Femmes prêtres : vocations interdites
Réalisatrice : Marie Mandy
Genre : Documentaire
Nationalité : Belgique
Date de diffusion : 5 décembre 2024
Tandis que l’Église catholique traverse aujourd’hui une crise de grande ampleur et que les récents propos du pape François concernant l’avortement auront créé un tollé, poussant plusieurs centaines de personnes à demander la débaptisation, la réalisatrice Marie Mandy livre aujourd’hui une fascinante plongée dans le monde des femmes prêtres. Ou plutôt dans la lutte des femmes pour s’imposer au sein de l’Église et obtenir l’ordination sacerdotale.
« L’Église catholique ne croit pas que les hommes et les femmes soient égaux. Ils disent que nous sommes égaux en dignité. Mais nous ne sommes pas égaux en droits et en rôles. Ils n’ont pas de femmes, ils n’ont pas de filles. C’est le patriarcat le plus radical au monde parce que vous avez une petite élite d’hommes qui n’a aucune connexion avec les femmes ».
C’est sur ces propos de la théologienne américaine Jamie Manson que Femmes prêtres : vocations interdites s’ouvrira, cédant ensuite la place à plusieurs intervenantes d’âges et d’origines différentes, toutes venues livrer leur témoignage, leur expérience et, par là-même, leur exemple. Mais toutes unies par un même idéal consistant à questionner la ligne de conduite exposée par le pape Jean-Paul II dans son Ordinatio Sacerdotalis du 22 mai 1994, à savoir « que l’Église n’a en aucune manière le pouvoir de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes ». Ligne de conduite depuis lors rigoureusement observée par les papes Benoît XVI et François Ier.
Au-delà de la question herméneutique consistant à savoir si, par exemple, Marie-Madeleine aura réellement été « l’apôtre des apôtres » et si les femmes peuvent dès lors revêtir le sacerdoce ou non, ce débat sociétal offrira un parallèle historique avec les premiers Chrétiens, pratiquant leur culte dans le secret des Catacombes.
Ayant accédé à la prêtrise dans la plus grande discrétion, les diverses intervenantes nourriront alors le film de leurs expériences et de leurs frustrations personnelles.
Femmes prêtres s’attachera ainsi – entre autres choses – à présenter les « Sept du Danube » : sept femmes ordonnées le 29 juin 2002, puis excommuniées le 21 décembre de la même année. Deux d’entre elles, Christine Mayr-Lumetzberger et Gisela Forster, étant par la suite devenues évêques, ordonnant à leur tour d’autres femmes aux États-Unis, au Canada, en France avec la lyonnaise Geneviève Beney, ou en Espagne avec Christina Moreira qui interviendra à son tour pour partager son expérience personnelle.
L’apport de cette dernière étant particulièrement enrichissant, tout en permettant un glissement sur le terrain inattendu de l’amour et du mariage, Christina Moreira étant elle-même mariée à un prêtre : « Le fait de vivre l’amour à deux, de partager la vie, ça nous donne des racines dans la matière, dans l’existence vraie, dans la société, dans le réel pour être crédibles quand on parle d’amour aux autres », dira-t-elle.
Au-delà de tout le versant religieux, la quête de ces femmes semblera alors être une recherche d’authenticité et d’expérience de vie lorsqu’il s’agit d’établir un dialogue avec les fidèles.
Ainsi, Femmes prêtres : vocations interdites offre une plongée dans une lutte féministe peu commune et relativement méconnue du grand public, donnant à voir des femmes fortes, calmes, posées, réfléchies et patientes, sachant faire briller leur lumière depuis l’ombre dans laquelle elles sont actuellement contraintes d’exister. Un documentaire qui soulèvera divers questionnements humains, sociétaux et philosophiques particulièrement intéressants, tout en rappelant à sa façon ce que Stendhal écrivait en 1826 dans son « Rome, Naples et Florence », à savoir que « L’admission des femmes à l’égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la civilisation ».