Ecriture, mise en scène et interprétation de Corentin Lobet et Dominique Rongvaux
Du 9 octobre au 25 octobre 2014 à 20h30 au Théâtre des Riches Claires
Focus sur la petite scène, pour l’occasion habillée de noir. Rien d’autres que des rideaux noirs et deux chaises, disposées au centre de la scène, face au public. Et cela suffit. L’obscurité, puis le commencement.
Corentin Lobet et Dominique Rongvaux, deux comédiens sur scène comme dans la vie réelle, répètent pour une audition. Pas besoin d’être expert et friand de Molière pour comprendre qu’ils auditionnent pour Le Misanthrope. On avait presque oublié l’effet qu’ont les déclinaisons des alexandrins en vieux français sur les planches.
Corentin auditionne pour le rôle d’Alceste, ce personnage passionné, romantique, amoureux et misanthrope, qui lui ressemble beaucoup. Dominique se projette plutôt dans le rôle de Philinte, un être cynique et supérieur, opportuniste en mal de flatterie, et par ailleurs, ami d’Alceste. Ces rôles, s’ils les obtiennent, devraient les sortir définitivement de l’ombre. La pression est énorme pour ces deux amis dévorés par leur passion pour le théâtre et leurs ambitions, mais cantonnés aux petits rôles, aux minuscules répliques et aux critiques cinglantes. Leurs carrières se joueront d’ici peu et, il n’est pas question pour Dominique de laisser quoique ce soit au hasard, quitte à y laisser son intégrité. Se joue alors une mise en abîme de la pièce que Molière avait écrit quelques siècles auparavant.
En à peu près une heure, à coups de proverbes, de déclamations et d’humour, les deux comédiens donnent à voir un couple peu banal d’amis, sans doute à l’origine de l’expression : « avec des amis comme toi, je n’ai pas besoin d’ennemis ».
Blessants, touchants, passionnés, ridicules, … les qualificatifs pour les caractériser se succèdent comme l’émotion sur scène. D’ailleurs c’est parfois difficile de garder le rythme. Car, quand il ne s’agit pas d’extraits de la pièce de théâtre classique, le texte s’enchaîne rapidement, dans un flot quasi continu de mots et d’émotions.
Corentin et Dominique passent ainsi en revue différents aspects des relations humaines et les difficultés liées au métier qu’ils exercent (le chômage, l’instabilité financière, les jeux de pouvoirs et les pressions continues, les pistons, …). Malgré tout, et à la manière du maître avant eux, les deux acolytes ont réussi à traiter tous ces sujets avec une grande légèreté et de façon – potentiellement – comique. On regrettera juste un petit manque de spontanéité et de fraicheur dans les tergiversions contemporaines. C’est qu’à force de « penser Molière », on en viendrait à un peu trop-tout intellectualiser.