Saviez-vous que Sean Connery n’était pas le premier acteur à avoir incarné James Bond au cinéma ? Qu’une autre Mary Poppins a tenu le parapluie quinze ans avant Julie Andrews ? Ou que la première apparition de l’inspecteur Columbo s’est faite sans Peter Falk ?
En effet, avant d’être les célèbres personnages que nous connaissons aujourd’hui, plusieurs héros ont connu une autre vie et d’autres visages, se métamorphosant au gré de leurs aventures jusqu’à devenir ceux que nous connaissons désormais.
C’est ainsi qu’outre les deux productions Disney connues du grand public, deux autres films ont mis en scène Mary Poppins !
1949 : Mary Poppins se pose dans Studio One
La célèbre gouvernante créée en 1934 par Pamela Lyndon Travers est en réalité apparue pour la première fois à la télévision le 19 décembre 1949, dans une série d’anthologie intitulée Studio One.
Cette série, diffusée entre le 7 novembre 1948 et le 29 septembre 1958 sur la chaîne CBS, aura donné naissance à quantité de pièces de théâtre filmées en studio et télédiffusées, autant qu’elle aura permis l’émergence de réalisateurs devenus célèbres comme Franklin J. Schaffner, George Roy Hill ou encore Sidney Lumet. C’est notamment dans cette émission que fut diffusée la première adaptation de Douze hommes en colère dont nous avons déjà parlé dans notre analyse psychologique de ce monument du Septième Art.
C’est ainsi qu’un an après la création de Studio One, les producteurs eurent l’idée de porter à l’écran le personnage créé par Pamela L. Travers, en confiant le rôle à l’actrice Mary Wickes.
Si, aujourd’hui, Mary Wickes est un nom qui ne dit plus rien au grand public, elle a pourtant servi de modèle physique aux animateurs de Disney chargés de créer le personnage de Cruella d’Enfer pour le film animé Les 101 Dalmatiens ! Dans les années 1990, elle incarnera également la sœur Mary Lazarus, la directrice de chorale rapidement remplacée par Whoopi Goldberg, dans Sister Act.
En 1996, on l’entendra encore prêter sa voix à Laverne dans Le Bossu de Notre-Dame de Disney, sorti à titre posthume.
Mary Wickes prit beaucoup de plaisir à incarner Mary Poppins dans cet épisode de 59 minutes, au point qu’elle aurait gardé une grande photo d’elle en costume dans son appartement : « J’étais la Mary Poppins originale – personne ne l’avait été avant moi ! » déclara-t-elle plus tard.
Quant au réalisateur Paul Nickell – ayant officié sur 141 des 467 épisodes de Studio One –, il déclara à son tour : « J’ai aimé le script, mais je ne m’attendais pas à créer un grand spectacle lorsque ça a commencé. Mais ça a pris de plus en plus d’ampleur et, au final, j’ai adoré. J’étais très satisfait du résultat, et je ne peux pas dire la même chose de tous les épisodes sur lesquels j’ai travaillé ».
Il faut dire que les épisodes de Studio One étaient tournés à New York selon un planning ne facilitant pas l’innovation et la recherche visuelle : une semaine de répétition suivie d’une répétition générale devant les caméras, bientôt suivie d’un essayage des costumes et de la performance finale.
Dans le cas de Mary Poppins, les interférences du producteur créèrent parfois la confusion, si l’on en croit Iris Mann – l’interprète de Jane Banks : « Un homme brillant nommé Worthington Miner était le producteur. Il venait et redirigeait l’ensemble, puis Paul Nickell venait à son tour et dirigeait le tout différemment ». L’actrice ajoutant : « Ça ne me dérangeait pas, mais Tommy Rettig – l’interprète de Michael Banks – était un peu contrarié. Je me souviens que sa mère lui a dit : “Quand Nickell est là, joue comme il le demande, mais quand Tony Miner est là, joue comme il le demande” ».
