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    BIFFF 2014 : Interview de Benoît Delépine qui scénarise Ablations

    Interview de Benoît Delépine pour le film Ablations dont il a écrit le scénario. Entretien pendant un BIFFF arrosé !

    Est-ce que vous vous êtes remis de vos bières d’hier ?

    Ben non ça va, je trouve qu’elles sont fortes mais elles attaquent pas trop le cerveau, j’ai pas du tout mal à la tête. La Bush était très bonne.

    Oui, c’est l’arme avec laquelle ils attaquent les invités.

    C’est une belle stratégie. J’ai chanté, j’ai couru, enfin des choses que je ne fais habituellement jamais.

    Question rituelle, est-ce que vous pouvez me dire un film d’amour et un film d’horreur que vous aimez ?

    Le Lars von Trier, Melancholia, je trouve que c’est un beau film d’amour.
    Et un film d’horreur… Le Jour et la nuit de Bernard-Henri Lévy (rires).

    Est-ce que vous êtes très cinéma de genre ou pas du tout ?

    Pas trop. Enfin si, ça m’arrive d’aller voir un bon film d’horreur de temps en temps, mais je suis pas compulsif. Donc c’est pour cela que j’avais carrément les jetons, parce que je suis venu aux projections d’avant-hier, et j’ai vu un film qui était pas si mal. C’était Occulus, et c’était quand même la grosse ambiance, parce que les fans de films d’horreur c’est carrément un stade de foot. Et a ce moment là, je me suis dit que le lendemain on se ferait lyncher. Ça ma fait rire en même temps, mais j’étais content de pas être le réalisateur.

    Et donc vous êtes resté dans la salle pour Ablations ?

    J’ai regardé tout le film, mais je me suis dit que si ça tournait au lynchage je m’en irais parce que je suis pas si costaud que ça finalement, psychologiquement. Mais comme ça s’est bien passé et que les gens paraissaient captifs, je suis resté. Mais j’avais pas mal d’appréhensions.

    C’est la première fois que vous confiez votre scénario à quelqu’un d’autre ?

    Il y avait eu Michael Kael contre la World News Company réalisé par Christophe Smith, et celui-ci dans un autre genre, réalisé par Arnold de Parscau. En fait j’aime bien les polars, j’en lis beaucoup donc j’avais envie d’écrire une histoire comme ça, totalement différente. Pour aussi faire des choses à côté de ce qu’on fait avec Gustave. Par exemple lui, il est acteur sur un film avec Deneuve, et je trouve ça super. Moi je préfère écrire. Lui c’est un bon comédien, donc il peut se le permettre, moi je suis pas un bon comédien, mais j’aime bien écrire dans ma campagne.

    Gustave va plus vers la comédie alors que vous partez plus dans le sombre.

    J’aime bien le noir, j’ai même réalisé un petit court-métrage qui s’appelle Comme un chien et que était passé au festival du court métrage de Bruxelles. C’était l’histoire d’un mec qui a un téléphone portable dans les dents et qui filme les gens qui tue, enfin un truc vraiment très étrange et on se rend compte à la fin, pourquoi il fait ça. Ce côté là me plait. Tout ce que j’avais fait en bande-dessinée était plutôt noir par exemple, pas comique, de la SF noire. C’est quelque chose qui me plait beaucoup.

    Quand on voit votre film Avida par exemple, on se dit que vous preniez des drogues différentes à l’époque, non ?

    Rires. Oui je l’ai revu la semaine dernière à Lille et je me suis dit « putain la vache on était quand même bien secoué là ».

    Hors plaisanteries, c’est un film génial, mais c’est quand même très particulier. Et c’est vrai que ces dernières années vos films sont quand même plus grand public en quelques sorte.

    Oui, mais le problème d’Avida c’est qu’on a beaucoup aimé le faire et le sortir, mais les gens ne sont pas venus du tout. Du coup on s’est dit « on va plus pouvoir faire de films de notre vie », il faudrait qu’on fasse un truc un peu plus accessible.

