© Yves Kerstius
de Simon Stephens, traduit par Séverine Magois
Mise en scène : Olivier Coyette avec Frédéric Ghesquière, Anabel Lopez, Flavia Papadaniel, Jérémie Petrus, Nicole Valberg et Benoît Van Dorslaer
Du 9 septembre au 4 octobre à 20h30 au Théâtre de Poche
Le Théâtre de Poche présente durant un mois Pornographie, une pièce éclatée qui se veut aborder l’ultra-surveillance gouvernementale et les limites de l’intimité de l’homme au travers de sept histoires liées aux dérives et aux non-dits des comportements humains. Malheureusement, la pièce s’ampute d’une part importante de son message et détourne ainsi la symbolique de son titre pour se perdre dans des effets trash.
Au départ, Pornographie se veut être « Une formidable partition sur le voyeurisme d’Etat et les limites de notre intimité » mais s’il est certain que les limites de notre intimité sont explorées en profondeur, le voyeurisme d’Etat se perd dans la multitude des récits de vie pour tendre, au final, à totalement disparaitre de la scène. En effet, la pièce expose la vie d’hommes et de femmes qui partagent comme point commun d’avoir choisi de passer un cap dans leur vie, une limite que peu d’entre nous dépassent. Se retrouvent alors dans Pornographie une histoire d’inceste entre un frère et sa sœur, un tour de charme entre une ancienne élève et son vieux professeur, une dame âgée qui ne parle plus qu’aux objets, un jeune garçon amoureux d’une prof de son collège et fantasmant sur le fait de l’agresser physiquement, une mère de famille qui joue aux espionnes en entreprise et un homme prêt à se faire exploser dans le centre de Londres. Tous ces personnages sont réunis dans un même contexte, le début du mois de juillet 2005 dans la capitale anglaise, le Live 8, l’annonce des JO pour 2012…
Dans cette richesse des témoignages, faire le lien entre ces histoires de mœurs et l’ultra-surveillance dont Londres comme la plupart de nos sociétés occidentales sont aujourd’hui sujettes devient très difficile car rien ou presque ne le permet dans la mise en scène. L’ultra-surveillance abordée dans la présentation de la pièce et dans le mot d’introduction du metteur en scène est zappée en faveur de l’exposition de comportements intimes. L’élément scénique qui pourrait nous rappeler à cette thématique de « voyeurisme d’état » est peut-être la projection de messages et d’images de la foule dans les rues londoniennes. Ce serait là un élément qui permettrait de créer une symbolique envers cette surveillance d’état. Mais cette partie de la scène est inaccessible à la moitié du public, trop basse, mal adaptée à l’espace. Ces comportements, ces réflexions, ces actes qui vivent cachés dans l’intimité sont ici exposés au devant de la scène sans tabous, sans gêne pourrait donner au public le rôle de cet Etat de haute surveillance… Mais une partie de l’installation scénique se trouve en hauteur, ce qui fait perdre au dessus de salle la vue d’ensemble de la pièce. Les spectateurs de la moitié supérieure doivent se contenter de la moitié des corps des acteurs. Et dans ce cas, le spectateur ne peut pas jouer le rôle de cet Etat à la surveillance surpuissante.
Au final, Olivier Coyette propose une scénographie qui se concentre sur l’homme et qui, de ce fait, s’éloigne du titre même du spectacle. Le terme Pornographie renvoie pour Simon Stephens à la surveillance généralisée des populations par les caméras. Cette dimension a été placée au second plan par le metteur en scène dont le propos réel est l’homme et comment chacun de nous peut au final faire preuve d’un comportement déviant.