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    [BIFFF 2025 Jour 13] : Trois films d’hier, en retard et une clôture en musique

    Le BIFFF, c’est fini. Olivier nous a déjà dit adieu hier et il est déjà parti noyer son chagrin, toujours dans l’alcool, mais ailleurs. Matthieu s’en retourne à son rôle admirable de parent parfait. Elodie retourne consciencieusement à ses cours. Christian et Cheyenne ont déjà eu le temps de sen remettre. Et moi je n’arrive pas à encore faire le deuil car je suis encore en train d’écrire sur le film de clôture tout en subissant ma gueule de bois. Profitez une dernière fois de nos dernières chroniques. On vous servira, ensuite, sur un plateau des tas de bonus : BIFFFodex, Tops et Flops, interviews, etc. En attendant, voici trois chroniques de l’avant-dernier jour qui n’avaient pas encore été publiées et the last but not least, le film de clôture de ce festival ! Et comme disait l’autre : « c’est la fin, c’était fin, ça se mangeait sans fin mais à 13 jetons ».

    The Umbrella Fairy de Jie Shen : Un feebreze sur les odeurs de bêtes du BIFFF

    Dans la Chine ancienne, les objets ont une âme ou plus précisément abritent des fées. Elles sont les petites mains protectrices et maternelles pour leus maîtres. Et comme toutes les petites mains, une fois l’objet devenu inutiles, on le parque dans une maison de retraite pour objets, la salle des Reliques.

    Qindgai, la fée du Parapluie Impérial et Wanggui, la fée de la Lame de jade noir s’y trouvent désormais, leur maîtresse, la princesse Jinghze décidant de renoncer à son statut royal et ne pouvant donc plus posséder ces objets. Avant de partir, la princesse à sommer Qingdai de protéger Wanggui. Cette dernière s’échappe et se lance dans une quête de vengeance.

    Wouuuuuuh. Les images d’animations sont d’une splendeur. C’est un bain de beauté pour les yeux. Vous les trempez dedans et ils ressortent brillants et heureux (même riche, parce que la beauté attire la fortune, il paraît.). Si cela avait été légal, j’aurais pris en photo le film, j’en aurai fait des tirages puis je les aurais revendus. Pour soutenir cette beauté, une très touchante histoire sur notre rapport aux objets, leurs histoires, ce qu’ils disent de nous et comment parfois nous les oublions et les abîmons.

    Connaissez-vous le kintsugi ? Qui se traduit littéralement par « jointure en or » est l’art japonais de réparer les objets avec de l’or. Le processus est minutieux pour un résultat splendide. The Umbrella Fairy c’est un peu le kintsugi incarné sur grand écran. Une réparation d’objet et d’âme en douceur et minutie. E.K.

    Animal attrapé pour le BIFFFODEX : un pépé fée-tortue qui fait des prédictions et qui y perd du temps de vie. Ça, c’est de la dévotion au travail.

    Else de Thibault Emin : amour, tube digestif et confinement.

    Anx est un hypocondriaque professionnel, c’est comme un survivaliste les virus en plus. Presque tout le temps cloîtré chez lui, lors d’une excursion en milieu festif, il croise Cass, une extravertie fantasque professionnelle. Alors qu’un couvre-feu est en cours, Cass se fait prendre par une milice devant l’appartement d’Anx, contraint, il accepte de valider son mensonge et de vivre avec elle alors que l’épidémie qui fait fondre les personnes dans le décor prend de l’ampleur. D’abord l’occasion pour Anx et Cass d’explorer toutes les joies de la vie de couple, l’horreur va s’inviter et faire basculer leur vie.

    Je dis oui, mille fois oui pour Else. Une réussite visuelle qui nous accueille dans un appartement coloré et chaud pour nous tirer au fur et à mesure dans un monde gris, glauque et gluant avant de nous larguer dans un extérieur jaune cendré. Une narration par les couleurs excellente. Anx et Cass fonctionnent aussi très bien ensemble, l’alchimie est là, on croit en leur romance, on croit en leur déchirement et le final du film n’en ai que plus bouleversant et poignant. Else, qui aurait pu juste nous faire revivre nos pires souvenirs du confinement, nous raconte bien plus. Un body horror qui exhale la sensualité et le malaise. Else ne se raconte pas, il se sent et il se vit. Il y a des films comme ça qu’on choisit parce que personne ne veut le voir, on se dit qu’au pire, on rira puis on ne rit pas et on finit par fusionner avec son siège. E.K.

