Écriture et mise en scène de Farid Ousamgane. Chorégraphie de Laura Mas Sauri et Farid Ousamgane. Avec la troupe du possible et ses 27 comédiens. Premières publiques reportées à la saison 21-22 au Théâtre 140.
Dans sa pièce À propos d’Artaud (et autres interviews télévisées), Farid Ousamgane s’inspire de l’univers d’Antonin Artaud, théoricien du théâtre dont les pensées s’égarent au-delà du sens afin de faire ressortir la forme. Mais le travail de Farid Ousamgane semble particulièrement s’appuyer sur un concept bien particulier : la compréhension. La troupe du possible est d’abord et avant tout une troupe inclusive qui accueille en son sein des personnes venues de lieux de détresse psychiatrique, en mixité avec des personnes de tous les horizons. En s’inspirant d’Artaud et par son essence même, la troupe du possible nous interroge sur notre compréhension. Elle nous questionne sur notre compréhension du langage d’abord et sur l’importance que nous portons aux mots utilisés, mais elle nous questionne également sur notre compréhension de l’autre et sur la nécessité de parfois aller plus loin que la première impression pour réussir à une compréhension mutuelle.
La pièce débute sur une scène qui nous évoque un plateau télévisé. Jusque-là, rien de très surprenant au vu du titre qui nous réunis. Tout au long de la pièce, les techniciens s’agitent afin d’animer les nombreux téléviseurs qui parsèment la scène. Des chorégraphies scénarisées succèdent à des interviews télévisées sur les deux plateaux aussi faux que nature, le public va et vient et joue son rôle à la perfection tandis que les divers présentateurs mènent la danse. En thème de fond et sans surprise : l’univers d’Artaud.
L’histoire que l’on nous présente n’en est pas vraiment une. Tout n’est que scénario et chacun succède au suivant. Cependant, entre les lignes de ces dialogues surréalistes et sans queue ni tête, une histoire se raconte : celle de la troupe du possible. Dans la peau de leurs personnages, les acteurs nous racontent la création de la troupe avec une énergie qui nous happe. En parallèle, des intervieweurs anglais interrogent des interviewés français, le tout traduit en langue des signes, un dialogue de sourds dans lequel la traductrice ne sait absolument pas signer. Tout semble irréaliste, de cette actrice qui n’intervient jamais au bon moment jusqu’à ce public qui dialogue d’un langage soutenu et philosophique à un langage insensés, et qui pourtant se comprend tandis que nous, nous n’en comprenons pas un mot. De quoi nous interroger sur le sens que nous accordons au langage utilisé.
Dans À propos d’Artaud (et autres interviews télévisées), Farid Ousamgane et la troupe du Possible nous entrainent dans l’univers décalé d’Artaud et à travers des chorégraphies, des interviews et des échanges incompréhensibles pour les néophytes que nous sommes, semblent vouloir nous apprendre quelque chose. Que peut-on alors apprendre lorsque nous ne comprenons rien ? Ou peut-être pourrions-nous… apprendre à comprendre ?