Titre : Au petit bonheur la science
Autrice : Cecily de Villepoix
Edition : Casterman
Date de parution : 16 octobre 2024
Genre du livre : Roman graphique
Ponctuellement, la revue dessinée qui propose aux lecteurs des enquêtes illustrées, compile les sujets qu’elle a récemment traité pour en faire une bande dessinée. Cette fois, c’est au tour de la science, échantillonnée dans de précédents numéros du trimestriel, d’en avoir l’honneur.
Oscar Wilde disait : c’est le mérite de la science d’être exempte d’émotion. La science est rationnelle et concluante. Elle nous paraît irréfutable. Elle s’oppose avec dédain à ce qui appartient au domaine de la croyance. Pourtant, n’en déplaise au proverbe « Vaincre les ténèbres par la science », la science possède également sa part d’ombre. Les grandes découvertes sont parfois le fruit de circonstances hasardeuses. Et ce sont, justement, ces progrès qui ne tiennent parfois à rien, si ce n’est à l’obstination de leur inventeur, qui sont vulgarisés dans cet album au titre évocateur.
Toutes ces expérimentations n’ont pas eu le même impact sur l’Histoire. Il y a les heureux hasards, mais aussi les inconséquents de la science. Les bons élèves et les cancres, en sommes, ont chacun droit à un chapitre. Mais souvent, même entre les deux, la limite est fine. Allez dire aux radiums girls que la découverte de la radioactivité est un coup de chance qui a permis de faire progresser les hommes dans le domaine de la médecine. Ou encore aux esclaves qui ont servi de cobayes au docteur James Marion Sims que l’exploitation de leur corps a permis de donner un premier souffle à la gynécologie moderne, même s’il préconisait encore parfois de pratiquer la clitoredectomie pour soigner l’hystérie féminine. Les prémices de nos plus belles avancées sont balbutiantes. Ambivalentes.
Et puis derrière la science ne se cache pas que des erreurs ou des coups de chance. Il y a surtout une série d’anonymes, sans qui rien n’aurait jamais été possible mais dont la postérité ne se souvient pas du nom. Comme le scénariste d’un film à succès, Edward Jenner a pavé le chemin de la vaccination. Pourtant, le seul qui en ait récolté les honneurs, c’est Pasteur. Il en va de même pour Margaret Crane dont l’utérus a été, comme pour beaucoup, un frein à la reconnaissance.
Mais surtout, la science n’est pas toujours aussi objective qu’elle le voudrait. Certains domaines périphériques s’y accrochent, estompant les limites entre science, croyance et charlatanisme. L’homéopathie qui compte parmi le corps médical aussi bien des détracteurs que des défenseurs, en est un bon exemple. Dans Au petit bonheur la science, la raison est rendue anecdotique. On se moque gentiment de certains progrès. On s’offusque de leur histoire. Mais parfois Cecily de Villepoix manque son ambition première, celle de rendre intelligible un domaine qui peut se montrer opaque. Elle semble parfois oublier que si certaines informations sont limpides pour elle, c’est avant tout parce qu’elle a fait un travail de recherche conséquent en amont.