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    [BIFFF 2025 Jour 4] : Libéréééééééé, Détérééééééé, je ne surferai plus jamaaaaiiiiiiiiis !

    Le BIFFF, c’est beaucoup d’émotions, des moments exceptionnels vécus avec des personnes inoubliables, des moments ordinaires vécus avec des personnes oubliables et des moments oubliés vécus avec des personnes exceptionnelles. Ces derniers, ce sont mes préférés. Mais c’est aussi beaucoup de contrastes. Quand une personne a vécu une séance traumatisante, une autre s’est fait chier devant un film qu’on aura tous oublié dans 2 jours. Quand une de nos journalistes a été témoin du pire de l’esprit humain, une autre a passé tout le film de minuit à soupirer. Et puis, il y a les films qu’on n’a pas vus mais qu’on vous raconte quand-même. Parce que le Suricate, comme le BIFFF, c’est avant tout du phantasmagorique. Et un peu de bullshit aussi.

    Fury : Médée déterrée

    Le BIFFF, on le répète, ne se résume pas à une orgie de films Z à consommer entre deux Estaminet et quelques shots de Ragnarök. Il propose aussi des œuvres matures, capables, comme Fury, d’offrir une expérience cinématographique intense. On est loin du grand-guignolesque bon enfant auquel le festival m’a habitué : Fury fait taire jusqu’aux plus blagueurs, ceux qui d’ordinaire dégainent les vannes comme d’autres les cotillons. Dès les premières minutes, le film impose un rythme étouffant : on suit Alexandra, jeune femme en dérive lors de la nuit de la Saint-Sylvestre. Ça crie, ça danse, ça se drogue — un chaos organique qui évoque l’univers de Gaspar Noé. Et c’est un avertissement. Très vite, l’euphorie bascule. Dans un couloir, Alexandra, isolée, est violemment projetée dans une pièce obscure. Là a lieu un viol. Nous n’en percevons que le son. C’est suffisant pour faire naître une onde de choc dont le film — et la salle — ne se remettront pas. La suite est un lent effondrement. Honte, sentiment d’impureté, culpabilité, pensées morbides, soif de vengeance : autant de poisons diffusés dans le quotidien d’Alexandra. Pour fuir, elle s’abandonne aux paradis artificiels. Mais c’est dans le théâtre, et plus précisément à travers la figure de Médée, qu’elle trouve un miroir à sa douleur. Un miroir déformant, dévorant. Car Fury ne propose pas la tragédie comme catharsis. Ici, Médée n’épure rien : elle consume. Elle ne donne pas de distance critique à Alexandra, elle s’empare d’elle, l’habite, la ronge.

    Il ne faut pas avoir les nerfs fragiles. Le film ne donne aucun répit. Je suis sorti de la salle en suffoquant. Fury trace une ligne directe entre la salle obscure et le bar, comme si le corps avait besoin d’un contre-choc alcoolisé pour revenir à la surface. Tristesse, rage, silence : c’est dans cet état que le film nous laisse. Mais c’est aussi ça qui en fait un film fort : une expérience cinématographique où l’on capture viscéralement une image de l’enfer. C.K.

    Animal capturé pour le BIFFFODEX : j’ai été quand même heureux de retrouver, dans une scène chahutée, mais comique, mon grand ami Babe, le cochon.  

    Tabula Rasa : Heeeeey Macarena Ay !

    CHRONIQUE GARANTIE AVEC DES GROS MORCEAUX DE SPOILERS, VOUS ÊTES PRÉVENUS !!!

    Ça vous est déjà arrivé d’oublier où vous avez mis vos clés et de les chercher comme un fou parce que vous êtes à la bourre à un rendez-vous important ? Moi aussi ! Mais, en revanche, ça n’a rien à voir avec Tabula Rasa. A l’exception près que Leo (le personnage interprété par Macarena Gomez, pas Leo Messi) a la vague impression d’oublier à peu près tout ce qui compose sa vie. Son enfant est-il bien le sien ou celui de sa sœur ? Est-elle folle ou veut-on lui faire croire qu’elle est folle ? Son mari n’est-il pas plutôt celui de sa sœur ? Vous mettez d’abord la bière ou d’abord les céréales ? Oui, un peu quand-même, non, d’abord les céréales dans le bol puis la bière. Ah je vous avais prévenu, ça spoile comme des cochons ici. Tiens d’ailleurs, un autre spoiler :

