Titre : Defy me
Auteur.ice : Tahereh Mafi
Edition: Michel Lafon
Date de parution : 20 mars 2025
Genre du livre : Dystopie
ATTENTION : Cet article traite du second tome (saison 2) d’une saga comprenant quatre précédents tomes. Nous vous recommandons de débuter votre lecture ou votre exploration par le premier tome, Shatter Me, dont vous trouverez la critique ici.
Dans notre précédent article, nous exprimions nos craintes quant aux éléments à venir dans cette suite. Le précédent tome laissait un goût de cendres, un sombre présage qui s’est confirmé. Defy Me pourrait bien être le tome le plus marquant et transcendant de toute la franchise.
Nous pourrions vous donner les prémisses de l’histoire, les éléments de départ, pour vous mettre l’eau à la bouche et vous donner envie de le lire. Mais non, car ce serait gâcher votre plaisir. Nous souhaitons que vous abordiez ce tome avec le moins d’informations possibles, vierge de tout spoiler, afin que vous puissiez vivre une expérience similaire à la nôtre.
Ce que nous pouvons affirmer, cependant, c’est que cette fois-ci, Tahereh Mafi plonge au cœur des abysses. Il n’est plus question de retenue, de lenteur ou d’installation progressive du décor. Defy Me a été conçu pour frapper, dérouter, désorienter et horrifier. Cette lecture sans concession et viscérale pousse tous les curseurs à leur maximum et offre une leçon d’écriture.
Un style unique
Dès le début, ce qui a fait la particularité de Shatter me, c’était l’écriture immersive. Ces pages entières d’une phrase, « Je ne suis pas folle », écrite plus de cent fois, raturée et qui s’achevait invariablement par un « Je suis folle », tout à fait intact. Cela accroche directement, que l’on soit sensible dès le départ ou non au propos. On ressent le tourment, la désorientation, ce qui apporte une dimension considérable à la lecture, un angle d’écriture en tout point admirable. Progressivement, au fil des tomes, nous perdions ces chapitres décousus, tout simplement parce que le personnage reprenait progressivement pied avec la réalité et se forgeait une nouvelle force. Dans ce tome-ci, nous retrouvons cette écriture mais avec une intensité inégalée jusqu’alors. Tout ce qui se lit est viscéral, émotionnel, un chaos orchestré jalonné de flashbacks où l’on aborde progressivement la cruelle manipulation psychologique mise en place par les dirigeants du Rétablissement.
Nous ne nous attendions pas à ces revirements et nous ne nous attendions pas à être autant bouleversés par le désespoir qui suinte derrière chaque page de l’œuvre. À notre sens, c’est le tome le plus captivant et transcendant de la franchise. L’autrice joue avec notre crédulité. Depuis le début, l’écriture à la première personne nous avait donné l’illusion de connaître et de comprendre les tenants et aboutissants de l’intrigue. Nous découvrons qu’il n’en est rien car nous étions en double aveugle depuis le départ. Quel ravissement pour un lecteur de se sentir pleinement dans le brouillard, de suivre les révélations en même temps que les personnages, comme si nous étions à leurs côtés, dans leur esprit, spectateurs attentifs d’une mémoire qui se réveille et d’une manipulation à grande échelle mise à jour.
Echec et mat ?
À l’instar des personnages, nous avions toujours un coup de retard. À peine découvrions-nous une vérité que nous réalisions automatiquement que nous étions bloqués, pris au piège. On se demande littéralement tout au long de l’œuvre comment les personnages vont pouvoir s’en sortir indemnes. En termes de violence, nous atteignons également un climax avec le traitement inhumain infligé à Juliette. C’est presque un cauchemar atroce duquel on souhaiterait constamment se réveiller, espérant toujours qu’une issue favorable aboutira par miracle. Mais encore une fois, ce sentiment viscéral d’être dans une partie d’échecs avec un adversaire qui a déjà calculé tous les coups possibles persiste.
Là où la première saison de Shatter Me (trois tomes) avait été une découverte remarquable, on comprenait instantanément l’engouement autour de l’œuvre. Dès les premières pages, cette saga semblait faite pour le cinéma sur grand écran. Dans Restore Me, nous entamions la saison deux progressivement, en nous questionnant sur la direction que celle-ci prendrait après la chute du pouvoir en place. Que pouvait-il exister d’autre ?
Eh bien, la réponse tient en deux mots : Defy Me. Un tome clé qui permet de prendre de la hauteur, qui est une charnière du récit, bouleversant l’échiquier en place, changeant les codes. Le voyage aux côtés de Tahereh Mafi est loin d’être apaisant mais qu’est-ce qu’il est jouissif. Nous attendons le prochain et dernier tome avec une joie presque enfantine, car, bon sang, qu’est-ce que ça fait du bien d’être surpris.