Néanmoins, malgré ces impondérables et la sobriété inhérente à ce genre de productions, Mary Poppins s’autorisa quelques audaces, notamment en intégrant au décors un crochet capable de transporter l’héroïne à travers le plateau de façon à la faire voler.
Ainsi, cette production fut un succès et la chaîne CBS reçut une quantité impressionnante de lettres de fans. Le réalisateur Sherman Marks qui, à l’époque, dirigeait Mary Wickes dans la série Inside U.S.A. with Chevrolet aurait été jusqu’à télégraphier à l’actrice pour lui faire savoir que « Mary Poppins [venait] de supplanter la radio et le cinéma ».
C’est donc tout naturellement que Mary Wickes voulut réitérer l’expérience et jouer dans une suite. Elle écrivit ainsi à l’un des directeurs de CBS qui lui confirma en 1955 qu’un tel projet était envisagé, sans que jamais rien n’aboutisse.
En 1958, alors que l’actrice était engagée sur trois épisodes de la série Zorro, elle rencontra Walt Disney et eut l’occasion de discuter avec lui de l’œuvre de Pamela L. Travers ainsi que d’une suite potentielle à la production de 1949. L’acquisition des droits de Mary Poppins en 1961 par la célèbre firme aux grandes oreilles permit à Mary Wickes d’espérer voir son rêve se concrétiser…
Cependant, lorsque Disney mit en chantier sa propre adaptation de l’œuvre de Pamela Travers, l’actrice était alors âgée d’une cinquantaine d’années, et les studios lui préférèrent Julie Andrews, plus jeune de vingt-cinq ans. « Ça m’a brisé le cœur lorsqu’ils l’ont finalement fait sans m’offrir de rôle dedans » déclara la comédienne, déçue que son apport à la licence ait été ignoré.
Par-dessus tout, Mary Wickes regretta que la Mary Poppins de ce long-métrage soit douce, là où l’héroïne originale était rugueuse ; Disney l’ayant rendue plus gentille qu’elle ne l’est en réalité. En cela, elle rejoignait Pamela L. Travers qui écrivit à son éditeur en 1964 : « Ce film était Disney encore et encore, spectaculaire, coloré, joli mais emballé dans une médiocrité intellectuelle, une compréhension peu subtile et une simplification abusive ». Un film « sans ambivalence, sans profondeur et avec peu de tristesse » selon la biographe de l’auteure qui ajoute encore que, dans les livres, Mary Poppins était « acerbe et vive, grossière, franche et vaniteuse ».
L’adaptation des studios Disney éclipsa ainsi l’adaptation originale de 1949, tout en s’attirant les foudres de Pamela Lyndon Travers et de Mary Wickes.
Si cette première version télévisée des aventures de Mary Poppins existe encore, elle n’a jamais été éditée sur support physique, ni même rediffusée à la télévision ou sur les plateformes de VOD. Il est cependant possible de consulter les 79 pages de son scénario à la bibliothèque de la Bowling Green State University, dans l’état d’Ohio, tandis que le Paley Center For Media possède deux bandes kinescope conservées à New York et à Beverly Hills.
Sachant que l’institution ne fait que conserver les bandes sans en être propriétaire, une diffusion numérique est inenvisageable sans l’aval de la société de production originelle, et il faut actuellement, pour visionner cette première adaptation, se rendre physiquement sur place pour une projection dans les locaux du Paley Center.
2026 marquant le trentième anniversaire de la disparition de Pamela L. Travers, il ne nous reste plus qu’à espérer que CBS se décidera à dépoussiérer ce Mary Poppins cuvée 1949 pour le plus grand plaisir des spectateurs !
En attendant, nous pouvons nous consoler en découvrant une autre rareté quant à elle disponible en ligne : la version soviétique de Mary Poppins !
