Une intime conviction
d’Antoine Raimbault
Judiciaire, Drame
Avec Marina Foïs, Olivier Gourmet, Laurent Lucas
Sorti le 6 février 2019
Depuis que Nora a assisté au procès de Jacques Viguier, accusé du meurtre de sa femme, elle est persuadée de son innocence. Craignant une erreur judiciaire, elle convainc un ténor du barreau de le défendre pour son second procès, en appel. Ensemble, ils vont mener un combat acharné contre l’injustice. Mais alors que l’étau se resserre autour de celui que tous accusent, la quête de vérité de Nora vire à l’obsession.
Assis sur un banc, un homme que l’on juge. Cet homme c’est Jacques Viguier (Laurent Lucas). Il répond de la disparition et du meurtre de sa femme. Il est apathique, isolé, tellement seul. Le verdict tombe : non-coupable. Pas de réaction, comme si la sentence avait été inverse. Le film commence : il devra se défendre une nouvelle fois, en appel. On plonge alors dans le cœur du récit et apparait une jeune femme, Nora (Marina Foïs), qui décide de prendre le parti de cet homme meurtri et déprimé. Elle va se battre et l’on va se battre avec elle tout le long du film pour que le verdict ne change pas. Et c’est de ce point de vue unique que l’on observe le déroulement de cette histoire. Réussissant à faire venir un ténor du barreau, l’inénarrable avocat Me Dupont-Moretti (Olivier Gourmet), elle prend fait et cause pour cet homme. Point de vue unique mais un vrai film à suspense. Toutes les conditions sont réunies pour construire un bon film policier. Durant toute la première partie, Nora doit décortiquer les écoutes téléphoniques de l’amant – Car oui, ce fait divers ressemble à une affaire classique de triangle amoureux – et on écoute avec elle et l’on se forge notre intime conviction.
Mais la force du film n’est pas tellement ce cheminement narratif policier mais l’idée sous-jacente de la justice qu’elle véhicule. Le film passe alors d’un polar de faits-divers à un film noir où l’intrigue devient presque secondaire tant le comportement du personnage de Nora prend le pas sur le récit. Car, emportée par sa passion, celle-ci devient une mise en abîme de tout ce contre quoi elle se bat. Le récit prend une toute autre dimension pour devenir, au travers du personnage de l’avocat, une leçon de ce qu’est la justice ou de ce que devrait être la justice. On y montre que la passion n’a pas sa place dans un tribunal et que les émotions guident la vengeance pas la justice. En une phrase nous est résumé le propos du film : pour l’acquitter il faut un doute raisonnable et « le doute ce n’est pas UNE possibilité, c’est toutes les possibilités »
La mise en scène est réussie et totalement au service du récit. Les personnages sont réalistes et très bien interprétés. Nora est très justement campée par Marina Foïs en mère célibataire engagée, clin d’œil à Erin Brokovitch (Steven Soderbergh, 2000), laissant l’affaire envahir sa vie privée et la rongeant en partie. Quand à Olivier Gourmet, il arrive par on ne sait quel miracle à nous faire oublier le véritable Dupont-Moretti ce qui, on peut en convenir, n’est pas un tour de force mais un coup de maître. Les rôles secondaires sont du même niveau et l’ensemble renforce l’intrigue qui nous tient en haleine de bout en bout.
D’une écriture assez haletante et très bien servi par des comédiens au sommet de leur art, Une intime conviction nous rappelle les notions de justice, de vengeance et de passion dans un bon film entre thriller et film noir. À voir absolument pour les amoureux de ces deux genres.