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    [Avignon OFF 2021] Là, se délasse Lilith… – Manifestation d’un corps libertaire

    Auteure, chorégraphe et interprète : Marinette Dozeville. Musicien : Uriel Barthélémi. Au Théâtre La caserne à 22h30 du 7 au 26 juillet (relâches les 13, 20 juillet)

    Le spectacle est vendu comme étant une réflexion sur le mythe de la femme créature, sur le personnage de la tradition hébraïque, Lilith. Elle représente l’équivalent féminin d’Adam. Il sera donc sujet de briser cette censure de ce personnage dans nos sociétés patriarcales où la femme n’a toujours pas sa place comme égale de l’homme. Chercher à choquer pour exister, séduire pour reconstruire et revendiquer cette figure de l’anti-modèle, emblème non-conformiste. C’est un sujet politique, sociétal, religieux, philosophique et psychologique. Voilà, ce à quoi nous nous attendons en entrant dans cette salle. On veut être bousculés, on veut pousser notre réflexion au-delà de ses limites.

    Sur la scène, une femme nue, Marinette Dozeville. Elle finit d’attacher fermement une corde autour de sa cuisse dans une pratique de bondage. Au milieu du plateau, une longue trainée de paillettes et un anneau suspendu au plafond. Dans un coin, des instruments de percussion et à cordes. Un assistant attache Marinette à l’anneau, comme on installerait une bête chassée à une poulie.

    La musique commence. Uriel Barthélémi perfore nos oreilles des sons les plus aigus qu’il peut trouver autour de lui. Pendant ce temps, la femme nue est toujours suspendue la tête en bas, attachée par sa cuisse lacérée. Les minutes défilent au rythme cacophonique et finalement, Marinette se détache petit à petit de sa poulie. Lilith est peint sur son dos pour ceux qui chercheraient encore où se trouve ce personnage dont le titre fait référence.

    Une sorte de danse s’en suit. La musique s’emballe, devient parfois mélodique, parfois étrange. La jeune femme se roule dans la longue ligne de paillettes qui se trouvait au sol. Elle l’étale, dessine des formes avec et se relève pour laisser mouvoir son corps tantôt en rythme avec la musique, tantôt pas du tout.

    C’est au public à se concentrer, à faire preuve d’imagination pour comprendre où se trouvent les réflexions féministes, l’étendue philosophique de ce spectacle. On plisse les yeux, on essaye d’apercevoir entre chaque pas de la danseuse l’implication de Lilith, de ce personnage particulier. Pas facile de réfléchir avec cette musique.

    Nous attendions une réflexion, un débat, une argumentation ou défense sur le statut de la femme, mais non. Ce n’est pas du tout ça. C’est loin d’être ça. Il ne s’agit pas du tout de ça. Aucun aphorisme. Bien entendu, même si nous espérions des dialogues ou au moins un monologue sur le sujet, il est bien clair qu’il ne faut pas obligatoirement parler pour exprimer son ressenti ou son art. Cependant, ici, nous ne voyons qu’une tentative de performance. Une femme nue qui danse en toute liberté, laissant voyager son corps dans une direction inconnue.

    Dans le public, la plupart n’ont pas le petit livret explicatif qui apporte beaucoup plus de réflexion que le spectacle en lui-même. Il y est d’ailleurs indiqué que la compagnie propose habituellement une conférence-débat, « corps normatifs – corps performatifs : le corps comme outil de résistance », portée par Rachele Borghi. On aurait bien voulu y assister. Ne serait-ce que pour comprendre ce que nous avons vu.

    Les spectateurs sont divisés en deux. Des jeunes adultes qui semblent touchés par le sujet et beaucoup de vieux messieurs qui occupent les deux premières rangées pour admirer cette femme nue danser devant eux. Est-ce que l’intention de ces différents publics était la même ? Aucune idée. Une chose est sûre, tout le monde n’en est pas ressorti satisfait de la même façon. 

    Christophe Mitrugno
    Christophe Mitrugno
    Journaliste du Suricate Magazine

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