Titre : Billy Lavigne
Auteur.ice : Anthony Pastor
Edition : Casterman
Date de parution : 05 mars 2025
Genre du livre : Western
Avec Billy Lavigne, Pastor revient au genre du western. Dans une gamme chromatique allant du bleu au rose en passant par l’orange, l’auteur français propose une version particulièrement graphique et moderne du mythe du cow-boy.
On s’en souvient, Anthony Pastor avait signé un premier tome albâtre pour sa trilogie dédiée au far West. Les couleurs inhabituellement délavées, frigides, prenait, alors, le contre-pied des poncifs du genre. L’ambiance était glaçante. Bichromatique, avec une forte prédominance de blanc et de bleu. Pour ce second volet indépendant du précédent, l’auteur français décide de revenir à une ambiance estivale qui correspond mieux à l’image que nous nous faisons de la région. Mais pour autant, Pastor ne se standardise pas. Comme avec La femme à l’étoile, il joue l’équilibriste. En suspension entre assimilation et refus des codes du genre.
L’imbroglio de départ aurait pu être l’œuvre d’un Sergio Leone ou d’un Anthony Mann. D’ailleurs, Billy Lavigne commence par une brume sablonneuse. Cette fine particule qui semble toujours recouvrir les paysages des westerns hollywoodiens. Un homme creuse, le regard abruti. Il s’appelle Keller. Il est le dernier à avoir vu la mère de Billy Lavigne, vivante. C’est donc à lui que revient la tâche ingrate de lui faire une sépulture. Alors il pioche le sol, comme un condamné. Sous la supervision des silhouettes sévères de Thorpe et Ford. Les deux pères de Billy.
Elle était séduisante l’institutrice. Selon certains, un peu trop galante même. Mais les courants de la Carroll l’ont domptée. Culminée. La douce Maggie aurait profité du fait que le ruisseau était tellement gorgé d’eau qu’il ressemblait à un fleuve, pour piquer une tête. D’après Keller, la pauvre dame s’est fait mordre par un serpent. Ou coincer la cheville dans une racine. Elle s’est mise à crier et s’est noyée. Mais personne ne semble vraiment croire ce que raconte ce témoin, mal rasé. Avec ses grands yeux globuleux.
Là où l’histoire aurait pu tourner au carnage, Pastor s’arrête. Un peu de vengeance et de magouilles, mais pas d’effluves de sang. Par contre des torrents de larmes. Billy Lavigne est vite submergé par ses émotions. Il ne représente pas l’image virile du cowboy, bien qu’il ait le physique d’Henry Fonda jeune. Non, Billy Lavigne est aussi sensible qu’il est honnête. Il semble même prêt à accepter le rôle d’héritier que lui proposent ses deux pères. Surtout si c’est Thorpe qui l’aiguille. Même si Billy a connu les deux hommes quand ils partageaient la couche de sa défunte mère, seul l’ancien ranger a su conquérir le cœur du gamin. Mais dans cette relecture audacieuse du western, les gentils ne sont peut-être pas ceux qui le prétendent. Les hommes ne sont pas si brutaux. Et les femmes surtout, pas si ingénues. Mais le talon d’Achille de ce récit en santiag, c’est qu’il manque parfois un peu de dynamisme.