    Co-production espagnole et de République Dominicaine, ce Tabula Rasa a un énorme atout dans sa manche : Macarena Gomez. Le scénario n’est pas mal ficelé mais légèrement trop simpliste et on n’a malheureusement pas le temps de douter des perspectives de la réalité présentées dans le film assez longtemps que pour s’y accrocher à fond. Alors non, la réalisation de Juanfer Andrés et Esteban Roel n’est pas mauvaise mais elle ne va pas assez au fond des choses. Mais heureusement, Macarena Gomez est là pour perpétuer la chaîne du porteur. Mais si, vous connaissez la chaîne du porteur. Je porte Macaraena Gomez jusqu’à l’autel pour notre mariage, Macarena Gomez porte Tabula Rasa, Tabula Rasa porte la République Dominicaine, la République Dominicaine porte la fabrication de cigares dans le monde en étant le plus grand pays exportateur de cigares premium au monde devant Cuba. La région de Santiago de los Caballeros surnommée la « capitale mondiale du cigare », abrite d’ailleurs de nombreuses manufactures réputées.

    Pas de bateau, pas de pierre, pas de pierre, pas de palais, pas de palais,…pas de palais. Vous avez compris le concept. O.E.

    Animal trouvé pour le BIFFFODEX : un spoiler Zenvo TSR-S de 2020.

    Dead Lover : soupe de doigts et mauvais goût

    Une fossoyeuse solitaire rencontre l’homme de sa vie. Elle pue, il aime ça, ils s’aiment, se ken, se projettent, veulent des enfants. Coup du sort, il est stérile et part au petit matin pour offrir son corps et surtout ses testicules à la science « Make ses Testicules pleines Again ».

    Sur le trajet de retour pour revoir sa bien-aimée nauséabonde, son annulaire gauche est sectionné. Ce dernier sera ramené à sa fossoyeuse amoureuse qui tentera de faire repousser un corps à partir du dernier bout existant de son amant. Une histoire de mort, d’amour et de doigt long comme…

    « Glowicki wanted the film to be similar to « DIY, low-budget experimental theater. »

    Oui, démarrer une critique avec une citation d’une citation tirée du wikipédia du film, c’est qu’on a atteint le fond de l’atterrement. Décortiquons la citation. DIY ou encore Do It yourself ou pour les non-anglophones « fais le toi-même toi, saltimbanque sans le sou ». Ensuite low budget, le corollaire direct du DIY, un petit budget, mais beaucoup de passion. Et pour finir experimental theater qui peut selon les personnes se traduire par « théâtre/spectale avant-gardiste » ou par « immense bouse sans substance qui va venir te justifier sa légitimité dans le monde de l’art en te parlant de disruptivité de mes fesses sur la commode ». Dead Lover se situe juste au milieu. Le milieu c’est pas bon, c’est pas bien, c’est ok. C’est là, ça existe et c’est tout. L’éclairage était plus que bien par contre.

    Trigger warning (non pas du tout, depuis quand on fait des trigger warning au BIFFF?!) ; si vous aimez les lézards, sachez que dans Dead Lover, ils seront maltraités sans vergogne voire même enfilés comme des perles sur un doigt. Entre graphisme érotique et maltraitance animale, choisissez votre lecture. E.K.

    Animal trouvé pour le BIFFFODEX : un lézard-sextoy

    The Surfer, Nicolas Cage contre les Beach Boys !

    Gavés de mauvaises intentions (et de bières), nous voici partis pour la soirée du vendredi qui débute en Ciné 1 avec un Nicolas Cage très attendu pour The Surfer, film australien qui parle de… surf. Mais avant cela, en zakouski, il était temps de faire d’un Christophe Lambert bancal (à cause d’une mauvaise chute) un Chevalier de l’Ordre du Corbeau. Deux coups d’épée sur les épaules plus tard, le voici anobli pour services rendus à la nanardise, alors que c’était clairement l’occasion d’enfin décapiter ce sataniste de Connor MacLeod ! Qu’à cela ne tienne, on le reverra vers minuit pour The Creeps, un film finlandais mettant en scène Christophe Lambert himself et Marc Coucke jeune.

