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    Le Blues du braqueur de banque chez Babel

    le blues du braqueur de banque couverture

    auteur : Flemming Jensen
    éditions : Babel
    date de sortie : 1er octobre 2014
    genre : Humour, satire, politique

    Max est metteur en scène. Enfin, conseiller politique. Mais vous serez d’accord que c’est chou vert et vert chou: œuvrer dans l’ombre et diriger l’action sur le terrain sans s’y faire voir. Et il y a de ces situations où votre expertise professionnelle est réellement mobilisée. Comme quand vous venez de tuer votre meilleur ami, accessoirement le premier ministre du Danemark, avec une bouteille de whisky, et que vous êtes surpris sur les lieux du crime par une scoute à la curiosité affûtée. Et le braqueur de banque dans tout ça ? Toute histoire a besoin d’un conteur, pas vrai ?

    Dans ce livre, l’auteur Flemming Jensen (Imaqa, Maurice et Mahmoud) prête son humour à un sympathique narrateur qui nous annonce d’emblée un programme simple, clair et efficace : « Ce livre se compose de trois parties : l’exposition, la description des personnages et le dénouement » (p.5). Rigoureux, il précise que l’histoire concerne celui qui force tant son admiration, Max. Enfin, il prend soin de nous avertir de son ingérence dans un récit qu’il n’aura de cesse de commenter.

    Cependant, quelques notions en géopolitique dano-groenlandaise font défaut et permettent pourtant une meilleure compréhension du récit. Constitutive du Danemark, l’île du Groenland a toujours suscité un attrait certain pour les Etats-Unis en tant que prolongement de leur continent. D’ailleurs, en 1941, au début de la deuxième guerre mondiale, les Américains ont eu l’autorisation d’y installer Thulé, une base militaire. L’action du livre de Jensen prend donc place au milieu de pourparlers entre les Américains (« d’assez grands garnements » p.14) voulant étendre leur influence sur  le Groenland qui, opposé à cette idée, s’en remet au royaume de la petite sirène, ce dernier, le Danemark, étant politiquement et économiquement ouvert à toute proposition (« Qu’est-ce qu’on ne ferait pas pour ces cow-boys ! » p.15). Vous voilà parés.

    La phase d’exposition du récit progresse tranquillement, reliant entre elles des éléments improbables – les négociations susmentionnées, un match de foot Suède-Turquie et un achat de canapé, par exemple –, jusqu’à nous mener là où tout se joue : dans un vieux hangar de kayaks, où le premier ministre vient d’être tué par Max et où Signe, la jeune scoute, entre pour récupérer son GSM. Partant de là, la description des personnages est un crescendo dans l’entourloupe jusqu’à une fin surprenante.

    Sans y toucher, en nous distrayant avec des remarques drôles et des piques à propos des Suédois – mais pas seulement: « les Suédois sont les voisins les plus divertissants dont un pays puisse rêver. Bien plus encore que les Belges ! » (p.120) –, le livre sème en chemin des réflexions sur la démocratie, les médias, l’éthique, etc., jusqu’à nous lâcher au beau milieu de l’incertitude, sans qu’aucune botte des sept lieues nous permettent de raccourcis faciles. À nous de retrouver notre chemin, et de méditer la citation de Robert M. Hutchins sur le glas du système démocratique qui clôt ce plaisant récit. Pour des sujets si sérieux, l’auteur aurait évidemment pu manifester un peu de sérieux, mais voyez-vous, « il n’y a pas grand-chose à faire – la vie est burlesque ! » (p.6).

    Sous un camouflage de gentil roman imaginatif, Le Blues du braqueur de banque est une satire politique. À moins que cela soit l’inverse. Ou quelque chose comme ça. Après tout, la vérité, c’est comme une boîte de pralines, il faut juste en choisir une bonne.

     

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