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    [BIFFF 2024: jour 3]: de la boucherie, du LSD et des courts…

    The Belgian Wave, retour sur la vague d’apparition d’OVNI dans les années 90

    Au début des années 90 le journaliste Marc Vaerenbergh disparait mystérieusement alors qu’il documente la vague de phénomènes d’OVNI qui apparait depuis quelques années dans le ciel belge. Karen, la fille du cameraman de Marc qui était présent lors de sa disparition, décide d’enquêter sur l’affaire trente ans plus tard. Pour ce faire elle retrouve l’artiste et graphiste Elzo Durt, gros fêtard et amateur de LSD. L’intrigue est posée et c’est parti pour une enquête qui part dans tous les sens, entre une notaire à deux doigts du burn out le jour de son anniversaire, une secte de producteurs de kombucha bobo qui aime effectuer des sacrifices et un voyage en Amérique latine dans une tribu aux allures chamaniques. Tout ça pour retrouver les images filmées par Marc et son cameraman au moment de sa disparition, en rencontrant une galerie de personnages tous plus farfelus les uns que les autres et qui offrent parfois des scènes dont on se demande pourquoi elles sont présentes dans le film.

    The Belgian Wave n’épargne rien au spectateur. Il ne leur épargne malheureusement pas non plus les longues scènes aux effets psychédéliques de prise de LSD de Elzo, ni la bande son oppressante. Le film est saturé en couleurs, souvent dans les tons rouge et vert, assez plaisant dans la premier partie du film mais qui devient par la suite de trop, laissant au spectateur une impression de facilités visuelles pour combler un scénario qui part dans tout les sens et une fin longue mais sans vraiment de dénouement satisfaisant. Le film couple son histoire avec des images d’archives de témoins ayant vu les OVNI dans les années 90.

    The Belgian Wave est définitivement un bon film pour les amateurs du BIFFF, la séance étant sold out et le film à  d’ailleurs été applaudit à la fin de sa projection, mais il faut être prêt à encaisser une heure trente de couleurs, des scènes de montée de LSD avec gros plan sur les visages des acteurs et du son, vraiment beaucoup de son. Définitivement à regarder à tête reposée et sans mal de tête.

    Devils, un Face-off aux amphétamines

    On se souvient tous de Face/Off, un sympathique thriller de 1997 où Nicolas Cage et John Travolta s’échangeaient leur visage pour mieux démasquer un dangereux criminel. Autre temps, autres mœurs, 25 ans plus tard, Jae-Hoon Kim nous propose un scénario similaire, où les deux protagonistes, un policier et un tueur en série changent de corps. BIFFF oblige, le film nous est livré avec un peu plus de sang et de violence que l’original, de quoi nous interroger sur sa pertinence.

    Lorsque l’inspecteur Choi Jae-hwan est sur le point d’appréhender Jin-hyuk, le cerveau d’un réseau de snuff movies après une course-poursuite endiablée, les deux hommes disparaissent dans un ravin. Un mois plus tard, alors que les recherches sont au point mort, une voiture s’écrase sur le poste de police, avec les deux lascars inconscients et menottés à l’avant. Incident marquant le début d’une nouvelle chasse à l’homme… car lorsque l’inspecteur Choi reprend conscience et se regarde dans le miroir, il voit le visage du tueur qu’il vient d’arrêter… Et le tueur ? Il se présente fièrement comme l’inspecteur Choi, dans son corps, se fait féliciter par ses collègues et rentre chez lui, impatient de retrouver sa petite famille…

    Interrogées sur leurs critères pour juger les films dans la catégorie Black Raven, les trois membres du jury – qui, dédicace à ma collègue Elodie, chantent très bien Le Roi Lion – nous ont parlé d’émotions, de retournements de situation et de portes ouvertes… Mission remplie pour Devils qui tient en haleine les spectateurs durant deux heures. Toutes les émotions en effet y passent, de la surprise à la peur, du dégoût à une certaine déception en voyant la scène finale, le film ne laisse aucun temps pour reprendre son souffle. D’autant plus que, contrairement à Face/Off, le tour de magie concernant l’échange d’identité est beaucoup plus élaboré, et précaire… ce qui provoque de nombreux retournements de situation.

    En plus d’un scénario particulièrement réfléchi – hormis le dénouement final – le jeu d’acteur est également à la hauteur des attentes, ce qui pourrait nous faire dire que ce Devils est un film particulièrement réussi.

