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    Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan

    Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan
    de Martin Bourboulon
    Aventure, Historique
    Avec François Civil, Vincent Cassel, Romain Duris
    Sorti le 5 avril 2023

    Dans le Royaume de France en proie à une guerre de religions entre la noblesse catholique et les protestants soutenus par la couronne Britannique, quatre hommes d’épée vont devoir croiser le fer afin de déjouer un complot qui menace la paix du pays. Un film aux nobles ambitions qui ne manque, certes, pas de charme, mais certainement d’un réalisateur animé d’une vision.

    Objectif : succès populaire

    Deux mois après avoir découvert les aventures navrantes du Gaulois teigneux et moustachu en terre du Milieu, voici qu’une nouvelle production estampillée Pathé débarque sur nos écrans, avec toujours pour ambition de rameuter massivement le public en salle. En novembre 2022, Jérôme Seydoux affichait déjà clairement son intention sur la couverture polémique 100% blanche, masculine et zemmourienne de l’hebdomadaire Le Film Français : « objectif : reconquête ! ». Pari perdu, puisqu’après six semaines d’exploitation, Astérix et Obélix : l’Empire du Milieu n’a toujours pas atteint son seuil de rentabilité. La mission d’arracher un succès populaire à un cinéma français essoufflé échoue donc à l’adaptation du célèbre roman d’Alexandre Dumas, portée par Martin Bourboulon, jeune poulain de l’écurie Pathé.

    Mais alors, que vaut ce premier volet des Trois Mousquetaires, sur lequel reposent tant d’espoirs ? Premièrement, un constat s’impose : Jérome Seydoux et son réalisateur n’ont pas à rougir de leur ambition. La facture visuelle du film est excellente et jouit d’une direction artistique soignée. Le budget se retrouve bien à l’écran, et les décors, les costumes, et la lumière respirent l’authenticité. On sent que l’entreprise a bénéficié du savoir-faire des meilleurs artisans du cinéma français. Pour habiter cet univers, la production dépêche un casting all-stars, plutôt à l’aise avec la langue éminemment littéraire de Dumas. Dans le premier rôle, François Civil se donne corps et âme et parvient presque à nous faire oublier sa gouaille de premier de la classe. Comme à son habitude, Vicky Krieps se distingue par son élégance et son jeu en retenue, bien que sa partition ne lui offre que peu d’occasions de briller. Avec ces premiers éléments encourageants, l’optimisme pointe le bout de son nez et l’on est tenté de croire à une franche réussite. Mais, pourtant, quelque chose manque à l’ensemble pour permettre au film de prendre son envol : une âme.

    Un film de producteur

    En effet, malgré tout le soin dont il bénéficie, Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan ne peut échapper à sa nature de projet de producteur. Ce qui nous fait défaut ici, c’est la vision d’un artiste investi, habité par un désir de cinéma. On comprend bien comment Bourboulon se retrouve à la réalisation d’un projet faramineux comme celui-ci, fort de trois films extrêmement consensuels, tous signés sous la bannière Pathé. En simple exécutant, il imprime au film une mise en scène très sage qui joue avant tout la carte de la sécurité. Les scènes se suivent et se ressemblent : plan d’ensemble, champ, contrechamp, transition. Seydoux et son réalisateur reconduisent ici à la lettre le modèle Marvel à la française, distribution saturée et scène post-générique racoleuse inclues.

    En plus d’être exempt de prises de risques, le long-métrage souffre d’un trop grand nombre d’intrigues, certainement destinées à nous prémunir d’un ennui craint comme le diable. Noyés sous les péripéties – une intrigue chasse l’autre –, les enjeux du films paraissent superficiels et glissent sur le spectateur. Le film va vite, avec un montage parfois confus, et la caractérisation des personnages en pâtit malheureusement, à commencer par les mousquetaires du titre dont on peine à comprendre la relation d’amitié qui les unit.

    Sur le plan du divertissement, si les scènes de combat sont bien chorégraphiées, elles sont malencontreusement sacrifiées à une réalisation paresseuse et difficilement lisible. Les affrontements sont presque systématiquement filmés en plan séquence et à l’épaule, dans une volonté d’immersion, qui confine plutôt à la confusion. C’est d’autant plus dommage que le matériau d’origine appelait à une iconisation forte de ses quatre héros, qui méritait mieux qu’une captation brouillonne de leurs exploits guerriers. En lieu de ça, on a le droit à un cache misère pataud qui rappelle le souvenir douloureux des actioners de Paul Greengrass des années 2000.

    Un nouvel espoir

    Quel dommage donc que ce rendez-vous manqué, pour un film dont l’ambition de fabriquer un grand spectacle « à l’ancienne », sans fond vert ni images de synthèses, était plus que louable. Difficile malgré tout de ne pas lui souhaiter le succès, et, surtout, d’être le premier à ouvrir une voie dans laquelle des cinéastes animés d’un profond désir de cinéma auront l’envie de s’engouffrer. Il y a vingt ans, un certain Christophe Gans avait créé la surprise avec son Pacte des Loups, film bien plus personnel et ambitieux qui n’avait malheureusement pas fait école. Il est permis de rêver à ce que des réalisateurs de sa trempe pourrait nous offrir, si Pathé réussissait son pari d’imposer le renouveau du film d’aventure français. Bonne chance.

    Arthur Bouet
    Arthur Bouet
    Journaliste

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