Scénario et dessin : Enki Bilal
Éditions : Casterman
Sortie : 22 novembre 2017
Genre : Anticipation, science-fiction
Enki Bilal occupe depuis de nombreuses années une place de choix dans le champ de la bande dessinée franco-belge et, peu s’en faut, sa position est d’autant plus enviable si l’on se restreint au domaine Ô combien délectable de la science-fiction et de la BD d’anticipation, notamment grâce à l’excellente Trilogie Nikopol qui lui permit d’acquérir ses lettres de noblesse une fois pour toutes.
En 2017, Bilal nous est revenu sur le devant de la scène avec le premier tome d’une nouvelle saga en devenir : le dénommé BUG. L’intrigue se situe dans un futur relativement proche, en 2041, année fatidique où ce qui devait arriver arriva : le pire. Sans crier gare, un gigantesque bug numérique, inexplicable et insoluble, livre l’humanité à elle-même, dans un monde où plus rien ne fonctionne.
Du premier coup d’œil, une chose est sûre : le bédéaste n’a rien perdu de ce qui fait de lui un grand dessinateur et, cette fois-ci encore, il nous propose un objet d’une grande beauté, à la hauteur de sa réputation, et fidèle à son style glacial caractéristique. En revanche, nous éprouverons quelque difficulté à nous montrer aussi élogieux en ce qui concerne le scénario…
De l’apocalypse zombie aux cataclysmes naturels, les auteurs d’anticipation en tout genre raffolent des scénarios catastrophe. Dès lors, pour ne pas faire bande à part, Enki s’est lancé à son tour et à pieds joints dans ce genre porteur, avec pour angle d’attaque le thème du blackout généralisé – à l’exception d’un irréductible, mais ça, on vous laisse découvrir par vous-même.
Si le choix du sujet ne brille pas par son originalité, ce n’est pas là que le bât blesse. En effet, le lecteur SF raffole des variations sur un même thème qui, loin de le lasser par leur effet répétitif, lui permettent d’approfondir un sujet, en comparant les idées de chaque auteur, en soupesant la vraisemblance des scénarios et en se délectant de la façon dont ceux-ci jouent avec les codes liés à un genre donné.
Non, le problème réside ailleurs.
Le problème de BUG réside sans doute dans la difficulté permanente, page après page, qu’éprouve le lecteur à se plonger dans le récit, à avoir envie de connaître la suite et à s’intéresser au sort des différents personnages.
En clair, le problème, c’est qu’on ne mord pas à l’hameçon. BUG est un ouvrage honorable, mais qui ne se dévore pas. On le lit sans conviction, sans doute parce qu’il lui manque le fameux « je-ne-sais-quoi » qui distingue tôt ou tard les chefs d’œuvre du reste de la production.
Alors, Enki Bilal lanceur d’alerte ? On pourrait dire ça oui… Mais en même temps, est-ce qu’on a vraiment attendu que sorte sa BD pour comprendre que l’humanité est de plus en plus dépendante de ses innovations technologiques ?