1983 : Mary Poppins chez les Soviets
Bien qu’étant née en Australie, Pamela L. Travers aura longtemps nourri une réelle sympathie pour la Russie. C’est ainsi qu’elle entreprit un voyage à Leningrad, Moscou et Nijni Novgorod en 1932.
Bien qu’elle eut conscience que sa découverte de la Russie staliniste ait été « soigneusement cachée à l’œil vulgaire du touriste », elle relata son expérience en 1934 dans le livre Moscow Excursion – l’année même de la sortie du premier tome des aventures de Mary Poppins.
Rapidement, l’auteure exprima sa volonté de voir traduire son œuvre dans la langue de Dostoïevski, comme elle l’affirma au New Yorker en 1962 : « Mon grand espoir est qu’elle [Mary Poppins] soit traduite en russe. Je sais que je n’ai pas d’accord de droit d’auteur avec la Russie, mais j’ai dit à mon agent “peu importe, laissons-la où les Russes peuvent la voler” ». Mais nous ne l’avons pas laissée trainer assez. Je suppose que les autorités la prendraient au pied de la lettre – elles diraient qu’une gouvernante est une institution bourgeoise –, mais les enfants la comprendraient ».
Son souhait aura été exaucé puisqu’en 1968, le lectorat russe aura pu découvrir la célèbre gouvernante dans une publication en deux parties. Pour l’anecdote, le traducteur Boris Zakhoder aura dû travailler à partir d’un livre loué à la bibliothèque, ne disposant pas lui-même de l’œuvre de Pamela L. Travers ; cette « institution bourgeoise » étant potentiellement censurée à l’époque.
L’adaptation cinématographique de Walt Disney fut cependant présentée hors-compétition au quatrième Festival international du film de Moscou en juillet 1965. Et, si le film ne fut pas projeté dans les salles obscures russes par la suite, des vidéocassettes pirates auront probablement circulé en URSS au cours des années 1980 – à ce sujet, nous vous recommandons vivement le visionnage du formidable documentaire Quand Hollywood défiait Ceausescu, s’intéressant à la diffusion des films pirates dans la Roumanie communiste.
Ainsi, malgré la réalité politique de l’époque, l’ombre de Mary Poppins aura plané au-dessus du ciel soviétique. Suffisamment pour donner lieu à une adaptation en deux parties totalisant 2h15 de spectacle et intitulée Meri Poppins, do svidaniya ! Adaptation ayant immédiatement rencontré le succès, au point que le nom « Mary Poppins » est désormais utilisé en Russie par des agences de babysitting, des cafés, des parcs familiaux ou encore des hôtels.
Interrogé en 2008 sur son travail sur Meri Poppins, do svidaniya, le réalisateur Leonid Kvinikhidze aura déclaré : « Le principal problème fut d’adapter ce film pour notre public. La version originale était américaine. Lorsqu’on m’a proposé de tourner ce projet, je n’ai pas hésité une seconde car j’avais une certaine expérience dans le cinéma musical. Et, étant donné mon amitié avec Maxim Dunaevsky qui a écrit la musique, il ne devait pas y avoir le moindre problème. Mais il y en a pourtant eu. Pendant longtemps, je n’ai pas trouvé d’actrice pour jouer le rôle principal. C’est Maxim qui m’a aidé à en trouver une, en me présentant Natalya Andreichenko ».
Initialement, le rôle de Mary Poppins aura été envisagé pour l’actrice Anastasia Vertinskaya, et non pour Natalya Andreichenko.
À ce sujet, Anna Plisetskaya – l’interprète de Jane Banks – déclara : « Et à toutes les auditions, il y avait Anastasia Vertinskaya, avec qui nous nous sentions très à l’aise, nous la connaissions, puisque ma mère et celle de Filipp [Filipp Rukavishnikov, l’interprète de Michael Banks] étaient amies avec elle ». À son tour, Rukavishnikov déclara : « Oui, nous avons fait un excellent test avec Vertinskaya. Elle m’a semblé être une vraie sorcière, une telle chaleur et une telle attention émanaient d’elle que nous, les enfants, ne pouvions nous empêcher de le ressentir… ».
