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    [BIFFF 2022] Timo Vuorensola : « Réaliser Jeespers Creepers, une renaissance »

    Les années se suivent au BIFFF avec une certitude presque absolue: celle de croiser Timo Vuorensola au festival. Le réalisateur finlandais à qui l’ont doit notamment Iron Sky 1 et 2 est un habitué et ne cache pas son amour pour le BIFFF. C’est donc naturellement que Le Suricate a profité de sa venue pour évoquer notamment son prochain bébé, un certain Jeespers Creepers: Reborn.


    Olivier Eggermont : Bonjour Timo Vuorensola, on vous voit au BIFFF tous les ans ! Vous devenez un régulier. C’est votre quantième passage ici ?

    Timo Vuorensola : Je pense que c’est mon cinquième passage au festival ! En effet je deviens un habitué. La première fois que je suis venu c’était il y a dix ans, c’était dans un cadre complètement différent, c’était avant Bozar, à Tour&Taxis. Puis j’ai vécu la période à Bozar et maintenant ici. J’ai vu l’évolution du festival et comment il est devenu de plus en plus investi dans des films de qualité. C’est une excellente direction pour moi et cette année je trouve que la qualité des films est très haute. Il y a moins de films mais la qualité est très grande. Tous les films que j’ai vus pour le moment étaient impressionnants.

    O.E.: Quels films avez-vous vu qui vous ont impressionné ?

    T.V. : J’ai vraiment adoré La Pieta. C’était vraiment incroyable. Il me laisse encore songeur.

    O.E.: La qualité des films est aussi peut-être due à la quantité plus grande de films d’horreurs dans l’industrie. Le genre est de plus en plus tendance.

    T.V. : C’est vrai j’ai le sentiment aussi qu’on fait de plus en plus de films d’horreur en ce moment. Il y a aussi plus de variété dans les films. On voit même des films d’auteur dans le cinéma d’horreur. Beaucoup d’excellents films d’horreur de ces 5 ou 6 dernières années ont été dirigés par des réalisateurs passionnés d’art et c’est une direction très intéressante. Ça apporte plus de profondeur et d’expressions à l’horreur.

    O.E.: Comment expliquez-vous le retour de cette tendance aux  films d’horreur ?

    T.V.: Je pense vraiment que pendant un temps, on a essayé de marier des films d’horreur et des films d’action. Ce qui n’était pas la bonne direction pour moi. Les films d’horreur dans les années 70 et 80 étaient très intéressants et je pense qu’au début des années 2000, il y a eu plus de budget et une direction prise qui était plus ennuyeuse. À présent, des films comme Midsommar ou Get Out de Jordan Peele montrent qu’on peut créer des histoires très intelligentes et intéressantes quand on met des réalisateurs amateurs d’art pour faire des films d’horreur. Nous avions quelque peu perdu cela. On n’a pas besoin de dépenser des centaines de millions pour faire des films d’horreur et faire en sorte qu’ils fonctionnent.

    O.E.: C’est aussi un des derniers genres où on a l’impression que tout est permis. Où il n’y a pas de censure ou presque.

    T.V.: Oui tout à fait. Mais dans les pays occidentaux cette notion de censure est encore différente que dans d’autres parties du globe. La censure en Chine par exemple est toujours très vivace alors qu’ici, on peut en effet presque faire ce qu’on veut dans des films d’horreur.

    O.E.: Par exemple montrer Hitler qui monte un T-Rex dans un film.

    T.V.: Par exemple (sourire).

    O.E.: La dernière fois que vous étiez ici, c’était pour Iron Sky 2. Qu’avez-vous pensé de son accueil par le public du BIFFF ?

    T.V.: Ce festival a toujours été parfait pour ce genre de film. Et ça tombe bien car c’est mon genre de film (rires). Le public est juste incroyable et c’est pour ce public que je fais mes films. Pour ces gens en particulier. Les plus grandes audiences, c’est bien mais c’est ce public que j’ai toujours essayé d’atteindre. Un public dans lequel je me retrouve aussi quand je regarde des films.

    O.E.: Pour votre prochain film vous vous attaquez à un énorme challenge avec le personnage de Jeepers Creepers. Comment cela s’est-il mis en place ?

