Emmanuelle
Réalisatrice : Audrey Diwan
Genre : Drame, Erotique
Acteurs et actrices : Noémie Merlant, Will Sharpe, Naomi Watts
Nationalité : France, USA
Date de sortie en VOD : 28 janvier 2025
Contrôleuse qualité pour un groupe d’hôtellerie de luxe, Emmanuelle se rend à Hong Kong à des fins professionnelles. Seule, en quête de plaisir, elle rencontre Kei, un homme mystérieux.
Comment porter un regard cinématographique sur la sexualité des femmes en 2024 ?
C’est à cette question que tente de répondre Audrey Diwan. Ovationnée pour son film L’Evénement, la metteuse en scène s’attaque à la réécriture d’Emmanuelle, film érotique à l’héritage pesant. Emmanuelle, premier du nom, reste en effet un cas à part dans l’histoire du cinéma français. Réputé sulfureux à sa sortie en 1974, il a pourtant connu un incroyable succès populaire, faisant se déplacer en masse les foules dans les salles obscures. Mais la révolution sexuelle post mai-68 laisse aujourd’hui sa place à une autre, plus équilibrée, où l’érotisme ne se conjugue pas uniquement au masculin.
Depuis #MeToo, notre regard sur les protagonistes féminines a en effet beaucoup changé. L’implication des femmes dans les équipes de production y est probablement pour quelque chose. De la caméra à l’écriture, cette perspective féminine (aussi appelée Female Gaze) est un élément essentiel pour comprendre le contexte dans lequel s’inscrit le film d’Audrey Diwan.
Comme l’explique la réalisatrice, Emmanuelle n’aurait pas dû s’appeler ainsi. Le film est en effet un énorme malentendu et va sans doute décevoir celles et ceux qui s’attendaient à un remake féministe de la franchise. En écartant les attendus, on peut pourtant saluer la valorisation du plaisir féminin au sein d’un genre encore trop souvent attribué à la gent masculine.
La beauté est dans le geste
Avec une esthétique léchée où la luxure se complait dans le luxe, la beauté du film réside dans l’illustration des petits gestes du quotidien. Le charme émane de chaque mouvement ou courbe. Une main coupée, des fleurs qui s’épanouissent1, le drapé d’une robe invitent ainsi la spectatrice/le spectateur à être à l’écoute de son propre désir.
Si le film ne raconte pas grand-chose, il laisse donc planer une douce et froide sensualité. Il offre aussi un propos intéressant sur la solitude au cœur des métropoles qui n’est pas sans rappeler Lost In Translation (si, si).
Si l’on déplore la pauvreté des dialogues, on ne peut que s’enthousiasmer de l’aura qu’apporte Noémie Merlant à son personnage. Emmanuelle, imperturbable, contraste dans un monde qui s’agite et erre seule dans les couloirs de l’hôtel. Sa sexualité épanouie n’est que le reflet de sa propre mélancolie. Son voyeurisme, celui de son propre isolement.
Sans mauvais jeu de mot, Emmanuelle est donc un film plus profond qu’il n’y paraît !
- Rappelons que les fleurs sont une métaphore érotique ↩︎