    Et donc ensuite on a fait Louise-Michel. Mais c’est vrai que des fois on se retrouvait tout seul dans un cinéma, on venait défendre notre film à chaque séance. Des fois on se retrouvait avec une fille qui avait payé et qui avait traversé Paris pour voir le film et qui était folle de rage et puis un clochard qui était venu là pour dormir, qui avait vu le film par hasard et qui avait adoré le film. Ils s’engueulaient tous les deux dans la salle. C’était à pisser de rire.

    Comment s’est passé le choix du réalisateur pour votre scénario d’Ablations.

    Je me suis dit, à mon âge je vais filer sa chance à un jeune, et donc j’ai tapé sur Google « jeune réalisateur » et je voulais qu’il y ai un côté soit Polanski ou Lynch, enfin un côté un peu malsain. Donc j’ai tapé « jeune réalisateur fan de Lynch » et coup de chance, pour moi comme pour lui, arrive la fiche d’Arnold. Il avait été choisi par Lynch un mois avant pour faire le clip officiel de son disque et il sortait à peine de l’école. Ce clip il faut aller le voir d’ailleurs parce qu’il est magique (David Lynch ‘Good Day Today’).

    J’étais sur le cul avec ce clip. C’est extraordinaire parce que tu vois qu’il sait déjà diriger les acteurs. C’était vraiment bien et il y avait une véritable atmosphère. Je l’ai appelé grâce aux pages jaunes (rires). Il n’y avait qu’un seul Arnold de Parscau en France donc ça c’était déjà pas mal. Je l’ai eu au téléphone, il connaissait le boulot que j’avais fait et puis on s’est vu à Paris.

    Choisir quelqu’un qui fais son premier film c’est une prise de risque.

    Oui, c’est une prise de risque, mais franchement je suis épaté. Je ne suis allé que deux fois sur le tournage, au début et à la fin. Vraiment, on peut dire que c’est lui qui l’a réalisé de A à Z.

    Le scénario existait mais il a rajouté pleins d’idées visuelles, etc.

    Vous faites des films, vous écrivez pour l’émission Groland sur Canal+. Dans quels média pensez-vous avoir la plus grande liberté d’écriture ?

    La liberté ce n’est pas obligatoirement dans les mots, dans ce qu’on a envie de dire, de ne pas dire etc. C’est vrai qu’à Groland on est quand même relativement libre. Ça peut leur arriver de nous faire chier mais c’est parce qu’il y a des gens qui portent plainte facilement. Parfois le service juridique nous dit « non ça vous pouvez pas le dire sinon on a un procès ».

    Par exemple, quand on commence à parler du Front national comme de nazis et qu’elle (Marine Le Pen) n’arrête pas de porter plainte et de gagner en ce moment, ils nous ont demandé de nous calmer. Il y a quinze jours ils nous ont demandé d’enlever un truc, mais cela nous a fait chier alors on l’a remis la semaine d’après sans qu’ils le sachent. On a fait une fausse vanne pour qu’ils ne voient rien pendant la répétition et en direct on a balancé la vanne qu’on voulait faire. Ils s’en sont rendu compte à la diffusion mais il n’y a pas eu de procès, donc on leur a dit « ça servait à rien de nous faire chier ». On peut dire à part ça, qu’ils nous laissent quand même la paix.

    Après la liberté c’est autre chose. C’est quand on réalise avec Gus (Gustave Kervern) que l’on se sent vraiment libre, dans le sens où on invente. La liberté c’est ne pas savoir exactement ce que tu veux, puis trouver des idées différentes à ce moment là. Enfin c’est ça que j’appelle liberté.

    Dernièrement on a fait un long métrage. On était huit en tout avec l’acteur principal et on a tourné pendant 9 jours en toute liberté. Ça s’appelle NDE, Near Death Experience et ça sortira probablement en septembre, avec un seul acteur principal, Michel Houellebecq.

    Cliquez ici pour l’article sur Ablations

    Baptiste Rol
    Baptiste Rol
    Journaliste du Suricate Magazine

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