titre : Destruction
auteur : Ezekiel Boone
édition : Actes Sud
collection : Exofictions
sortie : 6 mars 2019
genre : Science-Fiction
« Toujours plus nombreuses, toujours plus grosses, toujours plus affamées » nous a-t-on promis. Et, de fait, le deuxième volet de la trilogie dite à huit pattes se refermait sur une note prometteuse : la reine des araignées, grosse comme un chameau, répugnante, effrayante, enfin s’extirpait de son cocon. Ça annonçait du lourd. Mais le lecteur avide d’action et de descriptions gores n’en aura pas (d’emblée) pour son argent. En effet, plutôt que d’ouvrir les hostilités dès les premières pages, l’auteur choisit de différer le vif du sujet.
Destruction renoue avec le récit sur ce faux rythme qui a parfois peiné à tenir le lecteur en haleine dans Infestation. Les araignées, après leurs vagues d’assaut, sont passées au second plan. Les petits monstres se multiplient à l’ombre des bâtiments abandonnés tandis les humains s’enfoncent dans les querelles intestines. Le gouvernement américain se déchire sur la question de la bombe atomique, au même titre que d’autres groupes de survivants incapables de s’allier même dans les situations les plus critiques.
Parmi les rescapés, ceux qui se taillent la part du lion sont certainement notre petit groupe de survivaliste mené par Shotgun. Ceux-ci ont mis au point un engin capable de retracer le signal émis par les araignées pour communiquer entre elles (non ce n’est pas du spoil : qui n’avait pas encore compris que ce n’étaient pas tout à fait des araignées comme les autres ?). Le lecteur attentif l’avait habilement déduit dès le tome précédent : les derniers espoirs de survie de l’humanité reposent sur le succès de Shotgun et ses amis, protégés par la vice-caporale Kim et son unité.
Après 160 pages (parfois longuettes) de péripéties et de destins croqués, la première vague d’araignées enfin déferle sur les humains. On est à Nazca, au Pérou. Là où tout a commencé et où tout devra finir. À condition, bien sûr, que Mélanie et son équipe de scientifiques parviennent à établir les liens entre les différentes pièces du puzzle qui s’étalent sous leurs yeux. À partir de cette nouvelle vague arachnide, le récit commence à accélérer, les événements s’enchaînent – pour ne pas dire qu’ils se précipitent. Car en effet, on ne pourra s’empêcher de penser qu’une fois la solution trouvée par Shotgun, tout devient beaucoup trop facile pour les héros. À tel point qu’on aurait tendance à dire qu’au lieu de l’apothéose espérée, on a eu droit à une fin bâclée.
Au bout du compte, on regrette que l’auteur ait noirci tant de pages pour développer des personnages qui, à aucun moment, n’apportent leur pierre à l’édifice. Toutes ces pages qui auraient pu être consacrées à travailler plus en profondeur le boss final, le grand méchant, l’affreuse reine des araignées.
Hitchcock disait : « Plus réussi est le méchant, plus réussi sera le film ». Jusqu’au bout on a cru qu’Ezekiel Boone tirerait de son chapeau un méchant mémorable, à n’en plus dormir de la nuit. Raté, et l’on ne saurait cacher plus longtemps notre ultime déception.