Dans notre rubrique découverte, nous vous avions parlé de Dust In Mind, un groupe de métal originaire d’Alsace qui nous avait bluffé par la qualité de leur premier EP. (Voir l’article en cliquant ici)
Alors qu’ils s’apprêtent à sortir Never Look Back, leur premier album, nous avons été à la rencontre de Damien et Jennifer, les deux leaders du groupe pour en savoir un peu plus sur ce nouveau chef-d’oeuvre.
Merci de nous accorder un peu de ton temps pour cet interview.Bonjour, Damien.
Pour commencer, pourrais-tu nous dire comment l’aventure a commencé pour Dust In Mind ?
Dam : Salut Christophe,
En fait, à mes débuts je baignais plutôt dans le Death Metal et le Black. J’ai commencé avec différents projets pour finir sur un groupe plus concret qu’est Blindness en 2011. Puis, j’avais le besoin et l’envie de réaliser une musique complémentaire, plus varié musicalement, sans réelles limites, et différent de ce que j’entendais d’habitude. C’est comme ça que Dust In Mind a commencé en 2013.
Est-ce que vous vous connaissiez déjà auparavant ?
Dam : Avec Jennifer, oui, on s’était rencontré sur un festival, le Summer Breeze si je me souviens bien, en 2011. Matt je l’ai rencontré sur le tournage d’un clip. Il faisait partie du groupe pour lequel je travaillais. J’ai rencontré Arnaud réellement quand j’ai rejoint le groupe Absurdity fin 2013. Il remplace notre premier batteur Diaz que je connais plus ou moins depuis mes débuts. Et Jack, je l’ai recruté via l’annonce que j’avais passé pour recruter le guitariste Dust In Mind.
Le duo vocal que tu formes avec Jennifer (pas celle de The Voice, heureusement) est très intéressant et vous permet d’avoir davantage de flexibilité et de pouvoir varier énormément les sonorités de vos morceaux.
Comment s’est passé cette collaboration ? Est-ce que l’idée de faire un duo masculin-féminin était déjà défini dès la formation du groupe ?
Dam : Au départ, c’était un projet solo. Mais je voulais absolument y inclure une voix féminine, pour adoucir ma musique, et parce que j’avais envie de quelque chose de différent. Donc, j’ai fait des essais avec plusieurs chanteuses. Et puis, je me suis souvenu que Jennifer chantait et voulait avancer dans le milieu de la musique. Elle a un besoin vital de musique et s’est essayé à plein de styles (comme des groupes prog, et même des projets House / Club). J’ai écouté ses vidéos et je lui ai proposé de venir faire un essai. Elle est venue et a posé son chant sur Burn en une heure à peine. Tout a « matché » très naturellement. Dust In Mind est véritablement né ce soir-là.
Si vous avez dû chercher la bonne personne, comment se sont passés ces auditions?
Dam : C’était très naturel en fait. Je marche énormément au feeling et au ressenti. Parce qu’un groupe c’est avant tout une aventure humaine, et que le bon échange est capital. Donc, on enregistrait en direct et je voyais vite si ça allait fonctionner ou pas. Jusque Jen, soit c’était faux, soit le feeling n’était pas bon. Pour ce dernier ce sont des choses qui ne s’expliquent pas vraiment. Quand je cherchais un guitariste par exemple, je me souviens vivement qu’avec Jack, tout était évident. On s’est appelé suite à un échange mail assez sérieux, et au lieu de parler de ces points, on a dit que des conneries et on s’est marré pendant une heure. C’était lui qu’il me fallait, car on sait bien déconner, mais aussi être sérieux quand il le faut.
Comment définiriez-vous le style de Dust In Mind ?
Dam : Oulah, question difficile. Au départ je voulais partir vraiment dans le Metal Indus. Mais j’ai vite revirer vers mes instincts primaires et mon Metal plus énervé. Donc au final ça forme un équilibre entre un coté malsain, une certaine agressivité, une certaine efficacité, avec une musique pas trop technique pour laisser ressortir les samples et ambiances plus ou moins Indus, et une certaine douceur que Jen apporte. Donc pour être franc, avec tout ça, j’ai du mal moi-même à dire ce qu’on fait exactement, je préfère dire qu’on fait simplement du Metal. Après, je vous laisse l’honneur, à vous la presse, de définir notre style.
