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    Mes vacances à Morro Bay, du portrait à l’autoportrait

    Titre : Mes vacances à Morro Bay
    Auteur : Paul Jorion
    Edition : Fayard
    Sortie : 15 mai 2019
    Genre : récit, roman

    « J’ai une nouvelle ambition dans la vie : devenir le saint patron des ‘vieux qui ne savent pas vieillir’ ». C’est en ces mots que l’on pourrait définir le premier ouvrage romancé de Paul Jorion, anthropologue et sociologue belge connu pour ses nombreux essais économiques, aussi pertinents que clairvoyants. Non pas qu’il s’agit ici des meilleures infusions pour rester éternellement jeune, mais bien parce que cette phrase englobe à la fois l’optimisme, l’humour et la sagacité d’un texte singulier.

    Mes vacances à Morro Bay relate une fine tranche de la vie de l’oracle de la crise des subprimes. Dans cet ouvrage de 137 pages, Paul Jorion partage avec son lecteur quelques jours de vacances – au sens premier du terme, c’est-à-dire une semaine sans objectif si ce n’est de se laisser aller aux rencontres improbables et se laisser bercer par des situations cocasses – qu’il passa dans cette petite ville de Californie. En cherchant à faire de ce repos forcé le meilleur des romans, l’homme va alors entrer dans une analyse à la fois lucide et drolatique de sa propre existence.

    Sorte de bucket list improvisée à l’odeur légèrement nostalgique, Mes vacances à Morro Bay est un trompe-l’œil littéraire. En effet, au premier regard et au fur et à mesure que le lecteur parcoure les pages du livre, il est difficile de comprendre l’intention de l’auteur… ou du moins, une impression d’impénétrabilité se fait très vite ressentir, tant le poids des mots et l’intelligence de la mise en abîme de son protagoniste contrastent avec la presque banalité des évènements relatés. Et pour cause, Paul Jorion nous mène – peut-être non intentionnellement – en bateau, au large de cette contrée d’une universalité sans nom. Alors qu’on se complaît à suivre les péripéties de Paul, c’est avec une toute autre lecture que l’auteur nous charme, celle qui en filigrane nous esquisse les forces et les blessures du narrateur. Une puissance dramatique – mais pas forcément négative – qui prend tout son sens à l’aube du quatrième jour, où la prospection devient introspection.

    En résumé, Mes Vacances à Morro Bay constitue une belle surprise littéraire de la part de Paul Jorion. Lui qui a l’habitude de nous raconter le présent et le futur dans un langage des plus pragmatiques, nous révèle un passé d’une romance douce et sincère.

    Matthieu Matthys
    Matthieu Matthys
    Directeur de publication - responsable cinéma du Suricate Magazine.

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