Chorégraphié et dansé par Caroline le Noane et Justin Collin. Du 15 au 31 mars 2018 au Théâtre des Riches-Claires.
La pièce commence, deux danseurs apparaissent, Caroline le Noane et Justin Collin ou plutôt deux silhouettes. L’objet apparait avant le corps : il se dessine à travers vêtements et lumières. L’imaginaire du spectateur est tout de suite sollicité, les sens se réveillent pour vivre l’histoire qui s’installe.
Le centre de la scène est occupé par un objet insolite : un porte-manteau construit sur-mesure. Seul objet scénographique, il ne cesse de changer de rôle et incarne un véritable manège onirique : les images défilent, nous projetant dans différentes dimensions.
Une histoire d’amour se dessine, passionnelle et drôle, parfois oppressante. Les danseurs se découvrent, s’apprivoisent, s’aiment et se détestent. Le corps devient la clé d’une réconciliation ou la cause d’une séparation. Les rôles s’inversent et s’emmêlent, le bourreau devient victime, le pilier cherche son appui. La chair, le membre ou le muscle saillant sont exhibés : le corps est objet. Objet, qu’ils manipulent, qu’ils protègent ou rejettent. Ils tentent de créer un langage amoureux. Le miroir de « l’autre » leur permet de se dévoiler. Ils s’écoutent, se suivent et s’évitent.
Les personnages vivent et dansent les émotions qui surviennent. L’interprétation est par moment sur-jouée. Les expressions et les gestes semblent dictés, déjà établis, ce qui nous empêche de rentrer dans l’histoire. La danse est parfaitement exécutée mais on guette l’abandon des protagonistes. On attend de les voir vivre, qu’ils nous surprennent en nous laissant approcher leurs faiblesses autant que leurs aptitudes. Si l’on voit très bien deux danseurs, nous préférerions voir deux corps.
C’est finalement au milieu de la pièce que l’énergie s’inverse. Après qu’ils aient piétiné la scène, que l’épuisement se fait peut être sentir, leurs corps semblent de plus en plus justes. Le temps installe une sorte de vérité. Le duo devient au fur et à mesure plus sensible et on s’y attache.
Une dimension circassienne apparaît, et les interprètes réussissent habilement à allier acrobaties et danse. L’humour et l’interprétation semblent prendre sens. La scène devient un terrain de jeu, un espace d’expérimentation qui crée des moments suspendus. Lorsque leurs corps s’ancrent au présent, l’espace-temps devient plus étonnant.
La pièce fourmille d’essais généreux. Entre jeux de lumières et d’ombres, jeux d’objets et d’images, jeux de cirque et de danse, les informations se succèdent et ne nous laissent pas toujours le temps de les vivre en profondeur. On ne peut cependant pas nier l’intensité que Caroline Le Noane et Justin Collin nous offrent : ils se donnent corps et âme avec humilité. Ils nourrissent la scène de leurs énergies et de leurs envies de créer.
Au final, la pièce Brèves de vestiaire se révèle touchante malgré un début trop contrôlé et appliqué. A la fois ludique et poétique, elle saura s’adresser à tous les âges.