Titre : Silencio
Auteur : Thomas Le Petit-Corps
Editions : Éditions des Équateurs
Date de parution : 5 octobre 2022
Genre : Roman
Dans l’idée, Silencio paraît assez excitant comme un bon shoot d’adrénaline dans le corps littéraire. Il suffit de voir le pitch. Une drogue qui promet le silence dans un monde où le bruit omniprésent fatigue aussi bien les yeux que les oreilles. Une bulle de repos dans un trop-plein d’informations : on en imagine, malheureusement sans peine, les bienfaits.
Mais pour le reste, en bon classique du roman d’anticipation, Silencio nous balance toutes les recettes du genre. Une tambouille de publicités hologrammées et de drones d’informations ciblées, de puces individuelles et d’interconnexion pour nourrir les besoins d’un capitalisme stéroïdé. Un monde contrôlé par des entreprises privées, engraissées par nos données personnelles, et dans lequel les seuls êtres lucides sont des sans-abris et jeunes anarchistes qui s’accrochent à leurs squats comme à leur liberté. D’ailleurs, nos héros sympathiques ne sont autres qu’une Lisbeth Salander des temps modernes, en vraie hackeuse surdouée, et l’ermite rustre et barbu qu’on imagine ressemblant à Hagrid.
Dans ce tumulte apocalyptique s’affrontent deux entités, l’une qui défend le black-net producteur du Silencio, et l’autre qui représente le pouvoir politique en vigueur, virant sérieusement facho. Et entre les dealers et le gouvernement, notre cœur balance. Paradoxalement, dans un univers aussi dystopique, on a du mal à savoir exactement dans quel camp on se range. Les méchants fascistes semblent avoir convaincu l’ermite du bien-fondé du combat qu’ils mènent contre les instigateurs du Silencio, et ce malgré ses réticences politiques. C’est que le Black-net doit être bien dangereux…
Et c’est peut-être là que Thomas Le Petit-Corps parvient à nous intéresser. On doute devant un scénario qui nous semblait déjà tracé. On se laisse glisser dans cette intrigue qui, pourtant, manque encore un peu d’étoffe. Si le synopsis est bien, autant que certaines libertés prises en terme littéraire – on sent l’influence d’un Damasio dans l’écriture – le récit semble encore un peu rapide. En fait, il aurait été parfait sous une autre forme, comme en témoigne le plaisir que semble prendre l’auteur dans ses dialogues. Et ça tombe bien parce que Silencio fait déjà l’objet d’un podcast ! Peut-être que si son auteur tenait tant à lui donner une forme littéraire, il aurait été plus intéressant de se tourner vers la bande dessinée. Ceci dit, en l’état, Silencio pourrait être, pour les ados, une bonne introduction à la littérature SF et une piste de réflexion sur le futur qui s’offre à nous.