Texte et mise en scène de Vincent Hennebicq, avec Vincent Cahay, Dorcy Rugamba, François Sauveur
Du 3 au 14 février 2015 à 20h30 au Théâtre National
Les 17 et 18 février 2015 à 20h15 au Festival de Liège
Le 19 février 2015 à 19h dans le cadre de Factory
Allemagne, 2011. Un homme se tient immobile sous la pluie. Des billets de banque volent autour de lui. 5000 € pour être exact. Il vient de commettre un braquage. Son deuxième. Il est perdu et il le sait. Son corps ne répond plus alors que les sirènes de police résonnent. La suite nous expliquera comment in en est arrivé là.
Ce n’est pas la première fois que le théâtre s’attaque au racisme ordinaire et au désir de migration du Sud vers le Nord. Mais Vincent Hennebicq ne tombe pas dans le cliché ni dans le procédé éculé et prend le problème par l’autre bout : plutôt que de présenter avec complaisance un énième Africain rêvant à une vie meilleure au delà de la Méditerranée, il traite d’une autre réalité. Entre racisme et malheur, la vie au Nord n’est peut-être finalement pas si dorée que ça.
Michalak, adopté par des Autrichiens quand il était enfant a connu le racisme, l’aliénation et décide donc, après un braquage réalisé au hasard de la nécessité, de se rendre en Ethiopie. Il y fonde une famille dans un village et découvre ce que c’est d’être heureux. Mais son passé va le rattraper et le ramener de force en Europe.
Sur scène, Dorcy Rugamba, les pieds dans le sable, est Michalak l’Ethiopien. Il ne raconte pas vraiment comme un conteur car il est Michalak, il vit, son corps vibre au son de ses mots. La mise en scène prend le parti de l’amplification par la musique live jouée par Vincent Cahay et François Sauveur. Excellente idée d’Hennebicq qui crée ainsi une véritable chanson jusqu’à transformer le texte en vecteur d’émotion pure. La batterie devient anxiogène comme un battement de coeur et transmet la rage autant, si pas plus, que le texte.
De la même manière que le texte devient chant, le mouvement devient danse. La mise en scène, qui joue habilement avec ombre et lumière, rend parfois le corps abstrait par des procédés de contre-jour et des projections d’images vidéo sur un écran géant placé à l’arrière-scène. Un filet se tend devant cet écran, donnant une matière à l’image et se dressant comme une frontière entre le personnage et l’Ethiopie, le Nord et le Sud. Car Michalak a grandi en Europe et n’appartient plus à l’Afrique. Si le titre Going Home indique un retour, le lieu de se retour n’est pas si clair car l’origine de Michalak est floue. D’où vient Michalak ? Le sait-il lui-même ? Cette question est omni-présente dans la pièce.
Going Home joue sur la corde sensible. Multimedia, rythmé et percutant ce spectalce de Vincent Hennebicq frappe fort et vite. En à peine une heure, il réussit le pari de la remise en question d’un système et des rapports Nord-Sud en nous en mettant au passage plein la figure.