Arturo Brachetti est devenu, en l’espace de trente ans, le maître du transformisme. Illusionniste hors pair, l’homme a décidé de présenter son Comedy Majik Cho à Bruxelles après avoir enchanté petits et grands à Montréal et à Paris.
L’originalité de ce rendez-vous à ne manquer sous aucun prétexte : réunir plusieurs styles de magie différents dans un show grandiose et admirable.
Rencontre avec l’homme aux milles visages, Arturo Brachetti.
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Comment vous est venue l’idée de présenter un spectacle avec plusieurs magiciens et non un one man show comme vous en aviez l’habitude ?
Faire un one man show c’est très bien, mais j’aime surtout l’idée de partager la scène avec d’autres magiciens. C’est intéressant car ceux-ci viennent avec des numéros que je suis incapable de faire comme, par exemple, Laurent Beretta qui se libère d’une camisole de force.
Au départ, le Comedy Majik Cho devait seulement être présenté à Montréal. Mais finalement, nous l’avons emmené à Paris et cela a été un grand succès.
Est-ce une histoire complète ou une succession de numéros ?
Il y a un fil conducteur. Un jeune élève en magie prénommé Luca – qui est mon véritable élève d’ailleurs – va passer son examen pour être intronisé. Mais pendant son attente, il va être pris en charge par différents magiciens dont Vincent C, qui n’est autre que mon rival. Vincent C est un jeune adolescent attardé qui fait de la magie trash comme faire exploser une colombe. Totalement le contraire de ce que je fais.
C’est dès lors une histoire et pas seulement une série d’effets visuels.
Dès lors, gardez-vous l’idée du transformisme dans ce spectacle ?
Oui, totalement. J’incarne de nombreux personnages et je me change une vingtaine de fois. Je fais un numéro sur la magie où je deviens Mandrake, Houdini, Merlin et bien d’autres.
Toutefois, je fais d’autres numéros comme de la peinture sur sable, qui est une nouvelle technique encore peu utilisée mais que les gens adorent.
Avez-vous choisi les magiciens qui participent à ce spectacle ?
Oui, à commencer par Luca Bono, mon véritable élève. À l’époque, je l’avais vu à l’école de magie de Turin. La première fois que je l’ai aperçu, je me suis tout de suite vu au même âge, c’est-à-dire extrêmement timide.
C’est un travailleur qui écoute les conseils. C’est pourquoi nous avons commencé à travailler ensemble. Depuis, il a gagné le Mandrake d’or et a franchi de nombreuses étapes. Je suis très content aujourd’hui de pouvoir l’intégrer dans ce spectacle.
Puis, il y a Luca & Tino qui forment un duo comique italien. Ce qu’ils font est à la fois visuel et drôle. Ils utilisent des techniques qui ont parfois cinquante ou quatre-vingt ans, mais j’y tiens beaucoup.
Les autres, ce sont des choix établis avec le metteur en scène Serge Denoncourt qui a réussi à manipuler nos différents personnages mais aussi nos différents numéros pour avoir une soirée cohérente.
On le sait, vous êtes fortement influencé par le cinéma. Au regard de l’affiche, on ne peut s’empêcher de penser à Tim Burton. Dès lors, le Comedy Majik Cho voyage-t-il dans cet univers ?
Effectivement, nous avons fait une affiche burtonienne mais le spectacle n’est pas comme cela. Cela donne une idée magique mais ce n’est pas la même magie que nous présentons dans le spectacle.
Dans le Comedy Majik Cho, on rit plus que l’on rêve. Ce n’est donc pas burtonien même si Tim Burton reste l’une de mes idoles. J’ai d’ailleurs créé un numéro de peinture sur sable axé sur son univers, mais il ne se retrouve pas dans ce spectacle-ci.
Est-ce qu’il est difficile d’amener du transformisme dans un show présentant des numéros spectaculaires comme celui des lasers par exemple ?
Non, parce que ce n’est pas pareil. Ce n’est pas la même magie.
Le transformisme relève du fantasme commun, pas le laser. Tout le monde dans sa vie rêve un jour d’être dans la peau d’Obama ou d’Angelina Jolie. Un des dons magiques de Jupiter était la métamorphose.
Est-ce que Vincent C, que l’on peut voir dans Fort Boyard notamment, incarne pour vous une nouvelle génération de magiciens ?
Tout à fait. Il a un ton plus trash et décalé.
Aujourd’hui, on regarde tous avec un certain sadisme des compilations de gens qui se font mal. Comme si l’accident n’existait plus et qu’il devenait drôle. Les gens s’habituent à voir des choses trashs. Dès lors, cela fonctionne dans la magie également.
Néanmoins, la magie reste toujours la même. À l’époque, on faisait disparaitre un paquet de cigarettes et aujourd’hui, on fait disparaitre un iPhone. C’est exactement la même technique.
La magie reste avant tout du « miss direction » ou détournement de l’attention. Un jeu dans lequel le public aime se retrouver quelle que soit l’époque.
Vous l’avez dit, vous donnez des cours de magie, mais faites-vous également passer l’art du transformisme ?
Non. En 1979, j’étais le seul au monde à faire cela. Puis, avec le temps, on a commencé à me copier.
C’est ridicule car ils copient le software et non le hardware. J’ai fait de la transformation parce que c’était un besoin que j’avais à l’époque pour me sortir de ma timidité. Je voulais me déguiser et aller sur scène pour me sentir quelqu’un.
Si maintenant tu es gros et que tu vas faire du transformisme sur scène, cela ne donnera rien du tout. Pareil lorsque quelqu’un reprend l’hymne à l’amour de Piaf.
Pour que cela fonctionne, il faut que l’artiste amène son âme sur scène. Je dis souvent qu’un véritable artiste amène ses propres merdes sur scène. C’est avec ça qu’il devient vrai et donc attachant.
Le Comedy Majik Cho viendra les 13 et 14 décembre au Forum de Liège, et les 15 et 16 décembre au Cirque Royal de Bruxelles.