Que signifie Dust In Mind ? Pourquoi ce nom ?
Dam : Dust In Mind, c’est un peu le mélanges de toutes les merdes qu’on peut avoir en tête. Liées à notre histoire, ou celles des autres qui nous marquent, on a tous des ressentis, des expériences, et des choses à dire. Et nous, clairement, on ne parle pas de choses positives. Le nom du coup paraît assez logique, à nos yeux en tout cas, et définit cet amas infini d’histoires et de sentiments dans nos têtes, qui nous forge.
Vous avez publié plusieurs vidéos sur YouTube dont une reprise de Korn:
Parmi les groupes qui vous ont influencés, qui seraient les principaux ?
Dam : Dans mes compositions, je suis fortement influencé par Peter Tagtgren (du groupe Hypocrisy). C’est un peu lui qui m’a fait découvrir la musique. Il a une façon d’écrire et de composer qui me correspond beaucoup. Quand je l’ai vu sur scène la première fois, j’ai absolument tout compris de lui en deux secondes : ses douleurs et son parcours. Les sentiments qu’il m’envoyait en pleine tronche m’ont marqué au fer rouge. J’avais l’impression qu’on se connaissait, alors qu’on s’est rencontré vaguement une seul fois, en after show, et qu’à l’époque j’étais encore intimidé (ahah), donc on a peu parlé. C’est une sorte de père spirituel en fait. Sinon, j’écoute énormément de musiques différentes, et dans tous les styles. Je ne pourrais même pas vraiment te donner de noms précis, il y en a trop. C’est ce qui me permet aujourd’hui de créer quelque chose, à priori, d’assez varié. La reprise de Korn en fait partie, et on a même fait un titre acoustique moi et Jen qui s’appelle Falling (visible également sur Youtube) juste parce qu’on avait envie de le faire.
Jen : Nous avons tous des influences différentes dans le groupe. Et c’est ce qui apporte de la richesse au groupe. Personnellement, j’écoute plus du Djent et du Hardcore mais sans le Heavy et le Trash que j’écoutais plus jeune, je ne serai pas là aujourd’hui.
Machine Head a été l’influence principale dans ma vie. Et concernant le fait d’alterner le chant feminin-masculin, j’étais fan de Cristina Scabbia (Lacuna Coil) qui ne chantait ni de façon lyrique, ni hurlé, ce qui me plaisait beaucoup . C’était différent des autres groupes de l’époque. Dust in Mind ne représente pas véritablement le genre de metal que je vais écouter chez moi. Il s’agit simplement d’une sensibilité. J’adore, alors je fonce. Point. Et cela concerne plein d’autres genres et sous-genres.
Vous chantez en anglais. Est-ce pour mieux exporter votre musique ou pour une question de sonorité ?
Dam : Clairement, pour mieux exporter la musique, et parce que l’anglais sonne partout. C’est plus facilement harmonieux, en toutes circonstances.
Vous avez fait la première partie de Machine Head. Comment cela s’est passé ? Est-ce une démarche de votre part ou une demande venant de leur management ?
Jen : J’ai contacté la salle où Machine Head jouait, sur Strasbourg. J’ai envoyé un mail, un lien, et ils ont fait écouter cela au manager de Machine Head qui a aimé. Et nous nous sommes retrouvés sur la scène de La Laiterie, en première partie de ce groupe que je chéris depuis tant d’années. Et cela s’est très bien passé. Aujourd’hui j’ai encore du mal à réaliser, mais je sais que nous pouvons être fier de notre volonté et notre ténacité.
Que retenez-vous de cette expérience ?
Jen : Du stress, du surpassement de soi, je n’ai presque pas de mots en fait …
Dam : Très bonne expérience. On était en plus avec nos potes de Deficiency avec qui on partageait aussi l’affiche. Le timing était ultra serré. Je me souviens que pour gagner 5 minutes de set chacun on a bossé ensemble et fait un changement de plateau canon, en sept minutes chrono. Même l’ingénieur du son de la salle n’a pas compris ce qu’il se passait : « On y va déjà ? Heu … ok … ». C’était vraiment drôle, un très bon souvenir. On a beaucoup rit, et on s’est éclaté sur scène. Sans compter l’accueil qui est toujours excellent à La Laiterie, et le show de Machine Head qui était assez impressionnant.
