Capone
de Josh Trank
Drame, Biopic
Avec Tom Hardy, Linda Cardellini, Matt Dillon
Sorti en DVD et en Blu-Ray le 9 septembre 2020
Après un excellent Chronicle (2012) et un désastreux Fantastic Four (2015) qui aura porté un léger coup à sa carrière, Josh Trank délaisse aujourd’hui le genre super-héroïque pour se pencher sur un célèbre anti-héros en la personne d’Al Capone.
Libéré de prison en 1939 pour causes médicales, Alphonse Capone passa ses dernières années rongé par des phases de colère et de délire, résultat d’une syphilis mal soignée dans sa jeunesse. Avec le temps, ces symptômes prirent une telle ampleur que des spécialistes estimèrent plus tard l’âge mental du mafieux à douze ans. Entre légendes urbaines et vérités historiques, Capone revient aujourd’hui sur le crépuscule de « Scarface » !
Si quantité d’acteurs – parmi lesquels Robert De Niro et Sylvester Stallone – ont interprété le rôle du mafieux, c’est maintenant à Tom Hardy de tenter sa chance avec le talent qu’on lui connait. Hardy campe en effet un Al Capone horriblement fou et paranoïaque, tout en parvenant à reproduire la voix du criminel malgré l’absence de sources audio – seule une reconstitution basée sur les souvenirs de sa petite-fille Deirdre Marie Capone existe, bien que l’acteur ait confessé s’être inspiré de la voix de Bugs Bunny pour composer son personnage.
Le réalisateur aura quant à lui choisit un angle d’approche très intéressant. Car la grande majorité des films centrés sur Al Capone montrent celui-ci en pleine prohibition, alors qu’il dirigeait la mafia de Chicago. Voir le mafieux au seuil de la mort et atteint de neurosyphilis le rend soudain inoffensif, pathétique et le démarque ainsi de celui qu’on pouvait voir dans Les Incorruptibles ou la série Boardwalk Empire.
Cependant, cette qualité constitue également l’un des plus gros défauts du film, car Capone se perdra rapidement dans son propos, en mélangeant des éléments avérés avec des inventions, ne permettant plus au spectateur de se situer. S’agit-il d’une forme de biopic ou d’un fantasme scénaristique ?
Dans cette logique fantasmée, on verra le mafieux avoir un fils illégitime qu’il refuse de voir, ou canarder ses invités avec une mitrailleuse Thompson en or. Si le premier n’a jamais existé – on n’en trouve en tous cas aucune trace historique –, le second événement n’a quant à lui jamais eu lieu. Selon sa biographe Deirdre Beir, à cette époque, Al Capone aurait seulement agressé son frère durant une phase paranoïaque.
De même, on verra encore Louis Armstrong chanter « Blueberry Hill » en présence du mafieux, alors que le morceau ne fut enregistré qu’en 1949, deux ans après la mort de Capone. Par contre, pour l’anecdote avérée, ce dernier aura fait enlever le musicien Fats Waller pour l’obliger à jouer lors de son anniversaire… qui aura duré trois jours !
En réalité, Capone a quelque chose d’iconoclaste. Ce qui en soi n’est pas un réel problème tant le mafieux était un ignoble personnage. Mais on comprendra alors difficilement le but de cette nouvelle réalisation signée Josh Trank : faire un film historique ou casser la « légende » Al Capone ? Dans un cas comme dans l’autre, le réalisateur ne parvient pas à faire mouche.
Des personnes présentées dans le film, seule sa femme Mae, son frère Ralph et son fils Albert auront réellement existé, les autres étant des inventions ou des personnages composites. Derrière tout cela, Al Capone devra affronter ses démons en cohabitant avec des fantômes. Au-delà de cette composante dickensienne, on comprendra difficilement le but de ce film…
En somme, Capone prend un point de départ original et intéressant sans toutefois réellement savoir où il va. Malgré une prestation sans fautes de Tom Hardy et quelques séquences visuellement intéressantes – notamment une redite de la scène de la tête de cheval dans Le Parrain –, cette nouvelle réalisation de Josh Trank s’effondrera rapidement pour laisser la place à un film rapidement fatiguant.