Dessin : Grzegorz Rosinski
Scénario : Yves Sente
Edition : Dargaud
Sortie : 28 novembre 2018
Genre : Aventure, historique, polar
La Vengeance du Comte Skarbek est sans doute un des chefs d’œuvre les plus aboutis de Grzegorz Rosinski. Connu pour des séries telles que Thorgal, Buddy Longway, La complainte des landes perdues et encore bien d’autres, il s’associe ici à Yves Sente pour nous proposer deux albums dont les maîtres mots sont peinture, romantisme et voyage.
Tel un feuilleton d’époque, le lecteur est transporté en plein 19ème siècle pour suivre l’histoire de Paulus-Rosinski, un peintre renommé qui intente un procès contre un marchand d’art pour escroquerie.
Le scénario suit une trame assez classique, où causes, conséquences et aboutissement de la vengeance sont clairement exprimés. Celui-ci est explicitement inspiré du Comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas, ce qu’Yves Sente revendique dès le départ. C’est un scénario bien ficelé qui démarre doucement pour s’accélérer tout au long de l’histoire et terminer sur un final explosif. Vous pourriez être sceptique quant aux longs flash-backs qui coupent le récit sans transition mais il nous tient en haleine du début jusqu’à à la fin, à tel point que ses 128 pages se lisent d’une traite.
Cependant, bien que le travail du narrateur soit solide, il est largement et heureusement magnifié par le rendu visuel de la bande-dessinée. Rosinski s’est surpassé pour nous rendre des planches associées à de véritables œuvres d’art. Chaque case est rendue avec soin, précision et nous plonge totalement dans l’époque. Toutes les techniques sont bonnes à utiliser pour exprimer l’intimité, la profondeur, le macabre et même l’érotisme. Rosinski utilise à la fois, le pastel, la gouache, le fusain et se laisse transporter par l’utilisation d’une large palette de couleurs. Grâce à cette liberté artistique, chaque scène est dépeinte avec une réalité graphique de qualité. Les visages, les batailles, le paysage, tout est travaillé avec précision et subtilité, quitte à en oublier le récit.
Le dessinateur de Thorgal et le scénariste de Blake et Mortimer s’allient dans un récit historique pour atteindre des sommets dans leur domaine respectif. On a une symbiose parfaite entre le texte et le dessin. On assiste à un duo de choc entre la réalité historique et artistique, fidèle au 19ème siècle français, avec des références palpitantes qui nous mèneront à la rencontre de Frédéric Chopin, d’Eugène Delacroix, d’Honoré Daumier et de Jean Béraud. Les 128 planches sont abouties visuellement et permettent de contempler un millier de tableaux. Et pour être certain d’être rassasié, on nous délecte d’un carnet de croquis en bonus que vous ne serez pas prêts d’oublier.