    Animal attrapé pour le BIFFFODEX : une fusion chien-planche tout à fait inédite et flippante.

    The Thing with feathers de Dylan Southern : Croa Croa, c’est le deuil qui toque à la porte

    Écrire sur un film qu’on a détesté, c’est aisé. Écrire sur un film moyen, c’est compliqué, mais on peut se démerder. Écrire sur un film qu’on a adoré, l’air de rien, c’est ça le plus difficile. Qu’écrire quand on a mis notre sens de l’analyse sur off et qu’on a absorbé le film ? The Thing with the feathers est un magnifique film sur le deuil. Un graphiste vient de perdre sa femme de manière soudaine et inattendue, le voilà veuf avec deux enfants et un deuil à gérer. Il n’y parvient pas, la perte est grande autant dans son cœur que dans le quotidien pour lequel sa femme avait plus de skills. Il n’essaye même pas et se laisse sombrer, ce qui fait rentrer dans leur maison une étrange créature avec des plumes qui est déterminée à malmener le veuf anglais.

    En 4/3, nous sommes constamment avec cette famille, jamais plus loin qu’un souffle. Le cadrage nous enferme non pas pour nous rendre claustrophobes, bien plus pour nous tenir au plus près du drame qu’ils vivent. Les plans sont précisément tournés et rythmés, il n’y a rien qu’on voudrait retirer.

    The Thing with the feathers est violent visuellement et émotionnellement, la créature à plumes est acide, méchante, humiliante, aussi tendre et rassurante, ce qui en fait une réussite absolue. Benedict Cumberbatch et les enfants sont dans la justesse de jeu à chaque instant. Définitivement un bijou, une gemme qu’on se prend dans l’œil et qui nous fait pleurer. E.K.

    Animal attrapé pour le BIFFFODEX : une poussière dans l’œil et une plume dans le cœur

    Opus : qui ouvre une huître au couteau, ouvre un corps au couteau

    Opus, c’est un film qui tourne autour de John Malkovich en vedette mythique de la chanson qui revient après 30 années pour présenter son nouveau disque à une poignée d’élus. Ils les invitent dans son ranch perdu au milieu de l’Utah où il vit au milieu d’illuminés en bleu qui portent des colliers avec des perles. Si la majorité des invités semblent légitimes, Ariel, jeune journaliste qui rêve de gloire, est plutôt surprise d’être aussi de la partie. Contrairement aux autres qui semblent goûter à la fête, aveuglés par le vedettariat de leur hôte, elle compte bien faire son boulot de journaliste (quels sont les principes des novellistes ? pourquoi ouvrent-ils des huîtres par centaines ? quel est la place du chanteur dans cet organigramme ?) et écrire l’article qui changera sa vie. Si la star du film, c’est bien entendu John Malkovich en Elvis Branson habillés de tenues extravagantes et qui interprète lui-même les chansons de son personnage (voir le titre Spotify ci-dessus), c’est surtout Ayo Edebiri qui crève l’écran. Après avoir rejoint la cuisine ultra-stressante de The Bear, elle montre à nouveau son calme olympien au milieu de la tourmente dans un autre film angoissant. Si on peut parfois douter de la qualité de certains moments du film (sont-ils volontairement bizarres ou sont-ils ratés ?), on ne regrette pas notre séance et le twist final explique finalement beaucoup de choses qui nous semblaient incohérentes. Mais pour beaucoup, le meilleur moment restera les bières gratuites qui sont servies dès la sortie de la salle. Et j’ai finalement goûté La Cornet à 5 jetons. Eh ben, j’ai bien fait de boire l’Estaminet à 3 jetons.

    Animal attrapé pour le BIFFFODEX : des huîtres pour un rituel de recherche de perles

    Elodie Kempenaer et Loïc Smars

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