Ecrit et mis en scène par Éric Bu, avec Sophie Forte, Christine Gagnepain et Stéphane Giletta. Au Théâtre Essaïon à 16h50 du 7 au 30 juillet (relâches les 11, 18 et 25 juillet).
Françoise Dolto, célèbre pédiatre et psychanalyste française, est un des plus grands noms dans le domaine de l’enfance. Connue pour son attention aux tout petits à qui elle attribua des pensées que son époque, le début du 20ème siècle, ne reconnaissaient pas, elle est également célèbre pour son esprit ouvert qu’elle exprime avec force nuances et qui lui valu de nombreuses critiques sur divers sujets, ses paroles étant souvent sorties de leur contexte. Françoise Dolto est une femme pleine de nuances et en avance sur son époque, est-il possible alors de faire de sa vie une pièce de théâtre tout en conservant idées qui lui sont chères et ses multiples nuances ? C’est le défi que s’est lancé l’Atelier Théâtre Actuel.
Sur scène, nous sommes accueillis par un décor simple. Une chaise, un rocking-chair, et au fond de la scène, un large vestiaire comportant des parties mobiles et divers accessoires qui constituera à la fois une réserve pour l’aménagement du décor de certaines parties, et à la fois une zone hors du temps où les comédien disparaitrons lorsque leur présence ne sera pas requise, tout en restant à vue du spectateur. Tout dans la mise en scène, de ce décor aménageable au décor imaginaire que les comédiens nous tracerons dans les airs, en passant par les transitions fluides, tout est réfléchi pour happer l’attention du spectateur sans jamais rien lui cacher et le plonger ainsi dans la vie de ce personnage emblématique.
L’histoire qui nous est présentée est vivante. La jeune Françoise grandira sous nos yeux, interprétée par l’étonnante Sophie Forte qui n’aura plus à nos yeux d’autre âge que celui qu’elle incarnera. De sa voix à sa posture en passant par ses mouvements, son jeu est impressionnant de réalisme. Auprès d’elle, son BAG (Bon Ange Gardien) jouera à la fois le rôle de narrateur, celui du père, celui du fils, ainsi que divers autres personnages que Stéphane Giletta incarnera avec justesse et variété, nous offrant un merveilleux jeu d’acteur. Il en sera de même pour Christine Gagnepain qui n’est pas en reste en terme de justesse et de variété, s’adaptant avec brio au rôle de la mère de Françoise, à celui de sa fille, ainsi qu’à d’autres personnages. Dans ce méli mélo de personnages, rien n’est pourtant laissé au hasard et à aucun moment le spectateur ne sera laissé de côté, le texte lui permettant, par des passages de narration ou des précisions dans les dialogues, de comprendre à tout moment qui se tient devant lui. Les précisions relatives à la vie de Françoise Dolto révèlent une qualité de recherche en amont impressionnante et la présentation dans son entièreté d’une interview qui fit polémique lorsqu’elle fut prise hors contexte est une belle revanche à tous ses détracteurs. La qualité du texte est telle que nous sommes en droit de nous demander ce qui est romancé et ce qui est véridique au coeur de cette biographie détaillée. Mais puisque rien ne peut jamais être parfait, nous regrettons que le parcours de son fils, le célèbre artiste Carlos, ait été évoqué alors que le parcours de sa fille Catherine, médecin, haptothérapeute et écrivaine spécialisée dans les livres sur la santé des enfants, ait été laissé de côté.
La qualité de cette pièce est indéniable, tant par le jeu d’acteur admirable que par la rigueur du texte et la fluidité de la mise en scène. Et pour « parler vrai« , nous vous avouerons que cette performance des plus réaliste aura su nous faire rire mais aura également le mérite de nous avoir émus aux larmes. Nous ne vous en dirons pas plus sur le contenu de cette pièce, afin de donner raison à Françoise qui nous reprocherait sans doute de « parler de ce qu’on ignore » et de « refuser de parler de ce qu’on sait« . Nous vous inviterons plutôt à aller découvrir par vous mêmes cette splendide pièce d’Eric Bu.