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    « Longlegs », retour du meme

    Longlegs
    d’Oz Perkins
     Epouvante-horreur, Thriller
    Avec Maika Monroe, Alicia Witt, Nicolas Cage
    Sortie en salles le 10 juillet 2024

    Portée aux nues depuis des années par une communauté internet avide de détournement à des fins humoristiques, le jeu extravagant et survolté de Nicolas Cage est peu à peu devenu un argument commercial sur lequel capitalisent de nombreux films. Qu’on pense aux récents Dream Scenario (Kristoffer Borgli, 2024), The Unbearable Weight of Massive Talent (Tom Gormican, 2022) ou encore à Renfield (Chris McKay, 2023), tous exploitent la veine outrancière de l’acteur et font le pari de sa contamination étendue à l’ensemble du film. Si de mémoire récente le très beau Pig (Michael Sarnoski, 2021) parvenait à bâtir sur cette persona un thriller culinaire à la mélancolie inattendue, Longlegs fait lui à nouveau symptôme du devenir meme de la carrière du neveu Coppola.

    Le comédien y interprète l’assassin qui donne au film son titre, personnage grotesque au visage boursouflé par la chirurgie esthétique et à l’hygiène douteuse, qui assassine des familles selon une logique occulte. Principale attraction du film, Perkins retarde au maximum l’apparition de la star qui n’advient vraiment que dans le dernier tiers du récit. Les deux premiers sont ainsi consacrés à sa traque par l’agent Lee Harker, nouvelle recrue du FBI dotée de pouvoirs médiumniques. Socialement inadaptée, inapte au dialogue, elle est fréquemment isolée dans des plans larges qui font d’elle la proie d’un tueur en série omniscient, menace invisible qui plane dans l’obscurité. Redoutée par le personnage principal, attendue par le spectateur : la venue de Longlegs/Nicolas Cage est sciemment employée par le cinéaste comme moteur du suspense.

    En situant son intrigue dans l’Amérique périurbaine des années 1990, le réalisateur réactive une paranoïa du serial killer qui postule ainsi l’idée qu’il existerait de notre monde une doublure secrète, occulte et cryptée, qu’il faudrait apprendre à décoder. Malheureusement, le scénario de Perkins ne brille pas par son originalité et ne fait qu’aligner un ensemble de poncifs allant de la possession démoniaque à la poupée maléfique, en passant par la figure de Baphomet. Empêtrée dans une accumulation de signes, l’intrigue progresse laborieusement et enchaine de longs tunnels de dialogues explicatifs. Il aurait sans doute fallu un duo d’acteur·ice·s à la hauteur de Jodie Foster et Anthony Hopkins dans Le Silence des agneaux (Jonathan Demme, 1991), ou la précision formelle d’un Fincher dans Zodiac (2007), pour rendre ce travail d’enquête réellement palpitant.

    Ce n’est que lorsque le personnage de Nicolas Cage entre en scène que le film s’emballe et espère s’approprier un peu de sa folie. À ce titre, il est intéressant de remarquer que sa présence à l’écran se fait principalement sur le mode de l’interrogatoire filmé face caméra, entérinant le comédien comme objet d’étude et de fascination. Lors de ces séquences, la mise en scène et le récit semblent se retirer pour laisser les commandes à Cage (qui produit le film par ailleurs) qui pirate véritablement le film et se donne en spectacle, avec l’absence de limites qu’on lui connait. Longlegs s’efface au profit d’un générateur de meme épuisant, ce que confirme – sans doute à son corps défendant – une  scène dans laquelle les enquêteurs visionnent les rushs de ces entretiens sur un poste de télévision. Filmés de dos, hypnotisé par le numéro de l’acteur, leur position redouble la nôtre en même temps qu’elle prophétise la viralité numérique de la performance de Cage. Le dernier plan du film, clin d’oeil littéral du comédien adressé au spectateur, achève de précipiter la diégèse aux oubliettes et de ramener à la surface son fond méta et racoleur.

    Arthur Bouet
    Arthur Bouet
    Journaliste

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