    Revenons donc à notre Nicolas Cage. The Surfer, c’est l’histoire d’un mec souhaitant acheter une maison luxueuse en bord de plage, plage sur laquelle il a grandi, surfé ses premières vagues et planté des couteaux-coquillages dans les méduses échouées (toi aussi, t’as fait ça ?). Sauf que la plage est la chasse gardée des Bay Boys, un groupe sectaire de masculinistes bronzés à l’huile de vidange dont le gourou n’est autre que Scally, interprété par Julian McMahon. Un homme qui fait régner la terreur comme Georges-Louis Bouchez dans les rues de Knokke.

    Cage, lui, joue ici une version alternate reality de lui-même : banqueroute immobilière et regard de poisson rouge en fin de course. Il joue clairement sa propre vie : un homme en guerre contre ses dettes, ses fantômes et les pensions alimentaires qui le poursuivent jusque dans ses films. Il suinte la détresse comme mamy l’an dernier, malencontreusement oubliée dans la voiture en plein mois d’août.

    Mais passé cela, Il ne se passe rien. Ou plutôt, il se passe trop rien ! Une surf music et un garage rock peu entrainants, des très gros plans mal cadrés comme dans un porno, une couleur jaunâtre d’un film tourné à travers une bouteille d’Iced Tea et un scénario qui passe à côté d’un propos bien plus grand et espéré, celui de la folie et de la perte de la raison. Vivement qu’on se tranche les veines devant son western The Gunslingers, déjà un flop aux States ! M.M.

    Animal attrapé pour le BIFFFODEX : Un rat mi-repas mi-arme, des kookaburras, un serpent, un porc-épic et une molaire de requin (je ne suis ni dentiste, ni zoophile, alors laisse-moi).

    Courts mais trash, ad nauseam

    Après s’être farci du Nicolas Cage mi-sans abri mi-Alerte à Malibu, je pensais avoir vu le pire. Ou au moins, le pire de ma soirée (on est au BIFFF quand même). Bref, je sortais de ma séance bien lobotomisée, mais surtout bien naïve. Parce que sur l’échelle de la mort cérébrale, même cette daube océanico-testostéroïdé de The Surfer ne rivalise pas avec la sélection Courts mais trash. Pour ceux qui ne connaissent pas le concept, c’est facile. Cette séance, directement importée du festival éponyme, est un condensé low-budget et courts de ce que l’enfer de l’imagination humaine possède de plus random et de plus dégueulasse. Et si dans cette description, il y a une donnée à ne pas sous-estimer, c’est la contrainte du faible coût qui, comme vous le savez déjà, chers festivaliers masochistes, entraîne des choix de productions parfois pour les moins douteux.

    En l’occurrence, c’est le cas de The Rainbow Bridge qui a troqué son personnage canin contre une peluche qui avait littéralement l’air d’avoir connu la guerre. Choix osé quand on sait que, si j’ai bien tout compris (et rien n’est moins sûr), le film raconte la déification d’un chien exemplaire pour la relation fusionnelle qu’il entretenait avec son humaine de son vivant. Et encore, là, on vous raconte la partie sensée. Parce qu’après la maîtresse du clébard, elle se retrouve dans une sorte de paradis cotonneux à taper causette avec Pollux. Normal ! Courts mais Trash c’est aussi pour certains l’occasion de donner vie à leur ongle incarné dans un film qui dure approximativement 30 secondes, titre et générique inclus. Et petite remarque au réalisateur qui a essayé de nous la faire à l’envers, ce que le type a sur son pied, c’est pas de l’ongle incarné ! C’est carrément une mycose de stade 5 sur l’échelle de Glasgow. Non mais, faut pas prendre des lanternes pour des doigts de pied. Ou prendre des canines pour des vulves. Enfin ça, apparemment, on peut. On l’a vu dans Toothache ; que deux weirdos tout droit sortis de Salad Fingers peuvent se refaire une dentition à partir d’organes génitaux. Bref Courts mais Trash, c’est comme le coiffeur d’Olivier, ça n’a pas de limites. Association coït-pizza bolognaise. Sexe baveux en forme de pince qui vomit une armée de bébés aliens dans une sorte de gelée verdâtre type pudding à l’anglaise. Et évidemment, la chanson d’un gamin de 8 ans habillé en cosmonaute et accompagné d’une merde à taille humaine. C.Q.

    Animal attrapé pour le BIFFFODEX : Un parasite fongique.

