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    BRFF : I’m Yours, drame léthargique

    im yours affiche

    I’m Yours

    de Iram Haq

    Drame

    Avec Amrita Acharia, Ola Rapace, Prince Singh, Rabia Noreen, Trond Fausa

    Mina est une jeune norvégienne d’origine pakistanaise. Mère célibataire d’un petit garçon, cette dernière souhaite connaitre l’amour, sous quelque forme que ce soit. En accumulant les aventures, Mina affirme sa féminité mais semble également chercher l’amour, le vrai.

    Pour cette première vision au Brussels Film Festival 2014, nous avons choisi ce drame norvégien car le cinéma scandinave recèle d’innombrables ébahissements, bons ou mauvais. Un cinéma de caractère qui n’est pas si éloigné du cinéma belge, même si l’humour y est plus discret.

    La jeune réalisatrice Iram Haq ne vous dit certainement rien et c’est tout à fait normal puisque I’m yours (Jeg er Din dans sa version originale) est son tout premier long métrage. Un baptême du feu salué dans de nombreux festivals, notamment le prestigieux TIFF.

    L’histoire vous emmène dans la vie de Mina. Une jeune norvégienne d’origine pakistanaise qui n’a de ses racines que le poids inerte d’une culture à mille lieues de ses envies libertaires. Ouvertement attirée par le sexe opposé et ce qui peut lui apporter de jouissif, la jeune femme doit vivre avec le regard accusateur d’une culture déconsidérant la gente féminine.

    Le film d’Iram Haq a une odeur autobiographique. Difficile en effet d’occulter les ressemblances entre la cinéaste et notre héroïne, ne fût-ce que sur l’intégration dans un pays aux moeurs si opposées de celles du pays d’origine. Néanmoins, ce film reste une fiction. N’occultant que légèrement les tabous, il confronte le spectateur à une dure réalité.

    Scènes de masturbation ou ébats sexuels, I’m yours ne laisse que peu de place à la censure, ce qui n’est pas pour nous déplaire. En outre, dès le premier quart d’heure, on sent toute l’aisance d’Iram Haq à produire une oeuvre empreinte de vérité. Oui, mais à force de vouloir nous dépeindre un tableau dramatique de manière réaliste, la réalisatrice installe petit à petit son récit dans une lenteur scénaristique voire un immobilisme.

    Le sujet est lourd de sens, et il fallait dès lors jongler avec l’empathie pour que le public puisse accrocher à cette histoire. Mais voilà, cette image figée – alourdie par l’austérité des intérieurs norvégiens et la lumière froide des néons – met le cinéphile dans une position inconfortable, celui du voyeur éhonté.

    Sans s’en rendre réellement compte, on assiste à une succession de scènes de drague, de quêtes existentielles, sans vouloir pour autant en connaitre les tenants et les aboutissants. Si le fil rouge de la relation mère-fils est intelligent, la romance – thème central du récit – est survolée. On comprend ce qu’il se passe, ce qu’il se trame et pourquoi Mina en est là, mais on ne compatit pas.

    Photographie trop sombre d’un pays trop froid, l’image est sans cesse ternie par la surabondance de clichés tragiques.

    Cependant, les acteurs sont justes et admirables dans leurs rôles. Si les hommes ne passent que trop vite pour être analysés, la prestation d’Amrita Acharia est époustouflante de professionnalisme. L’actrice habite son personnage, le fait vivre ou plutôt le fait dépérir dans une quête de soi très complexe.

    En résumé, I’m Yours possède des qualités techniques incontestables. Toutefois, le récit est sans cesse lesté par le poids de l’inertie, semblant tourner en rond à l’instar de son héroïne. En voulant faire un film sur l’amour, Iram Haq s’est un peu enfermée dans une bulle, ce qui a pour conséquence de provoquer une certaine lassitude du public.

    Matthieu Matthys
    Matthieu Matthys
    Directeur de publication - responsable cinéma du Suricate Magazine.
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