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    [Avignon OFF 2018] Face de cuillère à l’Espace Roseau Teinturiers

    De Lee Hall, mise en scène de Maud Liermann, avec Carine Coulombel.

    Comment faire pour parler d’un sujet dramatique et poignant avec le sourire ? Carine Coulombel va approcher cette histoire par la douceur d’une enfant. Une enfant éternellement. Face de Cuillère est une jeune autiste qui nous raconte sa vie. Son arrivée, la réaction de ses parents, ses difficultés à discerner le monde dans sa vraie image et puis surtout, son cancer. Elle va nous conter son aventure avec ses plaisanteries et son rire de marmot. Le tout, bercé par la voix de Maria Callas.

    Malgré un fond très noir et une tristesse qui évolue en se cognant continuellement dans la malchance de Face de Cuillère, nous sommes transportés avec légèreté dans cet univers. Carine Coulombel, seule en scène, va faire vivre ses parents, son médecin, la femme de ménage, à travers les différents objets qui l’entourent. Et toujours avec cette profonde douceur. Les sujets sont forts, sont souvent durs, mais l’approche est toujours délicate. Comme si nous étions les enfants et que cette jeune autiste nous prenait la main sur le chemin de ses malheurs.

    Dès les premières minutes, Carine Coulombel entre parfaitement dans son personnage. A se demander si elle joue vraiment. On pourrait avoir peur que cette voix enfantine qu’elle adopte ne gêne tout au long de la pièce, mais aucunement. Ce n’est pas sur-joué et le ton reste juste. A plusieurs moments, elle prend la parole pour son père, sa mère et les autres protagonistes et on se questionne pour savoir si elle parle à leur place ou si c’est le ressenti du personnage. Car lorsqu’elle dépeint son histoire, elle utilise régulièrement le voile de l’enfance pour parler des discussions adultes. La naïveté des bambins pour exposer la sottise des grands.

    Le texte est de Lee Hall que l’on connait notamment pour son film Billy Elliot. Cet auteur aborde toujours des sujets forts en utilisant des moyens plus détachés. Et le regard d’un enfant reste la meilleure façon de voir notre monde et ses difficultés.

    Même si on se perd un peu, par moments, dans le monologue de Face de Cuillère, on garde espoir que tout s’arrangera, que tout rentrera dans l’ordre et que tout le monde sera heureux. Mais malgré la poésie, parsemée d’humour tendre, nous sommes face à la vie, face au destin sans miséricorde. La fatalité est là. Il faut juste apprendre à l’accepter et à garder ce sourire ou cette âme d’enfant qui sommeille en chacun de nous. Le tout avec humilité.

    Et lors des saluts et de la rencontre avec le public après le spectacle, nous apercevons une Carine Coulombel aussi délicate que son personnage et pleine d’humilité, comme si elle n’était pas encore consciente de la profondeur de son talent à nous faire voyager dans un prisme de légèreté au milieu des ronces de la réalité.

    Christophe Mitrugno
    Christophe Mitrugno
    Journaliste du Suricate Magazine

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