Mise en scène de Séverine Chavrier d’après le texte de William Faulkner avec Déborah Rouach, Laurent Papot et Séverine Chavrier. Du 30 mars au 06 avril 2019 au Théâtre National. Crédit photo : Alexandre Ah-Kye
« C’est alors que j’ai appris que les mots ne servent à rien, que les mots ne correspondent jamais à ce qu’ils s’efforcent d’exprimer. » William Faulkner
En 2014, Séverine Chavrier monte Les palmiers sauvages de William Faulkner qu’elle présente aujourd’hui au Théâtre National. La pièce raconte le récit d’une bourgeoise qui décide de tout quitter pour partir vivre une passion amoureuse avec un étudiant en médecine. Tout commence par un hasard foudroyant auquel ils tentent de résister en vain. Alors commence l’embrasement d’une passion aussi dévorante que destructrice. Ils subissent la société, leurs rêves inassouvis, leurs désirs oubliés, la privation de l’autre. Comment se résigner quand on a soif de vie ? La violence se dilue peu à peu, celle que l’on accepte car elle ne surprend plus.
La dramaturgie est construite comme une partition. Les mots sont découpés par la lumière et le son. Les mediums s’assemblent, se découpent et se superposent dans un dialogue d’une précision déconcertante. Le son de Philippe Perrin, la vidéo de Jérôme Vernez et la scénographie de Benjamin Hautin permettent au fantasme de prendre forme. Le rêve et le cauchemar dansent au cœur d’un voyage introspectif. Une atmosphère sensorielle inonde la scène jusqu’à s’immiscer dans l’intimité du spectateur. Les odeurs grattent, la tension se hume, la lumière frappe.
En s’interrogeant sur les rapports amoureux, Les palmiers sauvages décrit la violence du quotidien. Le temps devient latent, il perd sa matière et devient ennemi. La sensualité embrasse la désillusion, la tendresse défie l’orgueil. L’amour est retranscrit sous toutes ses coutures aussi bien dans sa beauté que son impuissance. Ce qui semblait ouvrir tous les possibles devient enfermant. Le décor s’en retrouve contaminé, il subit et se détériore au fur et à mesure de l’avancée de la pièce.
Le récit commence en haute tension dès le départ, empêchant l’évolution de la progression dramatique et peut devenir prévisible. Le rythme peut être compliqué à saisir au début et nécessiter de lâcher prise au langage transmedium. La pièce aurait gagné à explorer différentes intensités pour nous offrir une fin encore plus surprenante. En effet, les sentiments sont représentés de manière si exacerbées qu’ils peuvent parfois manquer de nuances.
Nous retrouvons la voix rebelle de Déborah Rouach, qu’il est difficile de dissocier de la Cendrillon de Pomerat. L’actrice mène la danse avec fougue, accompagnée de la douceur de son partenaire Laurent Pepot qui lui offre un soutien sans faille. Ils incarnent leurs personnages sur mesure avec une grande fragilité, prêts à rompre à chaque instant.