    Escape from the 21st Century : Baignade toxique et voyage dans le temps

    En préambule, j’aimerai quand même aborder le fonctionnement de ce festival qui tente plusieurs dizaines de quidams à regarder un maximum de films : accréditations diverses ou abonnements au prix attractif, il y a beaucoup de monde qui enchaîne les péloches frénétiquement et qui ne peuvent pas connaître le plaisir de ce qu’il y a à côté ! C’est à peine si je me souviens d’avoir vu une animation d’avant film, je ne croise jamais les gens que je connais hormis 5 minutes avec une bière et une clope sur la terrasse du Palais 10, et même avec les gens avec qui je regarde un film, en quoi nos relations sociales s’en trouvent renforcées ? Vous me direz, au BIFFF, les convenances sont parfois proscrites, mais je vous répondrai que c’est le cas tant qu’on réagit au film projeté. Si vous racontez votre vie sexuelle avec votre meilleure pote ou alors les cancans du bureau, il y a beaucoup de chance qu’on vous demande poliment (TA GUEUUUULE) de la fermer. Donc, quel que soit votre statut et votre envie gourmande de cinéma, il ne faut pas oublier de privilégier aussi, à l’heure où les IA nous domineront bientôt tel Skynet dans Terminator, les rapports humains. Parfois, oubliez la séance suivante, buvez un verre, posez-vous pour discuter, partager un paquet de frites de patate douce ou même faites du sport dans les toilettes. L’humanité en sortira grandie et vous découvrirez que le BIFFF, c’est aussi plein de choses : une chouette terrasse, une chill zone, des tatouages, des flippers, des gens qui peignent, des animations originales, des stands pour geeks, des bénévoles très chouette, une care team efficace (dédicace à ma cousine qui me permettra de voir si elle lit mes articles), des ateliers littéraires, un bal, etc. Bravo à vous si vous avez lu l’entièreté de cet article qui ne raconte finalement pas grand-chose sur le film. Mais autant être honnête avec vous, ce film nous ne l’avons pas vu et je me suis attelé à la tâche afin de ne pas avoir un trou dans nos pages. Vous ne nous en voulez pas ? L.S.

    Animal attrapé pour le BIFFFODEX : un être humain, un animal sociable et intelligent, il paraît.

    Creeps : Creepstophe Lambert vs Olaf sous LSD

    Autant vous le dire tout de suite, c’est chauffé à blanc et légèrement alcoolisée (légèrement mon cul) que l’équipe du Suricate se dirigeait vers le Ciné 2 pour revoir Christophe Lambert chanter une chanson et puis déglinguer des versions gremlins d’Olaf de la Reine des Neiges. Et comme au Suricate on vous dit toujours la vérité, on va être honnête jusqu’au bout. Désolé Christophe mais dans Creeps on est plus proche de Leprauchaun que des Gremlins. Alors oui, pour une séance de minuit c’est marrant de voir des bonhommes de neiges avec une animation digne de Foodfight se faire défoncer à coup de tronçonneuse ou Christophe Lambert nous sortir quelques punchlines avant de faire un combat à l’épée contre un méchant. Mais ça ne tient pas tout le film.  Tel Elodie durant la Night, ça s’essouffle à un moment et ça s’endort plus vite qu’on ne le pense. Alors Cri-Cri, tu permets que je t’appelle Cri-Cri ? Merci. Cri-Cri, par respect pour ton immense carrière et pour Highlander, je n’irai pas plus loin dans la critique. Je ne mentionnerai pas les incohérences scénaristiques comme les héros qui appellent les monstres des Creeps sans jamais avoir été mis au courant de leur nom. Je ne dirai rien sur la scène du bar à la longueur désespérante qui plombe la suite du film. Je passerai l’éponge sur les refs poussives qu’on nous balance comme autant de fan services jusqu’à l’indigestion. Je resterai aveugle devant l’avalanche de moments vides et le scénario écrit sur un post-it. Parce qu’au Suricate, on est respectueux. Et dans respectueux, il y a respect et eux.

    Alors oui, ce Creeps a un excellent avenir devant lui comme nanar culte mais 10 minutes de plus et j’appelais la Care Team du BIFFF.

    Animal attrapé pour le BIFFFODEX : la virginité d’un geek finlandais.

    Olivier Eggermont
    Olivier Eggermont
    Journaliste du Suricate Magazine

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