Titre : L’Effondrement de l’empire humain
Auteurs : Pierrot Pantel et Manon Commaret
Editions : Rue de l’échiquier
Date de parution : 20 août 2020
Genre : Essai, Entretien
Dans cet essai, dix personnalités reconnues dans la sphère des collapsonautes partagent leur point de vue et leur positionnement personnel sur les effets dévastateurs du changement climatique. Avec cet ouvrage, composé d’entretiens avec des penseurs de l’effondrement, le spécialiste de l’environnement Pierrot Pantel et la psychologue Manon Commaret cherchent à ouvrir les consciences et à déconstruire les certitudes.
Ici, les intervenants sont unanimes sur le fait que le changement climatique amènera avec lui son lot de tragédies humaines : manque de nourriture ou d’eau, maladies, conflits, inégalités en hausse… Nicolas Hulot s’y exprime de manière sincère sur son cheminement et son inquiétude qui fleurte avec le désespoir, entrecoupée de « moments d’insouciance pour conserver une certaine joie de vivre ». Il prône, comme beaucoup d’autres, une relocalisation de l’économie. Nombreux sont ceux qui rejettent l’idée de la croissance verte ou d’une transition en douceur, ou encore que faire sa part suffira.
Pablo Sévigné, le pape de la collapsologie, croit à la nécessité de se préparer à l’incertain et a été surpris de voir comment les élites ont ralenti si brutalement l’appareil industriel et la croissance face à la pandémie de Covid-19. Il se place dans une démarche d’espérance qu’il distingue de l’espoir qui rend passif. L’espérance est selon lui « savoir ce qui est juste, ce qui a du sens et tout faire pour le voir advenir, coûte que coûte, quelle que soient les chances d’y arriver ». Pour changer notre rapport au monde, il préconise de faire « ressortir le féminin en chacun de nous … sans pour autant réduire la part de masculin ».
Le chapitre sur Jean Jouzel, Vice-président scientifique du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat entre 2002 et 2015, est l’un des plus intéressants. Il ouvre son propos avec une citation qui plante le décor sans détour : « Pas besoin de faire du catastrophisme : la situation est catastrophique. Je le répère, on est plus dans le futur : ce sont les enfants d’aujourd’hui, ceux des cours d’école, qui pourraient subir ces étés à 50 degrés celsius ». Toutefois, Jean Jouzel prévoit que les véritables difficultés sont pour l’après-2050 et insiste sur la nécessité de se mettre sur une trajectoire neutralité carbone à cet horizon. Selon lui, les pays qui feront le plus pour réduire le changement climatique ou s’y adapter le plus rapidement seront « gagnants non seulement par rapport à l’environnement et la qualité de vie de leur populations, mais aussi sur le plan du dynamisme économique et de l’emploi ».
Pour Yves Cochet, l’ancien député et ministre EELV, les années comprises entre 2020 et 2050 seront les trente catastrophiques où la survie de l’espèce humaine sera en jeu. Selon lui, après 2040, il n’y aura plus « ni boîtes de conserve, ni électricité éolienne ou solaire » et les « survivants devront réinventer un système d’énergie, d’alimentation et d’accès à l’eau potable » low-tech. Adepte de la pensée radicale, Yves Cochet met en garde sur le fait que Paris deviendra invivable et propose d’y dépaver la moitié des voiries pour y mettre potager et permaculture. Sa conviction est que tous les pays devraient avoir des bio-régions tendant vers l’auto-suffisance en matière alimentaire et énergétique, dans un contexte de démocratie de proximité.
Les lecteurs verront ici leurs pires craintes confirmées sur les effets délétères du changement climatique et comprendront comment s’y préparent les collapsonautes, en offrant une variété de points de vue. Vu par les collapsonautes, 2020 et le Covid paraissent peu de choses au regard des enjeux qui attendent l’humanité face au réchauffement de la planète…