    Là où l’on peut émettre une réserve– voir mon interrogation ci-dessus – c’est sur le degré de violence proposé dans le film. Le cinéma sud-coréen – que l’on pense à la trilogie de Park Chan-Wook – n’a jamais été avare de violence et a toujours été extrêmement ouvert à parler des sujets les plus clivants, sans censure. Et même si, une fois le recul nécessaire pris, on réalise que Devils aborde des thèmes essentiels, comme la frontière entre le bien et mal de manière générale et en particulier la question des limites à poser pour ne pas tomber soi-même dans un cycle de violence destructrice, on reste perplexe sur l’ajout de certaines scènes particulièrement glauques. Cela n’enlève rien aux qualités du film, mais laisse néanmoins un goût étrange dans la bouche à la sortie.

    Atteindre la maestria de Park Chan-Wook n’est pas chose aisée, surtout si l’on sait qu’il s’agit du premier film du réalisateur. Celui-ci possède néanmoins toutes les qualités pour nous proposer d’excellents films à l’avenir.

    Courts-métrages internationaux

    Déjà, avant tout, sachez que contrairement aux synopsis qu’on trouve sur le site du festival, je ne vous dévoilerai absolument rien de trop de ces six courts qui sont en lice pour la compétition internationale. À la décharge de celui ou celle qui a fait ça, c’est délicat de résumer un court. Autant un long, on peut toujours se dire que le premier tiers expose, mais, dans un court, le premier tiers doit exposer et exploser, et ce, sur la même ligne du temps. Alors, est-ce qu’on a eu de l’exposition et de l’explosion ?
    Suivez-moi !

    Shé (Snake) de Renee Zhan.

    Fei est violoniste dans un orchestre de jeunes privilégiés, elle est la meilleure jusqu’au moment où Mei, une autre violoniste, arrive et la bouscule dans son brio. Mei la bouscule tellement que d’étranges bêtes vont sortir d’elle.
    C’est visuellement marquant ; Beetljuice ne renierait pas certaines scènes.

    Home de Jeong Jaehee.

    Une femme tri les affaires de sa mère défunte. Dans la maison qu’elle habite encore, là où sa mère est morte (je répète, là où sa mère est morte.), elle fait face à des phénomènes flippants.
    Le travail sur la lumière et les bruits d’ambiance confère vraiment à ce court une atmosphère bien pesante comme on aime.

    Feeder de Andrzej Danis.

    Ziggy est boulimique et refuse de se faire hospitaliser. Pourtant, avec la chose qui semble tordre son ventre, ce serait une bonne idée.
    La fin va vous surprendre. Et ce n’est pas une phrase racoleuse. Entre romance et gore, du doux là où on l’attend et là où on ne l’attend pas.

    The Thaw de Sarah Wisner et Sean Temple.

    Quelque part dans le Vermont, (il paraît.), une jeune femme revient chez ses parents, en plein hiver. Les vivres vont manquer alors pour que leur fille survive, les parents décident de rentrer dans un long sommeil.
    Un joli noir et blanc strié d’une ambiance sonore saturée qui prendra malheureusement le pas sur l’histoire qui avait de l’intérêt.
    Mention spéciale pour le sur jeu du père.

    The Lady in White de Angkasa Ramadhan.

    Une cérémonie de fiançailles est frappée d’un mauvais présage. Pour contrer le sort, la jeune fiancée se rend chez sa grand-mère pour y faire une offrande.
    Envoûtant et libérateur. Une pépite qui sent bon les rituels, la force et la vengeance.
    On apprécie les tonalités chaudes des images et le swag de la grand-mère qui en impose avec peu.

    Transylvanie de Rodrigue Huart.

    Ewa est une jeune fille étrange et solitaire qui est convaincue d’être un vampire (là, avec le titre, je ne crois pas vous spoiler quoi que ce soit.).
    Mention spéciale pour la comédienne Katell Varvat qui illumine l’écran et l’histoire.

    Rendez-vous le 19 pour la partie 2 de ce concours que j’attends avec plaisir. Déjà, parce que j’aime ce qui est court et percutant. Ensuite pour le public. Le public des courts est un public plus discret, tempéré, moins prompt à beugler une blague, moins prompt à étaler sa culture biffesque, c’est un public qui repose. Si vous êtes fatigué du public des longs, rejoignez le public des courts et profitez d’une séance allégée.

    Point chant  néant/10, je suis un peu déçue, mais, bon, au moins, Stéphane était excellent comme toujours.

    Vincent Penninckx
    Vincent Penninckx
    Responsable BD

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