Scénario : Thomas Messias
Dessin : Sarah Loulendo
Éditeur : Casterman
Sortie : 12 février 2025
Genre : Jeunesse
Thomas Messias et Sarah Loulendo s’adressent dans cet ouvrage principalement aux garçons, à tous les types de garçons : ceux qui se sentent bien dans leur corps d’ado qui changent, ceux qui se mettent en bandes organisées pour se créer une place, ceux qui se sentent limités par les injonctions et autres stéréotypes qui les obligeraient à être agressifs, à prendre de la place, à ne rien faire à la maison, etc.
Découpé en 7 chapitres, Y a plein de manières d’être un garçon se veut très pédagogique. On peut y voir la patte du professeur Messias derrière ce postulat d’éducabilité. On tient à y expliquer avec des mots simples, parfois redondants, que les émotions, c’est aussi pour les garçons, qu’il y a plein de manières d’être un allié ou que le consentement, cela s’applique tout le temps, et pas uniquement quand on commence à découvrir la sexualité avec l’autre.
L’ouvrage est donc un peu trop scolaire, ne sortant pas des sentiers battus par rapport à des thématiques nouvelles qui y sont traitées. Par exemple, il y aurait autant de personnes intersexes que de personnes rousses, pourcentage à l’appui (1,7%), le même pourcentage qu’on ressort à chaque fois qu’on parle de l’intersexualité (et à raison peut-être), qui semble devenir une figure obligée, un chiffre à exposer pour montrer qu’on a bien fait ses petites recherches sur l’intersexualité. L’ambition de l’ouvrage est de toute façon d’introduire ses données à des adolescents, pour que ces garçons puissent communiquer davantage sur eux-mêmes plutôt que de se battre entre eux.
Les pages sont bien aérées, Messias et Loulendo vont à l’essentiel, embrassent le spectre du genre dès le début : si tu ne te sens pas garçon, pour X raisons, au-delà même des stéréotypes de genre et de ce que tu as entre les jambes, pas de tracas. En s’adressant aux lecteurs et aux lectrices avec le tu direct, le pédagogue et l’illustratrice jouent la carte de la proximité, multipliant aussi les références aux séries télévisées, au monde de la culture (américaine surtout, dommage), aux jeux vidéo, dans l’optique de parler de ce que les jeunes aiment. Des dessins, sans âme particulière dans leur facture graphique numérique passe-partout, illustrent le propos de manière claire.
Le livre est intéressant lorsqu’il explore des thématiques de manière concrète. Revenant beaucoup sur l’empathie, l’écoute, Messias et Loulendo montrent que c’est un travail de toute une vie, et expliquent qu’il y a des cours d’empathie qui sont notamment donnés dans les écoles au Danemark. Si tu as dit quelque chose qui a blessé quelqu’un, est expliqué ensuite comment sortir de là et oser avouer ses faiblesses, oser dire qu’on a eu tort. Comment savoir si tu entretiens une amitié toxique avec quelqu’un, ou encore jusqu’où aller pour montrer ton intérêt pour quelqu’un par messages sans avoir l’air d’un harceleur potentiel ? Ce sont des questions pertinentes qui sont introduites ici, qui serviraient justement dans le syllabus d’un cours de socialisation ou de religion d’une école francophone. La BD se calera donc très bien entre le livre de Charline Vermont, Corps, amour, sexualité et la ressortie du nouveau guide du zizi sexuel d’Hélène Bruller et Zep, revisité en mode 2020.