Crédit photo d’illustration ©Martin Girard
Un charme insolent, une polyvalence déconcertante et un talent incontestable. C’est en voulant résumer Stéphane Rousseau, que l’on se réjouit de l’existence des adjectifs.
Il nous parle ici de son nouveau spectacle : « Stéphane Rousseau brise la glace », où il nous surprend tantôt dans l’autodérision, tantôt par un break musical. Un vrai show. Le divertissement à son paroxysme, tel est le but du sixième seul en scène du performer québécois.
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À quoi s’attendre en venant voir votre spectacle ?
Principalement à se divertir, à s’amuser. Même si cela reste avant tout un stand up, c’est un show-concept original. Dans ce spectacle je parle de mes défauts, empreints de beaucoup d’autodérision. C’est un peu le bilan que je fais de mes années de conneries, de comment je pourrais faire pour devenir un meilleur homme. Le tout ponctué par des chansons originales.
J’ai tout de même invité, une fois de plus, mon personnage « Rico ». Premièrement, parce que les gens me le demandaient avec enthousiasme, mais aussi car j’ai énormément de plaisir à le jouer.
Qui vous accompagne sur scène ?
Il y a deux musiciens. À la batterie, une fille, très talentueuse : Emmanuelle Caplette. Elle a tourné notamment avec les ex-membres de Police. Elle est la compagne de David Joyal, qui m’accompagnait au son sur mon ancien spectacle.
Emmanuelle m’a par la suite présenté un claviériste québécois incroyable, avec qui d’ailleurs nous partageons un moment très « typique » sur scène, un peu à la manière d’un feu de camp, c’est un hommage festif et humoristique à la chanson québécoise. En tout cas, on s ‘amuse beaucoup.
C’est un spectacle en continu, il n’y a jamais de rupture, jamais de noir. On suit l’évolution du personnage sur scène en rythmant le tout par des chansons.
Combien de temps a duré la « gestation » de ce nouveau spectacle ? Entre l’écriture, puis le travail, la mise en scène …
C’était assez long. C’est mon sixième spectacle, ça devient de plus en plus difficile de surprendre. Ça m’a pris un peu plus d’un an pour trouver le ton juste, et je l’ai tourné presque deux ans au Québec avant de lui faire passer la frontière.
Est-ce que la performance musicale est devenue indissociable de votre conception du one man show ?
Pour moi oui. J’adore chanter, dans la musique il n’y a pas de limites pour s’exprimer. Et puis, le stand up cadre aussi dans le temps, même les plus grands « stand-upper » dépassent rarement l’heure et quart. Mon show tourne autour des une heure quarante, je peux me le permettre grâce aux respirations apportées par les chansons.
Et j’aime m’éclater avec les éclairages lors des passages musicaux. Tandis que le stand up pur demande un certain classicisme au niveau de la mise en scène, pour ne pas perdre la vanne et l’humour, on se doit de rester assez basique. Ces mélanges participent à mon coté « show man à l’américaine », c’est aussi ce qui amuse les gens.
Quelles sont vos influences majeures ?
J’ai beaucoup d’influences, mais si je ne devais n’en citer qu’une, ce serait Yvon Deschamps. Il est très peu connu en France. Selon beaucoup de gens au Québec, c’est le plus grand humoriste que la planète ait jamais connu. Il a 75 ans aujourd’hui, mais je peux vous dire qu’on s’en inspire encore, c’est un dieu vivant chez nous. Il a traversé la frontière à quelques reprises mais les gens n’ont pas compris, son québécois est trop intense. C’est un homme tellement intègre, tu ne lui demanderas pas d’adapter ses textes… Moi je suis un peu plus pute donc … (rires)
Dans mes contemporains, Florence Foresti m’inspire, c’est d’ailleurs une bonne copine, je la trouve toujours très juste. Son dernier spectacle est une tuerie. Et puis évidemment Frank Dubosc. On a énormément de points communs, on a travaillé ensemble à de multiples reprises et nous sommes restés très amis.
