Le Secret de la chambre noire
de Kiyoshi Kurosawa
Drame, Fantastique
Avec Constance Rousseau, Tahar Rahim, Olivier Gourmet
Le Secret de la chambre noire de Kiuoshi Kurosawa nous fait pénétrer dans l’univers sombre de Marie, interprétée par Florence Rousseau, et de son père photographe qui vivent en banlieue parisienne. Tombé amoureux et témoin de la tension familiale mais surtout de l’emprise qu’a le photographe sur sa fille, Jean, le nouvel assistant photographe tente d’aider Marie. A travers le récit, on ne saura jamais vraiment à quelle sphère se rattacher : thriller, horreur, fantastique, … Les personnages restent relativement hermétiques, car les éléments narratifs comprennent l’une ou l’autre incohérence. En relevant plus du mystère que du suspens, la vraisemblance du récit se voit altérée.
Pour les photographes, on hésite à être excité de ces daguerréotypes à taille humaine ou effrayé par le manque de discernement avec lequel le protagoniste s’en sert. Quoiqu’il en soit, on reste en retrait de ce triangle amoureux dont on ne comprend pas vraiment la logique.
Le père, probablement responsable du suicide de sa femme, en tout cas hanté par cette dernière, reproduit avec sa fille, tout en étant rongé par la culpabilité, les mêmes photographies, en la déguisant comme sa défunte mère ; dès lors, l’idée que le protagoniste reproduise les mêmes gestes sur sa progéniture, est difficilement acceptable. On peine également à comprendre le rapport de Marie dans cette histoire, qui trouve refuge, au fil du temps, dans la serre où sa mère s’est suicidée, mais surtout, qui ne semble pas si dérangée d’être physiquement identifiée à la défunte par les yeux de son père. Le personnage de George, l’ancien assistant du photographe mais toujours employé dans la maison, glisse à travers toute rationalité et sa présence dans le récit, qui n’est clairement pas le résultat de l’excellence de son jeu d’acteur, interroge sur sa nécessité. Jean, lui, nous introduit au récit en donnant l’impulsion de la mutation du rapport de la maison, sans pour autant être, totalement, à travers son regard. Le jeu d’acteur de Tahar Rahim, jusque-là assez juste, se démunit de toute crédibilité lorsqu’il se voit privé d’interlocuteur (focalisation) et la chute en pâtit par la volonté d’être trop didactique.
Tantôt voyeuse derrière un feuillage, tantôt omnisciente au cœur de l’action, la caméra schizophrène ne sait sur quelle focalisation danser, si bien qu’il en devient compliqué de s’attacher aux personnages, si ce n’est peut-être au promoteur immobilier, d’une logique sans faille et habilement intégré au récit grâce à Mathieu Amalric dont on regrette le rôle si furtif.
Certaines images semblent entrevoir des clés de lecture, mais les plans rapprochés et symboles ne font pas sens. Même si le contenu des images reste parfois trouble, le travail visuel d’Alexis Kavyrchine, directeur de photographie, n’en reste pas moins juste à travers un jeu de clair/obscur sensible.
Déjà abordé avec excellence, entre autre un an plus tôt dans Vers l’autre rive (prix de la mise en scène dans la catégorie Un Certain Regard à Cannes), la frontière entre vivant et mort est ici abordée de manière un peu trop frontale si bien qu’on a, malheureusement, peine y croire.