Nastasia Vertinskaya aura cependant renoncé au rôle suite à des changements dans le scénario lui ayant visiblement déplu. Désistement tardif susceptible de mettre en péril l’intégralité du tournage. La construction des décors avait en effet déjà commencé dans les studios de Mosfilm, tandis que le casting était déjà établi et que le danseur Azary Plisetsky avait donné son accord pour chorégraphier les séquences dansées du film.
Le compositeur Maxim Dunaevsky étant alors marié à Natalya Andreichenko, il provoqua la rencontre entre son épouse et le réalisateur du film, comme ce dernier l’aura plus tard exprimé : « Lorsque Anastasia Vertinskaya a dû renoncer au rôle pour différentes raisons, je suis allé voir Dunaevsky. Il a proposé Andreichenko avec qui nous avions étudié à VGIK [Institut National de la Cinématographie situé à Moscou] ».
En 2009, Leonid Kvinikhidze déclarait à un magazine russe : « Nous nous sommes assis, avons parlé, discuté de ce qu’il fallait faire maintenant ». Ajoutant : « Et puis Maxim s’est assis au piano et a commencé à jouer ‘Lady Perfection’, et Natalya a commencé à chanter. Je lui ai demandé de chanter toute la chanson et j’ai aimé la façon dont elle a joué le rôle et l’a interprété. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de l’inviter pour mon film ».
Notons cependant qu’un an plus tôt, le réalisateur tenait un autre discours dans les pages d’un autre magazine : « Pour être honnête, elle ne chantait pas très bien. Mais la façon dont elle a joué la chanson était respectable. Il ne restait plus de temps pour les répétitions, nous avons été confrontés au Ministère de la Culture : “Vous avez deux semaines pour trouver votre personnage principal, ou nous annulons le film”. Les costumes étaient déjà cousus et le décor peint ».
C’est ainsi que Natalya Andreichenko devint Mary Poppins. Ou presque… Leonid Kvinikhidze ayant encore quelques réserves concernant celle-ci ! « En voyant Natalya jouer brillamment la chanson, déclara-t-il, j’ai dit : “C’est dommage que tu sois russe et non pas une beauté anglaise”. Et elle a rétorqué : “C’est bon, je peux devenir une Lady”. J’ai dit : “Comment ? Pour cela il faudrait que tu perdes vingt kilos !” À cette époque, Natalya était enrobée. Je ne sais pas comment elle a fait, mais en une semaine, elle a perdu vingt kilos et est devenue une vraie Lady ».
Cependant, si Andreichenko est devenue le visage russe de Mary Poppins, il n’en fut pas de même pour sa voix… En effet, comme prévu dès l’origine du projet, celle-ci aura été doublée par la jeune chanteuse Tatyana Voronina dans toutes les parties chantées du film ; Tatyana Voronina ayant quant à elle été choisie car sa voix correspondait à celle de Nastasia Vertinskaya, l’actrice originellement pressentie pour incarner Mary Poppins.
Le changement de casting octroyant le rôle principal à Natalya Andreichenko aura posé un problème de taille à la production ! En effet, six chansons de la bande originale avaient déjà été enregistrées au moment où Nastasia Vertinskaya renonça au rôle de Mary Poppins et où celui-ci atterrit entre les mains de Andreichenko. Il était donc trop tard pour trouver une nouvelle interprète et réenregistrer l’intégralité de la musique…
Néanmoins, comme elle avait su métamorphoser son corps pour obtenir le rôle de la célèbre gouvernante, Natalya Andreichenko promis de travailler sur sa voix légèrement grave afin de la rendre plus aiguë et de coller à la voix de Natalya Voronina. Ce qu’elle parvint à faire sans grande difficulté, au vu du résultat final !