Je regarde beaucoup ce qui se fait chez les plus jeunes aussi. Il faut rester ouvert pour évoluer. Je vais voir ce qui se fait davantage pour faire différemment que pour m’en inspirer. De plus, les codes ont beaucoup changé ces dernières années. Le terme « stand up » s’est démocratisé en France alors qu’au Québec, on connaît cela depuis toujours grâce à la double culture.
Moi, j’ai toujours un peu tout mélangé, je suis touche-à-tout, je ne me sens pas profondément humoriste, je suis pas un puriste de l’humour. Ce que j’aime c’est la performance, le Show.
Vous êtes ce qu’on peut appeler et sans nul doute : un homme de scène. Dès lors, quel est l’aspect qui vous intéresse le plus lorsque vous faites du cinéma ?
De créer le personnage, c’est ce qui m’amuse le plus. Comme sur scène d’ailleurs, mes personnages de scène ont toujours été assez marquants. Je pense à Rico, mais j’en ai d’autres qui ne sont jamais venus en France ou en Belgique.
Pendant longtemps, je montais sur scène avec une marionnette qui s’appelait Madame Jigger. J’étais trop timide pour parler avec ma propre voix. Sur scène, je jouais toujours un personnage, j’empruntais des voix différentes ou je faisais des imitations. Même si je me suis détaché de ça depuis un moment, au cinéma j’aime être ancré dans un rôle. Je suis assez naïf pour y croire. Si tu me dis : « Tu es un psychopathe », j’y crois et j’y vais à fond.
J’ai aussi eu de la chance, on ne me propose pas que des comédies. Oui, il y a eu Fatal où je me suis vraiment éclaté. Ou encore Paris à tout prix, où je joue un designer parisien chiant, ce qui est évidement très loin de moi.
Rentrer dans l’univers d’un réalisateur, et ne plus t’occuper que de ton personnage. C’est une toute autre dynamique que la scène.
Avez-vous eu besoin d’un autre regard pour la mise en scène de votre spectacle ?
J’ai fait ma mise en scène mais j’ai appelé à l’aide. J’ai eu deux regards différents sur ce spectacle.
Le premier, c’est Josée Fortier, qui a entre autres mis en scène Florence Foresti. Je l’adore, elle est venue cette année m’aider lorsque je n’avais plus de recul sur ce que je faisais. Quand tu n’arrives plus à mettre le doigt sur ce qui cloche. Elle débarque et ne passe pas par quatre chemins, même si ça fait mal parfois, c’est toujours bénéfique.
Le second, c’est Bernard, à la direction artistique. Il est metteur en scène de danse contemporaine et de théâtre, des projets très pointus. Je l’ai croisé par hasard et je lui ai demandé de me donner son avis, son ressenti. Il voulait essentiellement me faire travailler sur le fond : « Que veux-tu raconter ? » C’est presque un poète ce mec. Il a un regard très différent, il n’est pas du tout le spectateur type de mes spectacles, et tant mieux. Il m’a aidé à être plus percutant. Il voulait aller plus loin dans le « pourquoi ». Il m’a aidé à trouver le fond de l’histoire : parler de mes défauts, ça le faisait rire. « C’est ça que tu dois raconter Stéphane. »
Le Québec est à la France ce que la Belgique est à la France également … Comment vous sentez-vous accueilli quand vous venez jouer ici ?
C’est toujours très sympa de venir jouer ici, les rapports sont simples, les gens se prennent moins au sérieux. On se méfie moins de l’autre qu’en France par exemple. Les gens sont toujours adorables et attentionnés de manière sincère, sans avoir peur des confrontations pour autant. J’aime aussi leur humour décalé, absurde. J’aimerais pouvoir à l’occasion passer plus de temps dans la ville de Bruxelles.