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    Long Shot, séduisante comédie romantique

    Long Shot
    de Jonathan Levine
    Comédie
    Avec Charlize Theron, Seth Rogen, O’Shea Jackson Jr.
    Sorti le 15 mai 2019

    C’était, rappelez-vous, en 2007. Seth Rogen déboulait sur nos écrans en improbable premier rôle d’une comédie romantique avec En Cloque, mode d’emploi. Il était question d’une grossesse imprévue, menée par Katherine Heigl, et d’une relation qui n’avait pas de sens, mais qui par la force des choses (c’est-à-dire quelques pirouettes scénaristiques) finissait par fonctionner. 12 ans plus tard, force est de constater que les choses n’ont pas énormément changé : Rogen continue d’être l' »underdog », conquérant le cœur de personnages féminins qui, selon les canons de beauté, sont considérablement plus attirants que lui, et, selon certains critères de réussite, sont bien plus accomplis professionnellement.

    Dernière comédie romantique en date à se saisir de cette dynamique, Long Shot (ignorons son vilain titre français Séduis-moi si tu peux) met les bouchées doubles en la matière. Seth Rogen y incarne un journaliste politique idéaliste, grande gueule et sans-le-sou, avec face à lui rien de moins que Charlize Theron en Secrétaire d’État, s’apprêtant à briguer la présidence des États-Unis. De leur stature publique à leur rapport au monde en passant par leur goût vestimentaire, ces deux-là forment un couple improbable, et le film ne nous le fait jamais oublier, jouant tout du long sur ce qui les sépare. Engagé pour écrire les discours de la future candidate, le personnage un peu rustre interprété par Rogen évolue tel un poisson hors de l’eau dans ce monde de puissants très éloigné de ses valeurs. Ce qui donne l’occasion à l’acteur canadien de faire ce qu’il sait faire le mieux : être lui-même, avec son franc-parler et ses manières vulgaires mais attachantes.

    Theron pour sa part s’attelle plus à un rôle de composition. Interprétant une femme partagée entre ses idéaux et les compromis que le monde politique réclame, elle opère un numéro d’équilibriste compliqué dont elle se sort avec panache : convaincante en femme de pouvoir, touchante en idéaliste forcée au pragmatisme, et formidablement drôle, elle partage avec Rogen une puissante alchimie à l’écran. L’atmosphère entre eux est électrique, les répliques fusent, et sous peu, on se surprend à souhaiter activement le succès de ce couple mal assorti.

    Si leur relation florissante se regarde avec un certain intérêt, il faut cependant noter que le film s’essouffle quelque peu lorsqu’il suit les codes de la comédie romantique, comme dans son dernier acte, où certains mécanismes scénaristiques se mettent inévitablement en place. Long Shot fonctionne beaucoup mieux quand il s’en distingue, notamment par le biais de l’humour. Pour peu qu’on ne rechigne pas face aux blagues potaches, les raisons d’éclater de rire sont en effet nombreuses. Sous la direction de Jonathan Levine (qui propose une mise en scène convenable mais peu inspirée), les gags physiques et les dialogues savoureux abondent, portés par des seconds couteaux talentueux. O’Shea Jackson Jr., June Daniel Raphael ou encore Andy Serkis (comme toujours méconnaissable) viennent tous apporter une belle énergie comique au récit.

    Autre anomalie : le film prend un plaisir certain à représenter le monde absurde de la politique, épinglant sa corruption, sa superficialité et son sexisme ! Chargé de bonnes intentions, le long-métrage lance quelques piques bien senties, qui méritent d’être saluées, tout en déplorant quelques maladresses, et un manque de férocité face à certains sujets. Exemple frappant, celui de ce personnage de président des États-Unis, ancien acteur de télévision, désireux d’abandonner la politique pour se lancer dans le cinéma. L’allusion à Trump est évidente, mais quand la réalité est encore plus grotesque, une telle attaque paraît finalement assez gentille.

    Rien d’étonnant à cela, bien sûr. Malgré ses efforts, Long Shot n’est pas un brûlot anti-Républicain, mais une comédie romantique qui se doit de satisfaire le plus grand nombre, avec un happy end à la clé. Tant sur les choses de l’amour que sur celles de la politique, le film se laisse donc porter par un certain idéalisme, projetant l’image d’un monde où le couple Theron/Rogen pourrait voir le jour, et triompher de l’adversité. Dans cette démonstration de bons sentiments, on verra, au choix, la marque d’un optimiste souriant ou d’une naïveté éhontée. On pourra également y voir le renforcement de belles idées sur les relations amoureuses, tout comme on pourra regretter que cette dynamique sentimentale soit toujours au bénéfice d’hommes comme Seth Rogen, et jamais l’inverse. Mais Long Shot est un film qui cherche à plaire, et force est d’avouer qu’il est difficile de résister à son charme.

    Adrien Corbeel
    Adrien Corbeel
    Journaliste du Suricate Magazine

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