Texte de Michel Bellier, mise en scène de Joëlle Cattino, avec Anne Sylvain, Valérie Bauchau, Céline Delbecq, Blanche Van Hyfte.
Du 5 novembre au 13 décembre 2014 à 20h30 au Théâtre Le Public
En 1914 les femmes voient les hommes partir à la guerre et la société française se retrouve pour la première fois en grande partie féminine. La vie poursuit son cours et en attendant que cette courte guerre se finisse, on appelle les jeunes hommes et les plus vieux dans les usines, puis tous ceux qui n’étaient jusqu’ici pas reconnus aptes au travail. Or, comme on le sait depuis, cette guerre dure plus longtemps que prévu, et les munitions commençant à manquer, les ouvriers manquent aussi. Devant cette impasse, on fait alors appel aux dernières mains ouvrières, alors jugées inenvisageables : les femmes.
Accompagnées d’un violoncelliste, les personnages de Jeanne, Rose, Julie et Louise nous plongent dans le quotidien qu’elles découvrent. Ces femmes qui fabriquent de quoi tuer les allemands et arrêter cette guerre, qui ne fait que se poursuivre. Toutes femmes avant d’être ouvrières, il y a la doyenne qui hait les « boches » parce que, parait-il qu’ils mangent leurs enfants. Il y a celle qui n’a jamais rien appris ; ni à lire, ni à écrire, ni à penser par elle-même. Celle qui ne pensait pas qu’une femme pouvait être libre. Et la jeune féministe qui, sortant de l’usine, s’en va aux réunions de femmes.
En cette période de centenaire, quoi de mieux que de rafraîchir la mémoire aux anti-féministes primaires et dangereux pseudos-philosophes qui nous matraquent une différenciation des sexes soit-disant naturelle et indépassable. Parce que, quand il n’y avait plus d’hommes pour travailler, et que l’on a dû envoyer les femmes aux usines, et aux postes les plus physiques, on s’est rendu compte que c’était possible, et que les ouvrières n’étaient pas moins capables que les ouvriers. Seulement, dès la fin de la guerre, on s’est empressé d’oublier cette période quelque peu fâcheuse pour la pérennisation du patriarcat.
Les Filles aux mains jaunes nous ravivent la mémoire, nous émeuvent, nous font vibrer avec elles, mais sans jamais tomber dans le pathos ou l’acharnement. Les quatre comédiennes nous embarquent par leur complémentarité et le plaisir qu’elles semblent prendre sur scène, allant du comique au drame, en passant par des sentiments de révolte et d’optimisme. En bref, c’est un spectacle qui, à partir d’un sujet pas facile et trop méconnu, nous transmet de nombreuses émotions. Un beau moment à vivre et à faire vivre à ses ami(e)s, et aussi à tout le monde.