Maryline
de Guillaume Gallienne
Drame
Avec Adeline D’Hermy, Vanessa Paradis, Alice Pol, Éric Ruf, Xavier Beauvois
Sorti le 15 novembre 2017
Pour son deuxième long métrage en tant que réalisateur, Guillaume Gallienne change de registre et délaisse la comédie autobiographique de son premier film (Les Garçons et Guillaume, à table !) au profit d’un ton plus dramatique – bien que teinté de scènes de comédie – en s’intéressant au destin d’une actrice au chemin contrarié.
Maryline est une jeune femme de province qui « monte à Paris » pour tenter sa chance en tant que comédienne et écumer les castings de cinéma. Après une expérience malheureuse avec un réalisateur tyrannique, elle se retire du métier et sombre dans l’alcool, avant qu’un autre cinéaste ne fasse appel à elle et lui confie un petit rôle qui, de fil en aiguille, lui ouvrira d’autres portes.
Guillaume Gallienne s’applique donc à suivre le parcours d’une actrice – au départ – ratée, et le fait de manière syncopée, en s’attardant sur plusieurs moments de sa carrière, de son évolution, séparés par des ellipses significatives. Ainsi, après une première partie consacrée au tournage catastrophique qui fait vivre à Maryline une humiliation intenable, le film la laisse dans un état lamentable avant de la retrouver, un certain temps plus tard, dans une situation toute autre mais toujours marquée – car devenue alcoolique – par cet incident « fondateur ».
La première et la deuxième partie du film se complaisent donc dans la monstration de l’humiliation et du martyr de cette femme, victime collatérale d’un métier, d’un système, qui broierait donc ses jeunes recrues comme de la chair à pâtée. Décrite comme incapable de se défendre parce qu’issue d’un milieu « populaire » et « provincial », Maryline est en quelque sorte un personnage sacrificiel, dont le film se délecte à montrer le calvaire d’une manière assez voyeuriste.
Même s’il prend – de manière assez tordue – la voie d’une sorte de « succes-story », lors de sa seconde moitié, le film n’en fait pas moins preuve d’une forme assez bête et rebutante de déterminisme social proche du snobisme, comme si une personne extérieure au petit microcosme parisien n’avait pas les armes pour évoluer dans un milieu artistique où n’était pas capable de faire montre d’ambition.
Le film est donc majoritairement très pénible à regarder, de par cette vision réductrice et misanthrope du métier d’acteur et sa conception de la condition sociale d’un individu comme avantage ou handicap. D’autant plus que la construction du film en divers blocs narratifs séparés par des ellipses lui donne une allure de film à sketchs décousu, qui peine à trouver une cohérence et un propos.
Puis, une sorte de miracle inattendu se produit, et le dernier quart d’heure du film semble être touché par la grâce. Après une longue scène dont on ne saura qu’à son dénouement si elle est vécue par le personnage ou si elle est jouée sur une scène de théâtre – ce qui atteint un degré de trouble inespéré pour un film qui semblait cantonné à un naturalisme complaisant –, survient une séquence d’anthologie, la dernière du film, dans laquelle une émotion débridée sauve in extremis le personnage et le regard que pose sur elle le cinéaste.
Un tel cas de film raté pourvu d’une fin sublime est tellement rare, tellement particulier et difficile à appréhender, qu’il pose un véritable cas de conscience : est-ce qu’un final beau et puissant peut sauver un mauvais film ? Probablement pas, mais l’exemple que constitue Maryline est si atypique qu’il mérite au moins que la question continue d’être posée.