Quel est votre meilleur souvenir sur scène ?
Dam : Pour ma part, et je parle de manière générale et pas uniquement pour Dust In Mind : il y a beaucoup de bons souvenirs. Je ne sais pas si je pourrais réellement en identifier un qui sort du lot. Il y a évidemment les anniversaires surprises ou les départs d’un membre parfois, qui sont des moments particuliers et assez riches en émotions. Mais ce que je peux dire, c’est que quand on est sur scène et qu’on échange des regards en se disant « T’es prêt? Ca va headbanger sévère là! » de manière télépathique, et qu’on fait signe au public derrière que ça va chier, qu’on donne tout jusqu’à la fin, et qu’on finit derrière la scène en se disant « Oh p***in comme c’était bon », pour moi c’est ça qui est marquant : l’échange positif intense avec son groupe et avec le public. Et ce n’est surtout pas la taille de la salle qui importe, contrairement à ce qu’on pourrait penser, mais ce qu’il s’y passe.
Jen : Pour moi, c’est encore et toujours l’ouverture de Machine Head !
Parlons du nouvel album: Never Look Back.
Pourquoi ce titre ? Aviez-vous envie de le différencier davantage du premier EP?
Dam : C’est marrant, on était tous synchros la dessus dans le groupe. On est arrivé à un moment de notre vie où on s’est dit : « Allons de l’avant », chacun à sa manière. Cela peut être amoureux, professionnel, ou autre, parfois tout en même temps. C’est aussi le nom du seul titre positif de l’album. Il représente la force et la persévérance à lui tout seul, et se démarque volontairement des autres titres pour dire : malgré tout ce qui tourne autour de toi, ton passé, tes expériences, tu as fait des choix en conséquences. Ne regrettes rien, ne te retourne pas, ne ralentis même pas, et vas de l’avant. Franchis les obstacles, continues ton chemin.
Le premier EP, pour moi, c’est l’entrée en matière et la carte de visite du groupe, car il faut bien commencer quelque part avec quelque chose. Il n’est que distribué digitalement et totalement autoproduit. C’était aussi un moyen de trouver notre future direction en terme de production et de composition. C’était volontaire, pour mettre tout ce qu’on peut dans ce premier album, avec une distribution également physique, du merchandising de qualité, et un investissement pour des prestations encore meilleurs sur scène. Il n’y a donc pas vraiment de volonté de le différencier de l’album. L’EP nous a permis de trouver notre voie, et on a voulu faire quelque chose de bien concret avec cet album. C’est la suite logique pour moi.
Est-ce que l’idée d’aller de l’avant est un thème abordé dans les chansons?
Dam : Il y a une chanson concrète pour ça (comme évoqué tout à l’heure) mais elle enveloppe un peu toutes les autres, finalement. Quand on parle de viol, d’angoisse, de peur, de haine, de doute, de faiblesse, de suicide, cela fait partie du parcours que l’on peut rencontrer. Et le message derrière tout ça est finalement toujours le même : vas de l’avant et ne te retournes pas.
Au sujet des paroles et de la composition, comment vous répartissez-vous les rôles?
Jen : Damien s’occupe entièrement de la composition musicale. Moi, j’écris et je pose les lignes de chants sur les morceaux. Suite à cela s’ajoute forcément des modifications et le reste du groupe intervient à ce moment-là.
Vous avez fait cet album assez rapidement par rapport au premier disque. (Ce qui n’enlève rien à sa qualité)
Est-ce que certaines chansons étaient déjà écrites avant? Ou est-ce que vous avez tout écrit lors de la préparation de l’album ?
Dam : Non, j’ai commencé directement, avant même la sortie de l’EP, de composer pour l’album. L’EP étant l’entrée en matière, il fallait, à mes yeux, quelque chose de concret rapidement.
Quels sont les thèmes abordés dans ce disque ?
Jen : En clair et sans tourner autour du pot : de notre volonté à avancer sans se retourner, de garder la tête haute et d’essayer de se (re)construire malgré les horreurs vécues dans notre passé, de force comme de lâcher prise, de renouveau.
