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    Humaine trop humaine ; certes, mais pas pour tout le monde

    Scénario : Catherine Meurisse
    Dessin : Catherine Meurisse
    Éditeur : Dargaud
    Sortie : 18 novembre 2022
    Genre : Roman graphique

    On ne naît pas philosophe, on le devient. Pour cette sage observation – d’inspiration La Philo pour les Nuls – remercions Catherine Meurisse qui en fait le slogan de son dernier album. Évitons toute confusion ; ici il ne sera pas question de voyage au Japon ou autres divertissements autobiographiques. On va parler sérieusement.

    Sur le principe, aborder les grands penseurs par le biais d’un médium qu’on a souvent injustement considéré comme le parent pauvre de la littérature est une idée excellente. D’autant plus, quand c’est une autrice comme Catherine Meurisse qui s’y colle, ayant fait des codes de la bande dessinée humoristique son cheval de bataille. Après tout, l’association de thèmes complexes à la légèreté d’un dessin simple et accessible, c’est le jackpot de la vulgarisation.

    Plus concrètement, Humaine trop humaine – le titre étant une manière de se moquer du sexisme, tout en faisant un clin d’œil à Nietzsche –  est une compilation de strips de deux pages qui se concentrent sur une parcelle de la pensée d’un auteur, à chaque fois différent. Arendt, Aristote, Camus, de Beauvoir, Deleuze, Heidegger, Hobbes, Marx, Rousseau, et même Don Juan… Catherine Meurisse n’invite pas n’importe qui dans ses bulles. Et surtout, elle sait les recevoir avec humour. On s’amuse d’un Kant déchaîné sur les planches d’un karaoké, ou encore d’un Diderot qui perd ses lumières.

    Une pincée de chaque auteur

    Si l’autrice s’est contrainte à ne pas consacrer plus de deux pages pour chaque penseur, c’est avant tout parce que Humaine trop humaine, avant de faire l’objet d’un album, était publié en pièce détachée dans le mensuel Philosophie Magazine. Depuis 2017, l’autrice bénéficiait pour ses hommages, d’une double page dans la revue. Et même s’il ne fait aucun doute que l’insertion de l’univers de Catherine Meurisse dans le magazine doit représenter une véritable plus-value – apportant un point de vue original dû à la particularité de son médium –, on est moins convaincu par l’utilité d’en faire un album.

    Le propos de Catherine Meurisse – qu’on peut d’ailleurs applaudir pour le travail titanesque de documentation qu’elle a probablement réalisé – s’adresse parfaitement à un public expert et intéressé, qui rit à gorge déployée devant le faux suicide de Kierkegaard ou encore l’échographie prénatale de Cioran. Mais pour le néophyte, c’est plus compliqué. Et ce ne sont pas les notes à la fin de chaque strip – clé généralement nécessaire pour comprendre les blagues – qui vont le convaincre que cet album a été écrit pour lui. En fait, c’est un peu comme si Catherine Meurisse nous obligeait, nous lecteur lambda, à gravir, le plus rapidement possible, les sommets philosophiques les plus escarpés. Si elle fera saliver les habitués,. Aux autres, elle servira une soupe un peu trop condensée de penseurs. Gare à l’indigestion.

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