux-mêmes.
Chaque chanson est introduite par une question direct au public « est-ce que vous aimez faire la fête ? » « est-ce que vous aimez l’amour ? ». Avec des textes posés sur une mélodie qui n’a rien à voir, une naïveté et une honnêteté rare c’est ce qui fait le charme de Grand Blanc et qui a plu au Cabaret Vert.
Feu! Chatterton nous emmènent dans une autre dimension, des textes poétiques, aussi poétiques que les interventions d’Arthur, le chanteur qu’on avait parfois du mal à suivre. Les quatre parisiens n’ont plus rien à prouver musicalement, bien que leur concert aurait surement était mieux apprécié la nuit que sous le soleil de plomb de la fin d’après-midi.
La tête d’affiche que l’on attendait en ce dimanche était bien sûr le rockeur belge Arno, bien qu’il n’ait pas attiré autant de monde que les autres jours. Breakbot a eu l’honneur de clôturer cette 12ème édition du Cabaret Vert.
Une édition sous le signe du soleil et de la chaleur, ce qui n’est pas le cas tous les ans dans les Ardennes françaises.
Une programmation très bien balancé entre la qualité des artistes locaux mélé à celle des plus gros artistes et une organisation au millimetré qui en font un festival plus qu’agréable qui donne envie d’y retourner.
Photos : Darkroom