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    American Nightmare 2 : Anarchy de James DeMonaco

    american nightmare anarchy affiche

    American Nightmare 2 : Anarchy

    de James DeMonaco

    Epouvante-horreur

    Avec Frank Grillo, Carmen Ejogo, Zach Gilford, Kiele Sanchez, Michael K. Williams

    Sorti le 30 juillet 2014

    Critique :

    L’idée de départ d’American Nightmare, qui présidait déjà au premier opus, est prometteuse : dans un futur proche, une fois par an, pendant une soirée et une nuit, a lieu la Purge, durant laquelle le crime est légalisé aux Etats-Unis. Hors du regard de la police et des secours qui suspendent leurs services pour douze heures, c’est l’occasion de tuer, de violer, d’expulser ses plus vils démons : bref, de se défouler impunément pour garantir au pays un pacifique équilibre le reste de l’année. Une sorte de Carnaval trash avant une année de Carême, en quelque sorte.

    Le premier American Nightmare, remarqué par la critique, y compris par celle qui n’est pas a priori la plus amatrice du genre, était conçu comme un film satirique et politique, dénonçant la place de la violence et des armes aux États-Unis. Le réalisateur pensait qu’il resterait confiné aux salles art et essai de New York et de Los Angeles. Face au succès inespéré, James DeMonaco et ses producteurs ont souhaité poursuivre l’aventure, quittant l’espace de la banlieue résidentielle du premier volet pour explorer la nuit de terreur dans une grande ville, autour de la rencontre de cinq personnages.

    Eva et sa fille Cali sont enlevées chez elles par des hommes armés et harnachés jusqu’aux dents. Alors qu’elles sont en train de se faire sévèrement malmener, Léo, sorti de chez lui pour accomplir une sombre vengeance, se laisse émouvoir et leur porte secours. Pendant ce temps, un couple sur le point de se séparer, Shane et Liz, se réfugient dans la voiture de Léo : tous ces malheureux égarés vont sacrément le retarder dans la mise en œuvre de son obscure besogne… En effet, comme la voiture de Léo refuse de redémarrer, ils vont devoir essayer ensemble de sortir vivants de la purge, essayant d’atteindre la maison d’une amie d’Eva, refuge où, assure-t-elle, Léo pourra trouver une voiture pour le conduire jusqu’à l’homme qu’il poursuit. Mais la participation à la nuit de purge atteint des records, et la menace est partout…

    Le début du film est brillant : la tension est palpable, le suspense haletant. La course dans la nuit de la ville presque vide, où l’on croise seulement des cadavres, des fous et de pauvres brebis perdues, nous captive. Globalement, on reste tout au long du film pris dans ce cauchemar : James DeMonaco réussit à susciter l’angoisse sans en rajouter dans le gore ou dans la grosse fusillade à l’armes lourde. Le film est bien plus terrifiant que dégoûtant : on devine des meurtres dans l’ombre, on entend des cris et des coups de feu, on aperçoit la lueur de véhicules chargés de furieux laissant exploser leur haine et leur violence jusque-là contenues.

    Toutefois, on est quelque peu frustré, sans doute parce que le postulat de base, que l’on découvre ici si on n’a pas vu le premier film, est si alléchant : avec cinq personnages, le développement psychologique tout comme le sens donné par les uns et les autres à la purge, passent nécessairement au second plan derrière l’action et le film de survie, au risque de diminuer la force du film. Or, les pistes suggérées sont stimulantes : un leader noir, évoquant Malcolm X, monte un groupe anti-purge et en appelle à la guerre des classes, au meurtre des riches. L’affrontement social, l’utilisation politique de la purge – ne s’agirait-il pas d’un complot gouvernemental anti-pauvres ? –, le mélange de violence et de puritanisme qui traversent la société américaine, questions potentiellement passionnantes, pourraient être approfondies. En outre, le personnage de Léo, assoiffé de vengeance, pourrait donner lieu à une réflexion plus poussée, plus complexe et peut-être plus amère, sur la justice qu’on rend soi-même et son impact. La fin, notamment, n’est pas à la mesure des premières scènes.

    Il n’en reste pas moins vrai qu’American Nightmare 2, qui donne terriblement envie de se plonger dans le premier opus, est à la fois un très bon film d’horreur et d’anticipation. Offrant peu de répit, il nous remue en plus de nous faire frissonner : quel est le prix qu’une société est prête à payer pour sa tranquillité ? Combien de souillures pour un monde aseptisé ?

    Emilie Garcia Guillen
    Emilie Garcia Guillen
    Journaliste du Suricate Magazine

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