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    The Party, huis-clos artificiel

    The Party

    de Sally Potter

    Drame, Comédie 

    Avec Patricia Clarkson, Bruno Ganz, Emily Mortimer

    Sorti le 13 décembre 2017

    Sur le papier, tout portait à croire que The Party allait être une réjouissante comédie noire. Écrit et réalisé par une cinéaste de talent (Sally Potter, autrice d’Orlando) et doté d’un très luxueux casting (Timothy Spall, Kristin Scott Thomas, Cillian Murphy pour n’en citer que quelques-uns), ce huis-clos avait tout une d’alléchante proposition, laissant présager un récit concis à l’humour mordant et dévastateur. Si seulement le film projeté au cinéma était à la hauteur de ces promesses.

    Son cadre est celui d’une fête entre amis, organisée en l’honneur de l’un d’entre eux, Janet (Kirstin Scott Thomas), récemment nommée au poste de ministre de l’Environnement. On s’en rend compte rapidement, les personnages de The Party sont des membres de la bourgeoisie : une politicienne, un financier et une poignée d’académiciens occupent cette soirée. Leur bonne éducation n’est cependant pas synonyme de bonnes mœurs, comme l’en atteste la tournure vinaigrée que prend la célébration quelques minutes à peine après avoir commencé. Coucheries, trahisons et autres joyeuses révélations émergent, lançant ces nantis dans des joutes verbales, et bientôt physiques.

    Jusque-là, rien d’anormal. La farce est un genre qui fonctionne avec ses propres codes, et ce sont ceux-là qu’adopte The Party. Mais quelque chose de terriblement artificiel se dégage du film, et plus particulièrement du jeu des acteurs.

    Cela peut paraître surprenant : ses interprètes n’ont pas pour habitude de nous décevoir. Ce sont tous des vétérans du septième art, avec de nombreuses belles performances à leur actif, et leur présence en tête d’affiche est souvent un gage de qualité. C’est avec désenchantement que l’on constate que leurs talents sont gâchés ici. À l’exception de Bruno Ganz, qui trouve le juste milieu entre naïveté et charisme dans le rôle d’un homme adepte de la médecine alternative et d’aphorismes, leurs performances paraissent poussives, en plus de n’être guère crédibles. Il y a une claire volonté d’aller vers une sorte de surjeu très théâtral, mais les étincelles sont le plus souvent absentes et l’ensemble tombe à plat.

    La mise en scène n’aide certainement pas leurs performances. Filmé la caméra à l’épaule, The Party a visiblement été réalisé en peu de temps, et cela se ressent : la plupart des plans sont assez maladroits et les choix de montages peu judicieux. Même une décision aussi innocente que celle de tourner en noir et blanc renforce l’artificialité des événements. C’est triste à dire, mais The Party ressemble souvent plus à un film étudiant qu’à un long-métrage de la réalisatrice du visuellement très beau Orlando.

    Il serait cependant faux de dire que The Party est un film complètement désagréable à regarder. Ses nombreux rebondissements et sa courte durée (68 minutes !) permettent de maintenir un certain rythme de narration et d’éviter l’ennui. Le long-métrage mérite également une certaine considération pour sa satire de l’intelligentsia anglaise, dont il attaque jouissivement les principes et les hypocrisies. Mais on regretta qu’il soit plus incisif que drôle dans sa critique sociale. Les nombreuses répliques caustiques que s’échangent les invités provoqueront peut-être quelques gloussements, mais probablement peu d’éclats de rire. Comme le démontrent ses multiples faux pas, The Party est un film trop maladroit pour arriver totalement à ses fins. Une déception donc, comme seules en sont capables les œuvres pleines de promesses.

    Adrien Corbeel
    Adrien Corbeel
    Journaliste du Suricate Magazine

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