Una
de Benedict Andrews
Drame, thriller
Avec Rooney Mara, Ben Mendelsohn, Riz Ahmed, Tobias Menzies, Tara Fitzgerald
Sorti le 12 juillet 2017
Une jeune femme du nom d’Una décide d’aller confronter Ray, un homme qui, quinze ans auparavant, a eu une relation avec elle alors qu’elle n’avait que treize ans. Ayant purgé sa peine de prison pour abus sur mineur et ayant endossé une nouvelle identité, Ray travaille maintenant dans une usine qui subit des restructurations. C’est dans ce contexte tendu qu’Una refait surface dans sa vie, bien décidé à ne pas le laisser oublier le passé et à le surveiller.
Premier film du metteur en scène de théâtre Benedict Andrews, Una n’est autre que l’adaptation cinématographique de la pièce Blackbird de David Harrower – qu’Andrews avait d’ailleurs déjà montée sur scène. S’il s’efforce de masquer cet héritage théâtral – à grands renforts de flashbacks et autres stratagèmes d’ouverture de l’espace dramaturgique –, Benedict Andrews a finalement bien du mal à sortir de ce carcan de théâtre filmé, qui ressurgit lors de chaque face-à-face entre les deux personnages principaux, peut-être également à cause d’un texte qui verse dans la confrontation psychologique sans avoir l’air d’y toucher.
Car ce qui est le plus dérangeant dans Una, c’est bel et bien cette base scénaristique, ce texte volontairement ambigu, qui fait d’un abus sur mineur le moteur d’un suspense psychologique dans lequel chacun avance masqué. Que l’auteur cherche à donner sa chance à chacun, la possibilité d’exister en dehors d’impératifs moraux, passe encore, mais que la question principale en vienne à être « y avait-il, oui ou non, de l’amour entre cette fillette de treize ans et cet homme d’une quarantaine d’année ? » frôle presque l’indécence. Le malaise grandit encore lors du dernier tiers du film, qui fait d’Una une sorte de sociopathe harceleuse, donnant presque le beau rôle à Ray, qu’il conviendrait tout de même de qualifier de « pédophile ».
Bien sûr, les défenseurs d’Una argueront qu’il s’agit surtout d’un film d’acteurs. Ce sont d’ailleurs les deux têtes d’affiches – Rooney Mara et Ben Mendelsohn – qui attisent l’intérêt de prime abord. Ils sont effectivement très bons et s’investissent pleinement dans des personnages très ambigus. Mais cette ambiguïté qui offre aux acteurs de beaux rôles est aussi celle qui emmène le film vers des extrémités peu défendables, et empêche également la mise en scène de la transcender, tant elle est paralysante et glaçante.