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    « Encore un jour de pluie », pétard mouillé ou roman subtil ?

    Titre : Encore un jour de pluie
    Autrice : Sarah Moss
    Editions : Actes Sud
    Date de parution : 1er juin 2022
    Genre : Roman

    Au bord d’un loch en Ecosse, en été, par un jour de pluie sans fin, des familles anglaises et écossaises sont confinées dans des chalets de vacances défraichis. Bon gré mal gré, les occupants essayent de passer le temps, s’occupent comme ils peuvent et s’observent discrètement. Cette journée maussade fait aussi ressurgir les tracas et les angoisses du quotidien. Et comme si cela ne suffisait pas, il y a ces étrangers qui font la fête comme s’ils étaient seuls et ne dérangeaient pas tout le camping.

    Ce roman de Sarah Moss est une sorte de huis-clos dans un espace ouvert. Pas si éloignés que cela de la civilisation, les vacanciers sont pourtant bloqués au bout d’un loch, auquel une seule route conduit, par cette météo exécrable. Rester à l’intérieur est étouffant, sortir est une épreuve. Ce qui devrait être des vacances, un moment pour souffler pendant l’été, se transforme en jour sans fin, à tuer le temps en contemplant, sa vie, son ou sa partenaire et les voisins.

    Chaque chapitre est dédié à un personnage et compose ainsi une grande galerie : le couple sans enfants, la famille avec de jeunes enfants, celle avec la mère dépressive, le couple usé, les retraités nostalgiques ou encore les ados bloqués avec leurs parents hippies… L’autrice nous place dans le flux de pensées de chaque personnage et la narration évolue par associations d’idées parfois décousues qui permettent pourtant d’en apprendre énormément sur ces personnages, leurs petites faiblesses, leurs mesquineries, leurs anecdotes et leur ras-bol d’un jour sans fin avec lequel il faut composer. Cela tire parfois vers le cynisme ou l’ironie, voire carrément l’humour, comme le chapitre sur Milly qui essaye de simuler un orgasme et de fantasmer sans réussir à lâcher-prise : « soyons un peu présente, hmm, on ne peut pas s’attendre à ce qu’un homme nous fasse jouir si on ne pense qu’aux nanoparticules et aux génocides » (p.60).

    Les flux de conscience ainsi mis à jour rendent le livre vivant, mais aussi très lent. Pourtant, la trame narrative est soutenue par une tension, car sans cesse, les personnages mentionnent ces étrangers qui dénotent dans ce camping et les empêchent de dormir. Cette répétition crée un crescendo et font pressentir un drame au lecteur. Or, une fois le livre fini, même s’il y a bien un événement final, ce dernier se rend compte que la fin n’était peut-être pas le plus important, contrairement aux « portraits intérieurs ».

    Cette conclusion peut mener à deux postures : soit la déception d’avoir lu un roman qui a créé des attentes sans les satisfaire ; soit à jeter un nouveau regard sur le livre, et à réaliser que Sarah Moss nous a raconté « un jour de pluie », l’ennui profond qu’il charrie, qui oblige à se confronter à soi-même et à des angoisses existentielles insaisissables.

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