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    Les Jours de mon abandon, Gaia Saitta sublime la douleur d’Olga

    Olga, Napolitaine de 40 ans, est mariée à un ingénieur avec qui elle a eu deux enfants. Très attachée à son mari, elle est totalement bouleversée par son départ. Il la quitte pour Carla, une femme plus jeune. Sur scène, l’appartement familial se déploie : salon, salle à manger, salle de bain, chambre, tout est visible grâce à un subtil décor métallique. Le drame semble banal, une séparation comme tant d’autres. Pourtant, Gaia Saitta, metteuse en scène et actrice, confère une telle dimension dramatique à la pièce qu’elle en devient captivante du début à la fin. Ce spectacle est également politique : en tant que féministe, l’actrice et metteuse en scène dénonce la condition de la femme, reléguée à un rôle secondaire dans une société patriarcale, et complètement désemparée lorsqu’elle est abandonnée par son conjoint. Un spectacle passionnant.

    L’imposant décor ressemble réellement à un appartement. Olga est déjà présente sur scène – n’est-elle pas chez elle ? – à l’arrivée du public. Elle choisit quelques spectateurs et leur propose de s’asseoir sur scène, des chaises ont été prévues à cet effet. Le théâtre de Gaia Saitta est participatif. À plusieurs reprises, elle fait judicieusement intervenir quelques volontaires.

    Cette mère parfaite, aimante, va peu à peu perdre pied. Progressivement, elle ne supporte plus le comportement de ses enfants : « J’en ai marre de vous. » On ignore où cette descente aux enfers va s’arrêter, et on craint le pire. L’angoisse est palpable. Pourtant, elle est consciente de sa situation : « J’ai tout fait pendant qu’il devenait Monsieur l’ingénieur. » Élevée dans une famille patriarcale, elle a reproduit le schéma classique où la femme occupe un rôle secondaire. Elle aurait voulu être écrivaine et raconter des histoires de femmes puissantes, mais elle est femme au foyer. Son mari, qu’elle encensait, n’est finalement qu’un homme banal.

    La mise en scène spectaculaire, la participation du public, l’aspect de tragédie italienne et le message féministe sont autant d’éléments qui font de cette création une réussite. Difficile de ne pas être scotché par la proximité avec cette famille déchirée, par cette descente aux enfers si bien représentée, par ce drame qui se joue sous nos yeux. La fin est peut-être un peu soudaine et rapide, un dénouement inattendu qui aurait mérité d’être prolongé. Néanmoins, cette adaptation du roman éponyme d’Elena Ferrante mérite vraiment d’être vue.

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