    T.V.: Je parlais de Iron Sky avec le producteur de Jeepers Creepers, Jake Seals, nous discutions à un festival du film à Berlin juste avant le Covid. Il me disait qu’il avait un script pour un nouveau film d’horreur qu’il voulait me faire lire. Il m’a ensuite envoyé le script et j’ai vu Jeepers Creepers Reborn et je me suis dit « Oh mon dieu t’es sérieux !? ». Et ensuite, le Covid. Et là je me suis dit, c’est foutu. Le monde entier était fermé, on ne pouvait aller nulle part, on ne pouvait pas amener les acteurs sur le tournage. Mais au final, on s’est dit qu’on avait une ouverture pour le faire maintenant et que si on ne le faisait pas maintenant, on pouvait dire adieu à tout le projet. Mais pour ce faire, nous devions être très précautionneux et faire attention à tous les détails sanitaires et jouer selon les règles. Tout était cinq fois plus compliqué que d’habitude et cinq fois plus cher à cause du Covid. Juste aller de Finlande aux Etats-Unis, c’était déjà dingue. Tous les vols pour les USA étaient bannis de partout en Europe. Mais le problème c’est que nous devions tourner le film aux États-Unis. La seule solution que nous avons trouvée a été d’aller à Dubaï, d’y rester deux semaines car c’était obligatoire pour les États-Unis, et ensuite aller aux États-Unis. Au final, ça nous a laissé le temps de bien travailler le script et le tout sous 45°, 50°.

    O.E.: Et comment avez-vous mixé votre univers assez dingue et déjanté avec celui de Jeepers Creepers qui est plus formel et codifié ?

    T.V.: J’ai démarré d’une perspective différente. Cette fois, je ne voulais pas faire un film Iron Sky. Je voulais faire quelque chose d’unique. Pour moi, c’était une sorte de renaissance et tout dans le fim porte la marque de la renaissance. La renaissance du Creepers mais aussi de toute la franchise et du film d’horreur avec créature. Quand tu arrives dans une franchise énorme comme celle du Creepers, c’est très dur de ne pas prendre en considération les trois films précédents, toute la fanbase, l’histoire autour des films et l’univers autour de ceux-ci. Donc j’en ai fait une partie importante du film. C’est un film qui est conscient de son propre univers. Ce n’est pas comme quand on regarde un film de zombie et que les gens regardez les zombies et que les gens se demandent « Oh mon dieu, quelles sont ces créatures ? Il n’y a aucun nom pour ces monstres ! Ce sont comme des infectés. » NON ! Ce sont des zombies ! Et dans le monde de mon film, les gens connaissent la légende du Creepers. Il y a des films dessus, des histoires à son propos. C’était assez drôle de créer cette partie du film.

    O.E.: Et de votre côté, quel était le premier film d’horreur qui vous a frappé et vous a donné envie de faire des films d’horreur ?

    T.V.: Je pense que le premier a dû être un des Jason. Le 2 ou le 3. Je ne me souviens pas trop. Celui où ils sont sur un bateau. C’était la chose la plus horrible que j’avais vue comme enfant. Je ne sais pas si ça m’a donné directement l’envie de faire des films d’horreur mais c’est là que j’ai réalisé le pouvoir de l’horreur dans un film. Mon ami vivait dans une grande maison et ses deux oncles vivaient avec lui. Tout le monde vivait ensemble (rires). Et un des ses oncles avait une cache avec des films d’horreur sur des VHS et nous n’étions pas du tout autorisés à les toucher. Il avait tous les films avec Christopher Lee et il regardait certaines scènes et nous devions savoir quelle scène il regardait, ainsi nous pouvions regarder le film puis le rembobiner jusqu’à la scène qu’il regardait. Ce sont ces films qui m’ont amené dans le cinéma d’horreur.

    O.E.: Dernière question, celle que tout le BIFFF se pose, pouvons-nous espérer un Iron Sky 3 ?

    T.V.: Disons que quelque chose qui s’inspirera énormément d’Iron Sky oui c’est possible. Mais de mon point de vue, le chapitre Iron Sky est clôturé. Mais il y a un autre chapitre que j’aimerais ouvrir qui est intimement relié à Iron Sky.

    Olivier Eggermont
    Olivier Eggermont
    Journaliste du Suricate Magazine

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