More

    Pieuvre 1+2 (suite et fin) : quand la bienveillance éclaire l’absence

    Pieuvre 1 (Traces) est une « conférence illustrée » nourrie d’observations factuelles, qui explore les raisons pouvant expliquer un drame personnel : la disparition d’un être cher. Pieuvre 2 (Fantômes), plus poétique, évoque la présence d’esprits parmi les vivants. Et si la personne disparue venait clore l’enquête menée dans Pieuvre 1 ?

    « Pieuvre 1+2 (suite et fin) est une étape du projet Pieuvre… Un projet qui part dans tous les sens et dont chaque tentacule a un cerveau. »

    Françoise Bloch, à la fois metteuse en scène, actrice et autrice, accueille les spectateurs à sa manière : imagée, mais toujours rationnelle. Un petit bijou.

    Pendant la première partie du spectacle, l’artiste pluridisciplinaire tente d’élucider les raisons qui ont pu conduire à la mort d’un homme, quelqu’un qui, sans nul doute, lui était très cher. Son récit, posé et limpide, est entrecoupé de plusieurs extraits d’œuvres diverses. Avec Scènes de la vie conjugale d’Ingmar Bergman, le ton est donné : « Je crois qu’il suffit d’être gentil envers l’autre. Il faut aussi de la tendresse, de l’humour, de la camaraderie. Ne pas trop exiger de l’autre. »

    La question centrale est en réalité : « Qui commet le meurtre d’un homme qui se tue ? », une interrogation tirée d’un roman de Camille de Toledo, qui prend tout son sens à mesure que Françoise mène son enquête. Aucun pathos, aucune larme, mais beaucoup d’émotion dans ce récit peuplé de souvenirs, racontés avec respect et pudeur. En proposant plusieurs pistes, l’artiste nous plonge dans le passé des émigrés italiens de la région de Liège, en évoquant notamment la catastrophe du Bois du Cazier, ou dans les murs d’un pensionnat… En somme, dans l’histoire d’une famille, celle de l’homme disparu. Toutes les hypothèses avancées sont plausibles et peuvent aussi se cumuler. Elles pourraient expliquer le geste final, mais l’enquête est-elle vraiment destinée à aboutir ?

    La deuxième partie du spectacle, Pieuvre 2, se déroule dans un autre décor, sur une autre scène, et ce changement opère déjà une forme de magie. Très poétique, le récit, à la fois simple, un peu naïf et teinté d’humour, plonge le spectateur dans des histoires de fantômes. Quel beau moment que celui où l’actrice se déguise maladroitement : « J’ai apporté ici une petite loque de fantôme et une petite couronne de fleurs pour stabiliser l’affaire » ! Magnifique. Chaque réplique est une pépite.

    Partant d’une histoire triste, Françoise Bloch bâtit un récit d’une grande sensibilité, sans pathos, mais riche et parfaitement structuré. Une véritable prouesse. Cet équilibre entre poésie, humour et rationalité est une constante chez cette artiste. Alors que ses spectacles abordent généralement des thématiques sociétales (Money !, sur les fonds d’investissement, Point de rupture, sur le burnout, etc.), elle s’ancre ici dans une histoire intime, un fait précis. Gageons que les autres tentacules de Pieuvre seront du même acabit, comme les perles d’un collier.

    Derniers Articles

    Conception, texte et jeu de Françoise BlochDu 4 février au 8février 2025Au Théâtre des Tanneurs Pieuvre 1 (Traces) est une « conférence illustrée » nourrie d’observations factuelles, qui explore les raisons pouvant expliquer un drame personnel : la disparition d’un être cher. Pieuvre 2 (Fantômes), plus poétique,...Pieuvre 1+2 (suite et fin) : quand la bienveillance éclaire l’absence