La production de vos disques est vraiment remarquable. J’ai ainsi pu constater que l’EP et l’album avaient été enregistré au Psyrus Studio que tu diriges. Peux-tu nous dire quelques mots sur ce studio et son évolution ?
Dam : Merci pour le compliment. En fait, j’ai commencé à travailler dans le domaine il y a une dizaine d’années maintenant, quand je n’avais juste pas les moyens de faire produire un EP ou un album pour les groupes dans lesquels j’étais. Il se trouve que je suis devenu accro à la production, de manière générale. C’est un peu la force des choses qui m’a mené là où je suis maintenant. Aujourd’hui j’ai mon studio en Alsace, avec mon associé, Matt GABNAI (ancien d’Ubisoft, qui est bassiste dans tous mes projets, dont Dust In Mind). On propose des prestations de production (que ce soit musique, photo, ou vidéo). J’ai aussi regroupé des partenaires qui me permettent de proposer une offre globale, à savoir : artwork, webdesign, pressage, merchandising, location de matériel son et lumière, maquillage coiffure pour les évènements ou shooting, modèle, et même artiste pour animer des évènements. Bref, l’idée c’est que tu puisses faire ton projet de A à Z chez moi, avec des gens compétents.
Damien, beaucoup de groupes se plaignent du manque de moyen qui est mis à leur disposition pour se développer. De la difficulté de se produire aujourd’hui quand on fait du metal et du fait aussi que le métier ne paie plus comme autrefois.
Qu’en penses-tu ?
Dam : C’est tout à fait vrai. Presque personne ne vit de la musique metal aujourd’hui, à part certaines légendes. Aujourd’hui si tu veux faire du metal, il te faut un job flexible à côté. Quant aux moyens de se développer, clairement, si tu ne fais pas tout en restant seul (ou au moins une grosse partie), il te faut beaucoup d’argent. Car, aujourd’hui, tout passe par internet. Il te faut donc un support cohérent si tu veux sortir du lot, à savoir : artwork, logo lisible, des titres avec une bonne production, des vidéos, des photos, sans parler d’une présence régulière dans la presse. Un jeune groupe doit payer tout ça, il doit aussi payer les ¾ du temps pour avoir son petit encart dans un magazine papier, au même titre qu’une publicité. Il paie aussi sa présence sur les compilations. Si un groupe veut sortir du lot, il faut faire des tournées également, pour, entre autre, sortir de nos frontières françaises et s’exporter. Pour se faire, il faut du matériel et des instruments correctes, et travailler la scène. Il faut aussi penser à un décor de scène si tu veux avoir une image pro et que les gens se souviennent de toi, comme du sidedrop et backdrop par exemple. Et ensuite, le seul moyen réellement efficace de tourner et d’avoir une vraie visibilité, une audience correcte et régulière sur chacune des dates, c’est le tour support. Et ça aussi, ça a un coup, parfois hallucinant suivant la tête d’affiche. Donc, si tu n’as pas une confiance en toi absolue et objective sur la qualité de ton travail, que tu ne donnes pas tout dans ton projet, et que tu n’as pas un morale d’acier, ni une grande patience, il est très difficile (voire quasiment impossible) de se développer.
Je suppose qu’une tournée se prépare afin de promouvoir ce nouvel album.
Avez-vous déjà des dates à annoncer ?
Dam : Oui, on travaille sur notre release party et on a des dates qui vont très vite se confirmer pour avril-mai. Mais on travaille surtout sur la rentrée en septembre 2015, avec sûrement un tour support.
Est-ce que vous comptez tourner à l’étranger ?
Jen : Bien sûr, notre objectif étant de tourner en Allemagne. Mais nous voudrions d’abord conquérir notre public Français avant toute chose ! Mais effectivement, nous aimerions que Dust in Mind dépasse les frontières ! S’il y a quelque chose que vous pouviez nous souhaiter, ce serait bel et bien cela !
On vous souhaite le meilleur en tout cas pour ce disque et on sera ravis de vous retrouver sur la route !
Dam et Jen : Merci infiniment Chris !
Retrouvez toutes les infos sur Dust In Mind sur leur site: www.dustinmind.com