Pour l’anecdote, Tatyana Voronina était l’épouse de Pavel Smeyan qui s’occupait quant à lui de chanter la partie masculine de l’acteur Lembit Ulfsak – interprétant le personnage de Mister Hey. Voronina aura en réalité accompagné son époux à l’audition, avant de se voir proposer d’auditionner elle-même, devenant ainsi la doublure vocale de Mary Poppins.
Peu de temps avant son décès à l’âge de 52 ans, Pavel Smeyan sera revenu sur cette expérience : « Ce travail m’a apporté la plus grande joie, parce qu’il a traversé le temps et les générations : les adultes d’aujourd’hui sont les enfants d’hier. Et quand ils me rencontrent, ils disent qu’ils ont vu ce film dans leur enfance et ont grandi avec ma musique. Et j’ai immédiatement l’impression d’avoir 90 ans, une sorte de vieil homme. Mais c’est bien. Ce travail continue de vivre aujourd’hui ».
« Nous n’avions aucun doute sur son succès à l’époque, continue-t-il. Le succès était inévitable. Parce que la musique elle-même était belle. Pas seulement la chanson “Intempéries” (Непогода ). Il y a aussi “Lady Perfection” (Леди Совершенство ). Puis la dernière chanson en particulier, “Le vent du changement” (Ветер перемен), est très bonne. Et puis il y a “33 vaches” (33 коровы ), que toutes les crèches et les jardins d’enfants connaissent, je suppose. L’ensemble est rempli de musiques merveilleuses ».
Quoi qu’il en soit, l’actrice Natalya Andreichenko aura pris son rôle très au sérieux, que ce soit en perdant du poids, en adoucissant sa voix, ou même en s’investissant dans les chorégraphies au point de se déchirer les ligaments de la jambe droite : « Si on nous a donné beaucoup de temps pour répéter le premier épisode de danse et qu’Azary Plisetsky et moi avons travaillé chaque mouvement en détail, d’autres ont été chorégraphiés en très peu de temps, parfois en une heure et demie ! Beaucoup de choses étaient basées sur l’improvisation. Je voulais répéter davantage. Et ils nous ont dit : aujourd’hui ou jamais, car le planning de tournage du film était serré… »
Les médecins auront interdit à l’actrice de danser et même de marcher, afin de permettre à son corps de cicatriser, mais celle-ci aura refusé ces injonctions, bien décidée à achever le tournage. « Seulement si vous regardez bien, admet-elle, sur certaines images, vous pouvez voir que je boite légèrement… ».
À l’inverse, pour Anna Plisetskaya – l’interprète de Jane Banks –, les chorégraphies étaient ce qu’il y avait de plus facile, celle-ci étant issue de l’académie de ballet Vaganova située à Saint-Pétersbourg. Elle aura alors parfois elle-même été jusqu’à chorégraphier ses propres scènes, notamment celle où elle danse sur un ponton avec une statue de pierre ayant pris vie.
Cette dernière aura cependant été surprise par un changement survenu en cours de production ! Dans le film, le personnage de Madame Corrie était joué par la ballerine Ekaterina Maximova. Cependant, celle-ci dû s’envoler urgemment pour les États-Unis, laissant l’équipe livrée à elle-même et contrainte d’engager une autre ballerine afin de terminer ses scènes. C’est ainsi qu’à la fin du film, Ekaterina Maximova aura cédé la place à la ballerine du Bolchoï Marina Nidga.
Le réalisateur Leonid Kvinikhidze sera plus tard revenu sur ce contretemps en interview : « Pour parler franchement, elle nous a abandonnés – elle n’a pas compris que le cinéma était une affaire sérieuse. Et donc quand la nouvelle ballerine est apparue dans le cadre avec les enfants, ils ont crié : “Pourquoi avez-vous tant changé ? Vous êtes tellement vieille”. Nous avions oublié d’avertir Fil et Anya qu’une autre actrice était devant eux. On peut voir ça à la fin du film, au moment du départ de Mary Poppins ».
