En amont du fleuve
de Marion Hänsel
Drame
Avec Olivier Gourmet, Sergi López
Sorti le 30 novembre 2016
Après avoir adapté à l’écran deux nouvelles d’Hubert Mingarelli (tirées d’Océan Pacifique) dans Noir Océan, la réalisatrice Marion Hänsel nous revient avec un long-métrage contemplatif, En amont du fleuve, réalisé de nouveau avec la collaboration de l’écrivain français.
Noir Océan était une chronique à bord d’un navire français sur fond de préoccupations nucléaires. Marion Hänsel y observait la vie de jeunes militaires livrés à eux-mêmes. Avec En amont du fleuve, la réalisatrice retente l’expérience du boat movie mais, cette fois-ci, elle se contente de mettre en scène la rencontre troublante entre deux demi-frères, embarqués sur un rafiot, qui vont apprendre à se connaitre et tenter d’en savoir plus sur leur passé familial.
Deux cinquantenaires, Joé (Olivier Gourmet) et Homer (Sergi Lopez) remontent un fleuve vers des chutes d’eau en Croatie. Ils se connaissent depuis peu. C’est le décès récent de leur père qui leur a permis d’apprendre qu’ils étaient demi-frères. On comprend très vite que pour Joé (qui n’a pas du tout connu son père) le voyage sera double : remonter à la fois le fleuve et la courbe de vie de son paternel.
Dans ce huis clos psychologique, la réalisatrice belge observe comment les personnages vont se confronter l’un à l’autre dans l’aridité des montagnes qui enlacent l’eau du fleuve. L’ennui c’est que l’histoire prend très vite l’eau car tout se déroule sur un rythme très lent, poussif. Les deux acteurs pourtant chevronnés, Olivier Gourmet et Sergi Lopez, peinent à donner chair à leur personnage taciturne et solitaire. La faute aux dialogues indigents et à la mise en scène qui n’arrive à aucun moment à travailler les creux de la narration. On veut bien admettre que les moments pesants et les silences (parfois) lourd de sens qui se succèdent sont destinés à servir le volet psychologique : l’absence (de regard) du père a provoqué des carences dans le développement de la personnalité des frères. Mais à force de surligner le manque de reconnaissance et d’estime de soi des personnages par des dialogues elliptiques et des non-dits, Marion Hänsel en a fait des êtres désincarnés, sans consistance, repliés sur eux-mêmes, dont les aventures tournent à vide.
Et ce n’est pas l’intrigue autour de la mort du père avec l’arrivée d’un personnage secondaire (John Lynch) qui apporte un peu d’épaisseur au récit. La vie impétueuse et trouble du père, légionnaire et engagé dans un conflit armé, l’a-t-elle menée au suicide ? Ou est-ce le fruit d’un meurtre ? Peu importe, la quête est ailleurs. Probablement dans l’amitié qui s’immisce délicatement dans la relation des deux frères ou dans les fêlures du passé et les blessures de l’enfance.
Soulignons tout de même que le film, à défaut de nous embarquer dans une histoire captivante vers des rivages inattendus, draine des images d’une grande beauté, dans une nature à couper le souffle, à rebours d’un tourisme sans saveur et attendu. C’est d’ailleurs ce qu’on retiendra principalement de ce voyage au fil de l’eau.