Quoi qu’il en soit, et malgré tous ces écueils, Meri Poppins, do svidaniya aura rencontré le succès auprès du public. Succès inattendu pour Leonid Kvinikhidze qui avait destiné son film aux adultes, sans réaliser l’impact considérable qu’il aurait auprès des enfants.
Concernant ce succès, Natalya Andreichenko déclara : « Au début, je n’ai pas vraiment apprécié le film. Mais maintenant je comprends que ma vie a changé après lui. J’ai tout simplement eu une chance incroyable d’avoir eu l’opportunité de jouer dans un tel film et dans un tel rôle. Après tout, Mary Poppins est une créature étonnante. C’est le lien entre nos générations. Elle semble traduire le langage des adultes dans le langage des enfants, et vice versa ».
S’il a de quoi surprendre le spectateur occidental, particulièrement habitué à l’adaptation produite par Walt Disney en 1964, Meri Poppins, do svidaniya est un film qui possède de solides qualités qui l’auront subtilement distingué de son prédécesseur américain. À commencer par la somptueuse bande originale de Maxim Dunaevsky : moderne, surprenante et merveilleusement orchestrée. On appréciera ainsi particulièrement le thème musical ouvrant le film et soulignant toute la délicatesse de cette histoire, autant que la puissance évocatrice de Mary Poppins.
Miracle des technologies modernes, ce disque est aujourd’hui entièrement disponible sur YouTube, tandis que l’on peut également trouver çà et là quelques traductions de chansons, comme la très jolie « Lady Perfection », réinterprétée en anglais par la chanteuse Elmira Terkulova.
Vient ensuite la réalisation de Leonid Kvinikhidze, offrant quelques choix esthétiques réellement inspirés ainsi que de belles idées de mise en scène. Tandis que le tournage en studio, surprenant au premier abord, permettra de mesurer à quel point le monde de la famille Banks est fermé, et à quel point la venue de Mary Poppins changera la réalité des personnes peuplant ce microcosme.
Ainsi, du cinéma noir et blanc à la Russie soviétique, Mary Poppins aura continuellement volé à travers le Septième Art sans jamais cesser de faire rêver petits et grands !
Et pour les plus courageux, désireux de tester leur connaissance de la langue russe, vous pourrez retrouver les deux parties de Meri Poppins, do svidaniya sur YouTube :
Bibliographie
Concernant Studio One et le Mary Poppins de 1949
- Tim Brooks and Earle Marsh, The Complete Directory to Prime Time Network and Cable TV Shows, 1946-Present, Neuvième édition, New York, Ballantine Books, 2007.
- Valerie Lawson, Mary Poppins She Wrote: The Life of P. L. Travers, New York, Pocket Books, 1999.
- Steve Taravella, Mary Wickes. I know I’ve seen that face before, Jackson, University Press of Mississippi, 2013.
Concernant Meri Poppins, do svidaniya
- Ирина Данилова (Irina Danilova), Наталья Андрейченко — танцы на одной ноге [En ligne], 20 août 2009, (Page consultée le 17 novembre 2024, Dernière mise à jour non communiquée).
- Sergey Ivanitsky, КИНОРЕЖИССЕР ЛЕОНИД КВИНИХИДЗЕ:«Болезнь очень изменила борисова. Олег стал не просто грустным — он почувствовал себя обреченным» [En ligne], 1er décembre 2008, (Page consultée le 17 novembre 2024, Dernière mise à jour non communiquée).
- Elena Goodwin, Translating England into Russia. The Politics of Children’s Literature in the Soviet Union and Modern Russia, London – New York, Bloomsbury Academic, 2020.
- Радио России, « Мюзик-холл »: памяти Павла Смеяна [En ligne], 15 juillet 2009, (Page consultée le 17 novembre 2024, Dernière mise à jour non communiquée).